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mardi 30 décembre 2014

ANTONIO SKÁRMETA REÇOIT LE PRIX NATIONAL DE LITTÉRATURE DU CHILI

ANTONIO SKÁRMETA
LE 22 SEPTEMBRE 2013 À PARIS,  FRANCE.
PHOTO ULF ANDERSEN
Le jury officiel du Prix national de littérature 2014, présidé par le ministre de l’Éducation Nicolás Eyzaguirre, a décerné le principal prix des lettres du Chili à l’écrivain Antonio Skármeta. Les autres auteurs candidats étaient Poli Delano, Germán Marín, Jorge Guzmán et Pedro Lemebel. 

Cette consécration très prestigieuse est accordée tous les deux ans par le Ministère de l’Education. Isabel Allende (à qui le Prix a été attribué en 2010) et aujourd’hui Antonio Skármeta font partie des très rares auteurs lauréats à ne pas être poètes.

Antonio Skarmeta est né en 1940 au Chili. À la suite du putsch du Général Pinochet en 1973, il s'exile aux États-Unis, puis en Allemagne, où il a exercé en tant qu'ambassadeur du Chili. Scénariste pour le cinéma et la télévision, il a enseigné à l'Institut du cinéma de Berlin et a également publié des nouvelles et des romans, dont La Noce du poète (Grasset, Prix Médicis étranger 2001), La fille au trombone (Grasset, 2004), Le ballet de la victoire (Grasset, 2006), traduits dans plus de vingt langues.

En 2006, il reçoit le prestigieux Prix Flaiano pour l'ensemble de son œuvre puis, en 2011, le prix Planeta-Casa de América. Son ouvrage le plus connu reste Une ardente patience, adapté au cinéma sous le titre Il postino.




lundi 29 décembre 2014

1975 « UN BATEAU POUR LE NOËL DES ENFANTS DU CHILI »

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AFFICHE DE LA CAMPAGNE « NOËL DES ENFANTS CHILIENS » 1975, DESSIN DE JEAN EFFEL  
Aussitôt, le Secours populaire se mobilisait, afin que « s'expriment la solidarité morale et matérielle, vite et avec force », envers tous les démocrates et émigrés politiques chiliens. Appel aux donateurs, collectes dans les usines, dans la rue, les universités se multiplient, marquant l'attachement des ouvriers, intellectuels ou étudiants de France à la démocratie et aux valeurs d'entraide et de respect de la vie. Si le produit des collectes est surtout destiné aux victimes politiques du Chili et leurs familles, il est également employé à secourir les exilés politiques en France : logement, aide vestimentaire et financière, accompagnement dans la recherche d'un emploi, en relation avec d'autres associations.

De là, naît l'idée d'armer « un bateau pour le Noël des enfants du Chili ». L'Anjou appareille du Havre, le 18 décembre 1975. Il fait escale dans 17 pays o`u il recueille des dons, avec l'aide du comité extérieur de la Centrale unique des travailleurs chiliens (CUTC). Le bâtiment mouille à Valparaiso le 27 janvier 1976, chargé de 800 m3 de denrées pour des enfants dont 70 % sont sous-alimentés ; la cargaison, fournie pour moitié par le SPF, est distribuée par Caritas Chili. Ont été privilégiés les vivres -lait en poudre, légumes secs, pâtes, conserves-, plus les vêtements et le matériel scolaire. Le soutien, tant moral -le SPF dénonce les crimes de la dictature- que matériel se poursuit. En 1977, à l'initiative du SPF, des artistes (1), sous le parrainage de l'acteur Michel Piccoli, produisirent un disque, sans but lucratif, Chant pour les enfants du Chili. Chaque vente représente huit repas de cantine populaire. L'opération financera plus d'un million de repas pour les écoliers. A cette date, le SPF a déjà fait parvenir aux familles de victimes, en produits alimentaires et marchandises diverses, une aide d'une valeur de six millions de francs, équivalant aujourd'hui à 4,5 millions d'euros en pouvoir d'achat. La solidarité s'étendra bien au-del`a dans les comités du SPF avec des soirées de gala, des spectacles dans les collèges et lycées, la vente de produits artisanaux du Chili, comme les « arpilleras », tapisseries tissées par les femmes des cantines populaires ou les colliers fabriqués par les prisonniers et acheminés avec l'aide du clergé local.

Afin que la souvenir de la tragédie vécue par le peuple chilien ne s'efface pas, le SPF fera don, en novembre 2011, au Musée de la mémoire et des droits de l'Homme de Santiago, de ses archives relatives `a son activité durant la dictature d'Augusto Pinochet, sous forme d'originaux et de reproductions conservés dans son centre de documentation (2).

(1) Georges Brassens, Julien Clerc, Jean Ferrat, Juliette Gréco, Maxime Le Forestier, Colette Magny, Yves Montand, Mouloudji, Georges Moustaki, Serge Reggiani, Francesca Soleville, Anne Sylvestre
(2) http://www.museodelamemoria.cl

dimanche 28 décembre 2014

PHILIPPE DANTON, BOTANISTE SUR L'ÎLE DE ROBINSON CRUSOÉ

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TERRE À TERRE - FRANCE CULTURE «PHILIPPE DANTON, BOTANISTE SUR L'ÎLE DE ROBINSON CRUSOÉ», EMISSION TERRE À TERRE PAR RUTH STÉGASSY.  DIFFUSÉ LE SAMEDI 27 DÉCEMBRE 2014
Depuis des années Philippe Danton, botaniste correspondant du muséum national d'histoire naturelle de Paris, effectue des expéditions dans les îles de Robinson Crusoé pour y dresser l'inventaire des plantes et mieux comprendre leur écologie. Film documentaire, réalisé par William Leroux : « Botaniste sur l'île de Robinson Crusoé » DVD Zone 2, paru le 27 septembre 2011 Références musicales : Emil Spanyi/ Xavier Navarre Desandre : "Andaluciana"


L'ARCHIPEL JUAN FERNÁNDEZ. PHOTO NASA  

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CHILI: LES MAPUCHES RÉCLAMENT LEURS TERRES ANCESTRALES

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CHRONIQUE DES DROITS DE L'HOMME -  RFI «CHILI: LES MAPUCHES RÉCLAMENT LEURS TERRES ANCESTRALES», PAR VÉRONIQUE GAYMARD.  DIFFUSÉ LE SAMEDI 27 DÉCEMBRE 2014
DURÉE : 00:03:35
par Véronique Gaymard
LE LONKO DE LA COMMUNAUTÉ MAPUCHE DE TEMULEMU JUAN PICHÚN, ET SON PÈRE PASCUAL PICHÚN (DÉCÉDÉ LE 20 MARS 2013). 
dans le sud du Chili, les communautés autochtones Mapuche réclament depuis plusieurs décennies leurs droits sur leurs terres ancestrales récupérées par des compagnies forestières. Des confrontations violentes ont eu lieu avec les forces de police. Huit personnes avaient été condamnées en 2001 en vertu de la loi antiterroriste en vigueur depuis l'ère Pinochet. Mais en juillet dernier, le Chili a été condamné par la Cour interaméricaine des droits de l'homme pour violation du procès équitable et droit à la présomption d'innocence. Véronique Gaymard a pu rencontrer trois des Mapuches qui ont comparu lors de ces procès. En tournée en Europe en décembre, ils veulent attirer l'attention sur leur situation dans le sud du pays.


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samedi 27 décembre 2014

LES SÉRIES TURQUES À L'ASSAUT DU CHILI

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SÉRIE TURQUE, «TEMPÊTE DE PASSIONS »
Dédaignée par les principales chaînes locales, la série a finalement été programmée par la petite station Mega en mars, à une heure de grande écoute, devenant le programme télévisé le plus regardé de l'année. 

Suite à ce succès, deux autres chaînes, Canal 13 et Chilevision, ont acheté des séries turques, dont «Tempête de passions » qui sera diffusée en janvier. Entretemps, Mega, devenue une chaîne à succès, a opté pour deux autres séries turques, «Fatmagul » et « Ezel ». 

L'histoire de Shéhérazade et Onur a aussi séduit la Colombie et sera programmée en Uruguay, au Brésil, en Équateur et au Pérou. L'Argentine et la Bolivie ont également acheté la série. 

Un coup de maître pour la télévision turque, dont les séries sont devenues cultes dans des dizaines de pays à travers l'Europe et le Moyen-Orient, mais n'avaient jamais jusqu'à présent traversé l'Atlantique. 

« Il nous a fallu beaucoup de temps pour pénétrer le marché latino-américain », explique Izzet Pinto, président du distributeur turc Global Agency. 

« Mais nous y sommes parvenus il y a un an. Nous avons eu la chance d'avoir beaucoup de succès au Chili et cela nous a ouvert d'autres marchés, comme l'Argentine, la Colombie, le Pérou et la Bolivie », a-t-il indiqué sur le site spécialisé TodoTV News. 

Francisco Villanueva, vice-président du distributeur de Miami Somos Distribution, précise à l'AFP avoir «vendu environ une douzaine de scripts à au moins cinq pays d'Amérique latine ». 

« L'intérêt va grandissant et nous recevons de nombreuses propositions », ajoute-t-il. 


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Plus de romantisme, moins de sexe 

« Le feuilleton turc est excellent du point de vue de l'histoire, de la narration et des éléments artistiques et techniques (...). Le casting a des points communs avec nos pays et est très séduisant, avec des extérieurs exotiques qui mettent en valeur la production et le superbe travail de réalisation », relève Villanueva. 

Les séries turques s'inspirent des mélodrames classiques à la trame romantique sans quasiment de scènes de sexe. 

« Les gens aiment l'ancien format typique, le scénario classique, le triangle amoureux où le méchant est vraiment odieux et le bon souffre tout au long de la série », souligne Francisco Cortés, responsable des feuilletons à la Télévision nationale chilienne. 

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AFFICHE ORIGINALE DE LA SÉRIE TÉLÉVISÉE
« BINBIR GECE » ( LES MILLE ET UNE NUITS )
« Les séries turques racontent des histoires romantiques très traditionnelles, qui au fond contiennent les grands thèmes universels qui ne vieillissent jamais », renchérit la sociologue Manuela Gumucio, directrice de l'Observatoire des médias au Chili. 

En Amérique latine, où prolifèrent aujourd'hui les «narco-telenovelas », des histoires liées au trafic de drogue, ou des séries érotiques, les mélodrames turcs visent un public en quête de romance, dit à l'AFP le critique de télévision René Naranjo. 

« Les telenovelas latino-américaines ont dérivé vers des thèmes plus violents et explicitement sexuels, abandonnant leur public principal: les femmes de plus de 45 ans qui regardent massivement la télévision et aspirent à un retour aux histoires d'amour classiques sur le petit écran », affirme-t-il. 

Au Chili, le succès de Mega a forcé ses concurrents à évoluer et adapter leur programmation. La semaine dernière, Canal 13 a lancé « Le Sultan », un immense succès en Turquie. 

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HALIT ERGENT PREND UN SELFIE AVEC SOLIMAN LE MAGNIFIQUE
Dans cette série inspirée de la vie de Soliman le Magnifique, l'un des monarques les plus éminents de l'Empire ottoman au XVIe siècle, Halit Ergent tient le rôle principal. 

L'acteur turc, qui incarne Onur dans «  Les Mille et Une Nuits », est devenu une véritable star au Chili. 

« La télévision a un effet de multiplication », note René Naranjo. « Ce qui a du succès se vend » encore plus, ajoute-t-il, « certain que la réussite des "Mille et Une Nuits" s'étendra à toute l'Amérique latine ».

vendredi 19 décembre 2014

COMMENT JE SUIS DEVENU RICHE GRÂCE À INSTAGRAM

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Pour certains utilisateurs, toutefois, Instagram est devenu plus qu'un moyen de collectionner les commentaires et les "j'aime", au fur et à mesure qu'ils immortalisent leur vie, leurs voyages ou leurs habitudes alimentaires à l'aide de leur smartphone. De Nike à l'office de tourisme de Namibie, les entreprises et les organisations courtisent en effet de plus en plus les poids lourds d'Instagram et leurs nombreux abonnés, afin de toucher un public à la fois plus large et plus jeune. Et certaines sont prêtes à verser de généreuses compensations en échange de leurs services.

1 dollar par "j'aime"

Ainsi sont apparus les professionnels d'Instagram. Ces utilisateurs, qui ont d'abord utilisé l'application pour s'amuser, touchent à présent des salaires à six chiffres et sillonnent le monde pour prendre des photos et les partager avec leurs milliers, voire leurs centaines de milliers, d'abonnés.

Liz Eswein compte parmi les professionnels les plus recherchés. Cette New-Yorkaise de 25 ans s'est lancée sur Instagram dès l'arrivée du réseau en 2010 et a commencé à poster des photos de sa ville natale sur le compte @teNewYorkCity pendant son temps libre. Elle compte aujourd'hui plus de 1,2 million d'abonnés. A chaque collaboration avec une marque, Liz Eswein réclame 1 dollar [0,80 euro] par "j'aime" sur chaque photo sponsorisée, ainsi qu'un revenu séparé en fonction du nombre de photos prises. Certains de ses derniers clichés sponsorisés ont reçu plus de 23 000 mentions "j'aime". Deux photos de paysage, prises dans les Andes lors d'un voyage tous frais payés, en ont chacune généré 19 600 et 20 462.

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"Grâce à Instagram, j'ai voyagé dans le monde entier, reconnaît la jeune femme. Je reviens juste du Chili pour un projet. J'ai travaillé avec l'office de tourisme de Namibie. Je suis récemment allée à Shanghai, et avant cela à Dubaï et en Turquie, à chaque fois pour des clients. Il n'y a pas de mot pour décrire à quel point c'est extraordinaire de pouvoir voyager et d'être payée pour photographier tous ces endroits, j'adore ça."

Plus efficace que le marketing traditionnel

La New-Yorkaise s'est également associée à Laundry Service, une agence spécialisée dans les réseaux sociaux, afin de faire le lien entre son réseau de près d'un millier d'utilisateurs influents et certaines des plus grandes marques mondiales. Jason Stein, fondateur de l'agence, explique que ce type de photographe est de plus en plus recherché depuis un an. C'est "de la folie, cela échappe à tout contrôle, relève-t-il. Les contenus Instagram interpellent les utilisateurs mieux que n'importe quelle autre plateforme sur Internet, et c'est gratuit. Les entreprises ont compris qu'une photo sur le compte Instagram d'un membre ayant plus de 100 000 abonnés leur permettait de toucher directement plus de gens que n'importe quel autre outil marketing traditionnel."

Des chiffres qui expliquent sans doute le récent engouement d'Amazon, du créateur de mode Michael Kors et d'autres entreprises pour ces "photographes Instagram". Quatre-vingt-dix pour cent des utilisateurs de cette application ont moins de 35 ans, plus de la moitié en font un usage quotidien, un millier de commentaires sont postés chaque seconde et 1,6 milliard de mentions "j'aime" sont générées chaque jour.

Un complément de salaire pour les pros

Les photographes professionnels ont bien compris l'intérêt financier du réseau social. A Saint-Sébastien, en Espagne, Aiala Hernando considère son activité commerciale sur Instagram comme un "complément amusant" à son travail principal. Elle lui rapporte pas moins de 3 000 dollars supplémentaires par mois [2 400 euros]. "Il n'y a pas longtemps, je suis allée à Rome pour travailler sur un hôtel et immortaliser leur quotidien, raconte-t-elle. J'y ai passé vingt-quatre heures, trois semaines de suite, ce qui était très sympa. Pour un boulot en déplacement comme celui-là, je touche entre 2 000 et 5 000 dollars la journée [entre 1 600 et 4 000 euros]. Ce que je redoutais le plus en signant avec une agence, c'était de rendre mon fil Instagram trop commercial. Du coup, j'essaie de n'accepter que les boulots qui correspondent à mes contenus et j'évite de poster des choses trop difficiles pour mon public. Je reste toujours fidèle à mon style spécifique."

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Autre star du réseau social, Brian DiFeo réfute l'idée selon laquelle Instagram et ses photographes professionnels ne seraient que des modes passagères. "Au cours de l'année passée, Instagram a vraiment envahi notre quotidien. On en parle à la télé, dans les journaux, le phénomène n'est pas près de disparaître, assure-t-il. Et je ne suis même pas sûr qu'il ait tout donné en termes d'exploitation marketing."


Publié le 27 novembre 2014

jeudi 18 décembre 2014

AU CHILI, DES DISTRIBUTEURS DE BILLETS AU COMMISSARIAT

Après la fermeture, il est presque impossible d’obtenir de l’argent liquide.

LES BANQUES ONT INSTALLÉ DES DISTRIBUTEURS DE BILLETS
DANS LES POSTES DE POLICE POUR LUTTER CONTRE LES BRAQUAGES.
«Au coin de la rue, il y a une banque, mais le distributeur a été détruit par une bombe, et il n’a pas été remplacé», explique, résigné, Hardy Mora, qui est allé jusqu’au commissariat pour tenter de se procurer un peu de cash.

L’installation de distributeurs au sein de commissariats de police est une mesure temporaire prise pour remédier à la pénurie de distributeurs, devenus proies faciles pour les délinquants.

Quand elles fonctionnent, les machines sont prises d’assaut et rapidement à cours de billets de banque.

Selon la Surintendance des Banques et établissements financiers du Chili (SBIF), le nombre de guichets automatiques est passé de 9.288 en janvier 2013 à 7.877 en septembre 2014, alors que le nombre de distributeurs vandalisés a augmenté de 152% au cours de l’année.

Les guichets automatiques sont un objectif recherché par les voleurs au Chili en raison de sanctions particulièrement légères s’ils sont pris la main dans le sac.

Jusqu’à récemment, ils risquaient tout au plus 61 jours de prison. Maintenant, après une modification de la loi, ils encourent une peine de trois à cinq ans de détention.

Les techniques de braquage se sont diversifiées et ont même été exportées vers d’autres pays. La plus courante ces derniers temps, indique à l’AFP un commissaire de police du quartier de Recoleta, est de saturer de gaz l’endroit où se trouve le distributeur et d’allumer une étincelle ou bien de découper la machine au chalumeau.

- 980 plaintes en un week-end -

Les critiques accusent les banques chiliennes, qui ont enregistré une augmentation de 35% de leurs bénéfices entre janvier et octobre cette année, de ne pas investir dans des mesures de sécurité.

Le résultat est un casse-tête pour le client, notamment dans les quartiers populaires, où il est quasiment impossible de se procurer de l’argent.

Les plaintes concernant le manque de distributeurs sont si nombreuses que le Service national de la consommation a créé un système d’alerte virtuelle pour rendre compte des défaillances. En un week-end, 980 plaintes portant sur des machines hors service ou vides ont été enregistrées.

Pour répondre à la critique, en particulier en pleine période de fêtes de fin d’année, une banque publique, Banco Estado, a décidé de mettre des guichets automatiques dans les postes de police.

A Renca, un guichet automatique a été installé dans une cabine en plastique située à l’entrée du commissariat et sous le regard des policiers.

«C’est quand même bien d’avoir la certitude qu’il y a un guichet automatique qui fonctionne et ne va pas être explosé, c’est une bonne idée», assure Mora à l’AFP.

Mais certains pensent qu’il ne revient pas à la police d’assurer la sécurité. «C’est le secteur privé qui devrait financer les coûts des opérations de sécurité», estime Carlos Lagos, un habitant du quartier.

Il y a un an, après une nouvelle vague de hold-up, les banques avaient été obligées par décret s’accroître la sécurité de leurs guichets automatiques, mais peu de progrès ont été réalisés.

En attendant une amélioration, durant les six prochains mois les distributeurs continueront à fonctionner dans les postes de police. «Je pense que c’est une mesure désespérée, mais qui fonctionne», dit Rodrigo Garcia, un voisin du quartier.

AFP

jeudi 11 décembre 2014

BRÉSIL: LA FIN DE L’AMNISTIE RÉCLAMÉE 30 ANS APRÈS LA DICTATURE

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DES ANCIENS PRISONNIERS POLITIQUE TÉMOIGNENT DEVANT LA LA COMMISSION NATIONALE DE LA VÉRITÉ (CNV). PHOTO ROBERTO NAVARRO
Le pays reconnaissait jusqu’à présent quelque 400 morts ou disparus pendant cette période noire, contre 30.000 sous la dictature militaire en Argentine (1976-83) et 3.200 au Chili pendant la junte du général Pinochet (1973-90).

Le Brésil est l’unique pays d’Amérique du Sud n’ayant jamais jugé ces crimes, en raison d’une loi d’amnistie votée en 1979.

Selon la CNV, il y a eu également de graves violations des droits des paysans et des indigènes et les 21 ans de régime militaire ont entraîné la mort d’au moins 8.350 Indiens, victimes d’une politique d’Etat «d’action ou d’omission» qui créait les conditions favorables pour les expulser de leurs terres.




Le travail de la commission a été salué mercredi par le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, qui a demandé une diffusion «la plus large possible» de ses conclusions et recommandations.

La Commission nationale de la Vérité (CNV) a été mise en place en 2012 par Mme Rousseff, 66 ans, une ancienne guérillera d’extrême-gauche torturée et emprisonnée sous la dictature. Sa mission : enquêter sur les crimes du régime militaire.

Amnesty international a considéré le rapport comme un «pas historique» qui «ouvre le chemin pour que la loi d’amnistie ne soit plus un obstacle pour enquêter sur ces crimes», selon son directeur au Brésil, Atilo Roque.

- Dilma Rousseff émue -

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LES LARMES DE DILMA ROUSSEFF, REVENANT SUR LES ANNÉES DE DICTATURE AU BRÉSIL. CAPTURE D'ÉCRAN

« Nous respectons et rendons hommage à tous ceux qui ont lutté pour la démocratie », a déclaré la présidente Rousseff, sans pouvoir retenir ses larmes. Sans la vérité, les nouvelles générations et les familles des victimes « continuent à souffrir, comme si leurs proches mouraient de nouveau », a-t-elle ajouté.

La CNV a entendu plus de 1.100 témoignages, dont ceux de Mme Rousseff et des anciens présidents Luiz Inacio Lula da Silva (2002-2010) et Fernando Henrique Cardoso (1994-2002), en deux ans et sept mois de travail. Ce travail a conduit à un rapport de 4.400 pages, a indiqué le rapporteur de la CNV, Pedro de Abreu Dallari.

La CNV a dénombré «377 agents de l’Etat responsables de graves violations» des droits de l’Homme.

Parmi eux, huit militaires, présidents sous la dictature et tous décédés, depuis Humberto de Alencar Castelo Branco (1964-1967) jusqu’au dernier, Joao Baptista de Oliveira Figueiredo (1979-1985). Mais aussi des anciens ministres des forces armées, des diplomates, des policiers et même des médecins au service des tortionnaires.

Prison illégale arbitraire, torture, exécution sommaire, arbitraire ou extrajudiciaire et occultation de cadavres constituaient les principales violations.

- 'Crimes contre l’Humanité' -

Le rapport comprend divers récits de torture comme celui de Marcia Basseto Paes, arrêtée en 1977 : «Outre les chocs électriques dans le vagin, l’anus et les seins, ils m’ont obligée à danser nue devant les policiers».

Femmes violées et insultées, hommes castrés à froid, avortements provoqués par la torture : les prisonniers n’étaient plus maîtres de leurs corps et étaient soumis à la «domination totale» de leurs tortionnaires.

La CNV a estimé que l’application de la loi d’amnistie de 1979, qui avait permis le retour des exilés politiques au Brésil mais garantissait aussi aux tortionnaires de rester impunis, était «incompatible» avec le droit brésilien et l’ordre juridique international.

«Ce sont des crimes contre l’Humanité qui sont imprescriptibles et ne sont pas sujets à une amnistie», souligne la CNV, qui demande la révision de la loi.

Elle recommande aussi d’interdire les célébrations officielles militaires qui commémorent encore le coup d’Etat de 1964 et d’inclure des cours sur la démocratie et les droits de l’Homme dans les académies militaires et policière.

En septembre, l’armée a pour la première fois admis qu’elle ne niait plus les violations des droits de l’Homme commises sous la dictature mais sans reconnaître explicitement l’usage de la torture, ce qui a été jugé «insuffisant» par la CNV.

AFP

SOUTENANCE DE THÈSE « LES FEMMES DE L'EXIL CHILIEN »

L’attention est particulièrement portée sur les rapports sociaux structurants (sexe, classe sociale, génération et «race») ainsi que sur les stratégies et les ressources que ces femmes mobilisent selon leurs inscriptions sociales. En outre, cette thèse illustre l’enchevêtrement de différentes sphères d’activités (travail domestique, travail salarié et travail militant) et réinterroge la notion d’engagement militant, notamment au regard des rapports sociaux de sexe.

Soutenance de thèse de sociologie d'Yvette Marcela GARCIA, École doctorale 519 Sciences humaines et sociales, Laboratoire Dynamiques européennes DynamE - UMR 7367, Université de Strasbourg. 


« Les femmes de l'exil chilien. De l'Unité Populaire vers la terre d'asile:  une analyse en termes de rapports sociaux. »

Cette soutenance aura lieu le vendredi 12 décembre 2014 à 14h, à l'Institut Le bel, Salle Ourisson, 1er étage, Campus esplanade de l'Université de Strasbourg (Accès Tram C, Arrêt observatoire - plan ci-joint).

Le jury sera composé de:

Claudio BOLZMAN, Professeur, Haute école du Travail social - Genève et Université de Genève (Rapporteur)
Blandine DESTREMAU, Directrice de recherche, UMR 3320 LISE CNRS/CNAM (Rapporteure)
Fanny JEDLICKI, Maîtresse de conférence, Université du Havre (Membre invitée)
Juan MATAS, Maître de conférence HDR, Université de Strasbourg (Directeur)
Bérengère MARQUES-PEREIRA, Professeure, Université Libre de Bruxelles (Examinatrice)
Roland PFEFFERKORN, Professeur, Université de Strasbourg (Directeur)

Merci de bien vouloir me contacter pour confirmer votre présence - la salle Ourisson dispose de 48 places. 
Yvette Marcela GARCIA, ymgarcias@gmail.com

La soutenance sera suivie d'un pot (salle Vivien, à côté de la salle Ourisson) auquel vous êtes chaleureusement convié-e-s. Afin de l'organiser au mieux, je vous remercie de m'indiquer également votre venue. 

GRANDES VARIATIONS DANS L’UTILISATION D’INTERNET

Avec l’ouverture cette semaine de la conférence
annuelle LeWeb à Paris, le nouveau rapport de l’OCDE Mesurer l’économie numérique : un nouveau regard révèle de grandes variations dans l’utilisation d’Internet par les individus et les entreprises dans les pays de l’OCDE donne un éclairage sur les usages, le Smartphone change la donne un peu partout dans le monde, êtes vous préparé ? À la montée du trafic que suscite le smartphone ?

Près de deux tiers des adultes utilisent Internet tous les jours dans les pays de l’OCDE et 41% des internautes se connectent avec un téléphone portable ou un smartphone. En Islande, dans les pays nordiques et en Suisse, 9 adultes sur 10 surfent sur Internet, mais en Grèce, en Italie, au Mexique et en Turquie moins de 6 adultes sur 10 sont utilisateurs.

La Corée a la plus forte proportion d’abonnés (71%) ayant souscrit à un accès au haut débit, suivie par le Japon (47%) et les Pays-Bas (45%). Le Chili (74%), le Mexique (65%) et la Turquie (56%) sont en tête des pays délivrant un débit faible pour l’accès à Internet.

Les abonnements au haut débit sans-fil ont plus que triplé entre 2008 (environ 250 millions) et 2013 (environ 850 millions) dans la zone OCDE.

Pour la première fois, toujours en 2013, plus de smartphones que de mobiles classiques ont été vendus dans le monde. Le marché mondial des applications des téléphones mobiles était estimé à 20-25 milliards de dollars en 2013. L’utilisateur moyen d’un smartphone a 28 applications installées sur son téléphone portable mais n’en utilise que 11.

Environ 60% des internautes fréquentent les réseaux sociaux ou réalisent des achats en ligne ; mais moins de 30% ont recours aux services d’administration électronique. Seulement 11% des internautes prennent des rendez-vous médicaux sur Internet.

·80% des individus achètent des biens et des services en ligne au Danemark et au Royaume-Uni, contre moins de 30% au Chili, en Italie, au Mexique et en Turquie. Le nombre d’internautes ayant des activités bancaires en ligne va de 90% en Estonie, en Finlande et en Norvège, à moins de 20% au Chili et en Grèce.

94% des entreprises de la zone OCDE ont un accès au haut débit et 76% ont leur propre site ou page Web ; mais seulement 21% d’entre‑elles proposent des produits à la vente en ligne. Parmi les petites entreprises, elles sont presque toutes connectées au Canada, Danemark, en Finlande, France, Islande, en Corée et en Suisse contre moins de 80% en Grèce et en Pologne.

mercredi 10 décembre 2014

ÉTATS-UNIS : « J'AI ÉTÉ INTERROGATEUR À ABOU GHRAIB. J'AI TORTURÉ »

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TABLEAUX DE FERNANDO BOTERO REPRÉSENTANT DES SCÈNES DE TORTURES À ABOU GHRAIB
Mais l'intitulé du cours, « Ecrire la guerre », m'a empêché de laisser à trop grande distance les souvenirs qui me hantent depuis dix ans. Je suis reconnaissant à Lehigh de m'avoir permis de donner ce cours. La volonté de l'école de mettre d'anciens combattants dans les salles de classe représente exactement ce que ce pays doit faire pour traiter de façon collective l'héritage de treize années de guerre. Mais donner un cours sur la guerre m'a rappelé chaque jour que je ne suis pas un professeur d'université.

J'ai été interrogateur à Abou Ghraib. J'ai torturé.

Abou Ghraib [prison proche de Bagdad où des militaires et des agents de la CIA ont commis des violations des droits de l'homme à l'encontre de détenus irakiens, révélées en 2003] pèse sur chaque minute de chacune de mes journées. Début 2004, à l'intérieur d'Abou Ghraib, des ouvriers ont recouvert en toute hâte des fresques représentant Saddam Hussein avec une couche de peinture jaunâtre. Je me suis accidentellement appuyé contre l'un des murs. Je porte encore la polaire noire sur laquelle s'étale une tache délavée. Je sens encore l'odeur de la peinture. J'entends encore les bruits. Je vois encore ces hommes que nous appelions détenus.

Pour les livres d'histoire

Lorsque j'ai demandé à mes élèves de partager leurs souvenirs de la publication des photos montrant les sévices infligés aux détenus d'Abou Ghraib, ils m'ont regardé de la façon dont les étudiants vous regardent lorsqu'ils pensent qu'ils devraient savoir quelque chose et sont trop gênés pour admettre qu'ils ne le savent pas. La plupart ont détourné les yeux, certains m'ont fait un signe de tête évasif, d'autres ont préféré être honnêtes et ont tout simplement bâillé.

C'était ma première rencontre avec une génération qui ne considère pas la publication des photos d'Abou Ghraib comme un moment capital dans leur vie. Je ne les blâme pas. A cette époque, en 2004, ils étaient à l'école primaire. Cela appartient aux livres d'histoire. C'est le genre de choses dont parlent leurs parents. La réponse à une question dans un contrôle.

En regardant leurs visages dénués de toute expression, je me suis rendu compte que, si je le voulais, je pourrais m'abandonner à un puissant sentiment de soulagement. Abou Ghraib finira par s'effacer. Mes transgressions seront oubliées. Mais seulement si je le permets.

J'ai publié dans les journaux des articles décrivant les sévices auxquels nous avons soumis les détenus irakiens. J'ai donné des interviews à la télévision et à la radio. J'ai parlé devant des groupes d'Amnesty International et j'ai tout confessé à un avocat du ministère de la Justice et à deux agents du service d'enquêtes criminelles de l'armée. J'ai dit tout ce qu'il y avait à dire. Il me serait facile de prétendre que la meilleure chose à faire est de tourner la page. 

« Je ne suis pas cet homme » 

Debout devant la classe ce jour-là, j'ai été tenté de laisser l'apathie adoucir les vérités douloureuses de l'histoire. Je n'avais plus à assumer mon rôle d'ancien interrogateur d'Abou Ghraib. J'étais professeur à l'Université Lehigh. Je pouvais noter des devoirs et dire des choses intelligentes en classe. Mon fils pouvait prendre le bus pour aller à l'école et dire à ses amis ce que son père faisait comme métier. J'étais un homme dont on pouvait être fier.

Mais je ne suis pas cet homme. J'ai été interrogateur à Abou Ghraib. J'ai torturé.

Finalement, j'ai demandé à mes élèves de chercher les photos d'Abou Ghraib et d'écrire sur leur réaction. Nous avons passé du temps à parler des sévices commis et je leur ai même fait lire certaines des choses que j'ai écrites. Ils ont continué à m'appeler « professeur », mais je soupçonne qu'ils ne me voyaient plus comme tel.

Beaucoup de choses restent censurées

[Mardi 9 décembre 2014], le Sénat a publié son rapport sur la torture. Beaucoup de gens ont été surpris par son contenu : il parle d'une utilisation du « waterboarding » [ou simulation de noyade : de l'eau est versée sur un tissu couvrant la tête et les voies respiratoires, ce qui donne la sensation de mourir par asphyxie] beaucoup plus fréquente que ce qui a été affirmé, de privations de sommeil allant jusqu'à une semaine, d'une pratique humiliante et horrible appelée « réhydratation rectale ». Je ne suis pas surpris. Je peux vous assurer qu'il y en a encore plus. Beaucoup de choses sont encore censurées.

La plupart des Américains n'ont pas lu ce rapport. La plupart ne le liront jamais. Mais il nous rappellera à jamais le pays que nous avons été.

Dans une salle de classe du futur, une enseignante demandera à ses élèves de lire des choses sur ce que ce pays a fait dans les premières années du 21e siècle. Elle distribuera des extraits du rapport du Sénat sur la torture. Il y aura des regards vides et des bâillements indifférents. Les élèves écriront des dissertations et des devoirs. Et ils apprendront que ce pays n'est pas toujours une chose dont on peut être fier.



samedi 6 décembre 2014

ARGENTINE : C’EST LE SANG QUI PARLE

DESSIN DE BOLIGÁN PARU DANS EL UNIVERSAL, MEXICO

Le petit-fils de la présidente des Grands-Mères de la place de Mai vient de reconstituer son histoire grâce à l’ADN. La preuve que l’“indice grand-parental” est un outil essentiel pour identifier les liens de parenté.


Laura Carlotto a accouché derrière des barreaux, une cagoule sur la tête. Elle est restée cinq heures avec son bébé. Avant qu’on ne le lui vole, elle lui a murmuré à l’oreille : “Tu t’appelles Guido, comme ton grand-père.” Puis on l’a endormie, on l’a transférée ailleurs et on l’a tuée d’une balle dans le dos. 

Trente-six ans plus tard [en août dernier], lors d’une conférence de presse, Estela de Carlotto [la présidente des Grands-Mères de la place de Mai] a regardé droit devant elle et a annoncé avec satisfaction : “Ce que nous avions dit s’est réalisé : ce sont eux [les enfants] qui vont nous chercher.” Ignacio Hurban était séparé de ses parents adoptifs par les gènes et la culture. Il avait des doutes, et, quand ces doutes sont devenus insupportables, il a envoyé un courriel aux Grands-Mères de la place de Mai. Il a fait faire des analyses et son sang l’a confirmé : il est le petit-fils n° 114 [le 114e à être identifié, l’organisation estimant à 500 le nombre de bébés disparus]. 

Il est Guido Montoya Carlotto. Il a cherché ses origines, la science les a trouvées. Bien des années auparavant, ayant perdu tout espoir de revoir leurs enfants, les Grands-Mères avaient compris qu’elles devaient désormais rechercher leurs petits-enfants. Pour y parvenir, elles se cachaient à la sortie des écoles ou se déguisaient en infirmières dans les hôpitaux. Elles prenaient le thé dans des bars de Buenos Aires comme Las Violetas [où elles simulaient des anniversaires pour se réunir sans attirer l’attention] et s’exposaient au mépris dans les commissariats. Elles reprenaient espoir puis s’effondraient. 

Elles prêchaient dans le désert : les journaux leur fermaient leurs portes, les juges les chassaient de leurs bureaux. L’Argentine était un pays fermé, alors elles sont parties chercher de l’aide ailleurs. Elles dénonçaient les disparitions d’opposants et les vols de bébés, mais se demandaient aussi comment sauter le chaînon manquant – leurs enfants – pour retrouver leurs petits-enfants lorsque la démocratie reviendrait. 

En France, en Espagne, en Italie et en Suède, des scientifiques leur avaient dit que c’était impossible : les identifications se faisaient uniquement à partir de tests de paternité. En 1982, quand Chicha Mariani, première présidente des Grands-Mères de la place de Mai, et Estela, la vice-présidente, sont arrivées à New York pour exposer la situation devant l’ONU, [le généticien argentin exilé] Víctor Penchaszadeh les a rencontrées dans un hôtel de l’avenue Lexington. Et il les a écoutées. 

Des cobayes. Désireux de redorer le blason d’une science associée à l’eugénisme nazi, il leur a dit qu’il était prêt à relever le défi : déterminer la filiation d’un enfant à partir du sang de ses grands-parents. Lui et ses collègues de l’université de Berkeley ont fait équipe avec Fred Allen, du New York Blood Center, ainsi qu’avec des statisticiens, des épidémiologistes et des mathématiciens coordonnés par la généticienne Mary-Claire King. 

Et ils se sont mis au travail. En 1983, ils ont annoncé à Chicha et Estela : “Oui, c’est possible, et le test est infaillible.” L’“indice grand-parental” [qui permet d’établir le lien de parenté entre petits-enfants et grands-parents avec une probabilité de 99,99 %] était né. Il a d’abord été élaboré pour les quatre grands-parents, puis pour trois, puis pour des parents moins directs. La dictature était finie et les tests pouvaient commencer dans le pays. Mais le chemin restait semé d’embûches. 

Le laboratoire privé le plus connu d’Argentine était alors dirigé par un ancien expert de l’armée. Comme l’association des Grands-Mères de la place de Mai ne voulait pas avoir recours au service d’un militaire, le ministère de la Santé de Buenos Aires a transmis les examens au service d’immunologie de l’hôpital Durand [de Buenos Aires]. La première restitution grâce à des techniques immunogénétiques a été obtenue en 1984. C’était celle qui liait Elsa Pavón à sa petite-fille Paula Logares, 7 ans. Les retrouvailles ont été difficiles, jusqu’au moment où la grand-mère a rappelé à Paula comment elle appelait son père quand elle était petite : Calio. La petite s’est mise à pleurer, puis s’est endormie. 

Les grands-mères et les proches qui les accompagnaient ont alors poursuivi leurs efforts, tout en se demandant si elles avaient opté pour la bonne méthode. Elles ont milité pour la création d’une Banque nationale des données génétiques (BNDG), qui a vu le jour en 1987. Cette banque était appelée à receler l’un des trésors de l’Argentine, le sang des personnes qui acceptaient qu’il soit comparé avec celui des gens qui doutaient de leur identité. “Nous étions des cobayes”, assure Abel Madariaga, le secrétaire des Grands-Mères de la place de Mai, dans le magnifique documentaire 99,99 %. La Ciencia de las Abuelas [La science des Grands-Mères].