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mardi 30 octobre 2012

CAMPAGNE DE PRÉVENTION CONTRE LE CANCER DU SEIN FAIT POLÉMIQUE

LA PAGE FACEBOOK DE LA CAMPAGNE  « POR AMOR A LAS TETAS » 

« S'ils nous plaisent tellement, alors il faut en prendre soin. Encouragez les femmes à aller se faire dépister. » Ce qui nous plait tellement, c'est censé être les seins de ces dames. Le slogan du ministère de la Santé chilienne oscille volontiers entre humour et prévention. Le but est clair : sensibiliser les hommes au drame que peut constituer le cancer du sein et les inciter à encourager leur femme ou les femmes en général d'ailleurs à aller se faire dépister.
Dans la video, composée de plans courts, rythmés, on peut apercevoir des dizaines de poitrines dans diverses positions. De la tétée de bébé au cours de sport, en passant par une scène de sexe où l'on voit des seins malaxés. Le moment est certes bref, mais sans doute un peu discutable, car il dilue le message dans la polémique.
Volontiers machiste, le spot ne s'adresse qu'aux hommes sur l'air du « regardez moi ces beaux seins qui vous émoustillent, sauvez-les » Autre reproche que lui font certains, toutes les femmes filmées ont des poitrines avantageuses. Comme si les petits seins auraient moins d'impact sur la cible visée par la publicité.

Toujours est-il qu'elle produit son buzz et qu'elle fait parler du cancer du sein. L'objectif est rempli. 

Sur internet, les commentaires sont fatalistes «  Nous vivons dans une société machiste alors forcément les pubs le sont aussi », estime Sofy «C'est regrettable, mais les gros seins attirent plus l'attention. Ils auraient pu au moins mettre une poitrine normale », regrette Nini.

Du reste, la principale critique n'est ni d'avoir utilisé des seins, ni d'avoir utilisé des femmes en position sexy, mais bien d'avoir oublié les poitrines normales dans la video. « La taille importe peu. Le cancer les attaque aussi ». Mais bien entendu, « l'agence de pub qui a réalisé la video doit être composée principalement d'hommes et si il y a une femme parmi eux, elle doit être siliconée », sourit Manuel.

Finalement, ce sont ceux qui imaginent la situation à l'envers qui sont souvent les plus drôles. « En tant qu'homme, j'ai décidé de ne plus me préoccuper du cancer du sein vu qu'elles se moquent du cancer de la prostate », écrit Sas. Le mot de la fin à un Québécois, Marc-André qui « ne voudrait pas voir une vidéo pareille sur le cancer des testicules ! » Comment dire, nous non plus !

GARCIA MARQUEZ AUX ÉLECTIONS MUNICIPALES

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LES ALENTOURS DU «  PALACIO DE LA MONEDA » À SANTIAGO,  (LE PALAIS DE LA MONNAIE), UTILISÉ À SON ORIGINE COMME HÔTEL DES FINANCES, OÙ L'ON FRAPPAIT DES INSIGNES SUR LES PIÈCES A ÉTÉ DESSINÉ PAR L'ARCHITECTE ITALIEN GIOACCHINO TOESCA. SA CONSTRUCTION DÉBUTA EN 1784 ET IL FUT INAUGURÉ EN 1805. PALAIS PRÉSIDENTIEL ET SIÈGE DU GOUVERNEMENT DEPUIS 1845 , PORTE LA MÉMOIRE DU COUP D’ÉTAT DE 1973 QUI ENTRAÎNA LA MORT D’ALLENDE. PHOTO NATHALIE CHAHINE
J’imaginais rencontrer ici des latinos au sang chaud, comme les Argentins, des « tigres » au tempérament aussi flamboyant que leur réussite économique. J’ai plutôt l’impression d’avoir atterri en Suisse. Ici, la «votacion » est une affaire sérieuse, et obligatoire. [Ce scrutin était le premier depuis l'inscription automatique des personnes majeures sur les listes électorales, qui a ajouté cinq millions d'électeurs, portant le corps électoral à de 8,1 millions à 13,4 millions dans un pays de 17 millions d'habitants. Mais le vote n'étant plus obligatoire, NdR] S’abstenir est même passible d’une amende – encore merci à tonton Pinochet. Si ce n’était pas le cas, peu iraient faire leur devoir, m’assure ma guide, Carla. Les rebelles se défoulent sur twitter et Facebook, en traitant d’assassins d’anciens caciques de la junte militaire (comme le maire de Providencia, Cristian Labbé). Un échauffement en vue des présidentielles de 2013 ?


lundi 29 octobre 2012

MUNICIPALES AU CHILI : L'OPPOSITION DE CENTRE GAUCHE REMISE EN SELLE AVANT LA PRÉSIDENTIELLE

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URNES POUR LES ELECTIONS MUNICIPALES AU CHILI QUI  ONT EU LIEU LE 28 OCTOBRE 2012.  «  MAIRE  » , «   CONSEILLERS MUNICIPAUX » PHOTO CITIZENSIDE
Mauricio Morales, expert électoral à l'Université Diego Portales, a jugé quant à lui que cette victoire de la Concertation tombe du ciel. Aucun analyste n'avait prévu une victoire de cette nature (à l'issue de laquelle) la Coalition va administrer quasiment 50% des Chiliens.

La Concertation s'était enlisée dans des conflits internes après la victoire de Sebastian Piñera à la présidentielle de 2010.

Malgré la popularité de la présidente sortante Michelle Bachelet, le candidat de la gauche, l'ex-président Eduardo Frei, n'avait pu alors éviter la première victoire de la droite depuis la fin de dictature. Au Chili, le président ne peut accomplir deux mandats successifs.

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DES BUREAUX DE VOTE  POUR LES ELECTIONS MUNICIPALES AU CHILI QUI  ONT EU LIEU LE 28 OCTOBRE 2012.  «  MAIRE  » , «   CONSEILLERS MUNICIPAUX » PHOTO CITIZENSIDE


Selon les observateurs, la victoire de dimanche est surtout due aux erreurs du gouvernement Piñera qui, à mi-mandat, enregistre moins de 30% d'opinions favorables, malgré une croissance économique de 6% et un chômage historiquement bas.

La gauche a remporté la mairie de Santiago, Carolina Toha, ex-ministre sous la présidence de Michelle Bachelet, ayant battu le sortant ultra-conservateur Pablo Zalaquet.

Au total, l'opposition a emporté 167 mairies, contre 147 en 2008, et la droite en a perdu 24, restant à la tête de 120 municipalités.

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DES ISOLOIRS POUR LES ELECTIONS MUNICIPALES AU CHILI QUI  ONT EU LIEU LE 28 OCTOBRE 2012.  «  MAIRE  » , «   CONSEILLERS MUNICIPAUX » PHOTO CITIZENSIDE

Dans les environs de la capitale, à Providencia, la candidate indépendante Josefa Errazuriz, sociologue et activiste locale, a défait un ancien colonel de l'armée, Cristian Labbé, fervent partisan du général Pinochet et qui dirigeait la ville depuis 16 ans.

Dans la commune voisine de Ñuñoa, la petite-fille de l'ancien président socialiste Salvador Allende, renversé lors du putsch d'Augusto Pinochet en 1973, Maya Fernandez, s'est imposée, par moins de 100 voix contre le candidat de droite Pedro Sabat, maire de la commune depuis 16 ans et qui avait servi deux autres années sous la dictature.

Environ 13,5 millions de Chiliens étaient appelés dimanche à élire les maires et les conseillers municipaux des 345 communes du pays.


CHILI: LA PETITE-FILLE DE SALVADOR ALLENDE ÉLUE AUX MUNICIPALES

L'ANCIEN PRÉSIDENT SOCIALISTE CHILIEN SALVADOR ALLENDE ET SA FEMME HORTENSIA BUSSI AVEC SA  PETITE-FILLE MAYA FERNÁNDEZ ALLENDE. PHOTO COLLECTION DE LA FONDATION SALVADOR ALLENDE (FSA), CHILI, 1971

Le centre-droit a conservé au moins cinq autres grandes villes: Viña del Mar, Valparaiso, La Florida, Las Condes et San Bernardo, mais il a perdu Concepcion (sud).

Les élections de dimanche portaient sur 345 places de maire et 2.224 sièges aux conseils municipaux. Après dépouillement de plus de 90% des bulletins, l'alliance de droite au pouvoir remportait 37% des sièges, contre 43% pour la gauche, divisées entre de nombreux partis.

Ce scrutin était le premier depuis l'inscription automatique des personnes majeures sur les listes électorales, qui a ajouté cinq millions d'électeurs, portant le corps électoral à de 8,1 millions à 13,4 millions dans un pays de 17 millions d'habitants. Mais le vote n'étant plus obligatoire, de nombreux Chiliens se sont abstenus, à hauteur de 80% dans certaines circonscriptions.

Après l'élection de Sebastian Piñera à la tête du Chili, qui a mis fin à 20 ans de pouvoir du centre-gauche en 2009, l'alliance de centre-droit a en effet accepté l'inscription automatique à condition que le vote ne soit plus obligatoire. Le président a vu dans l'abstention de dimanche "un signal d'alarme" pour la démocratie et promis que son gouvernement ferait tout son possible pour que la participation soit plus forte à l'élection présidentielle prévue en novembre 2013.

dimanche 28 octobre 2012

CHILI - L'OPPOSITION DE CENTRE-GAUCHE REMPORTE LES MUNICIPALES

CAROLINA TOHÁ DÉDIE À SON PÈRE, JOSÉ TOHÁ, - QUI A ÉTÉ ASSASSINÉ PAR ÉTRANGLEMENT  SOUS LA DICTATURE DE PINOCHET -,  D'AVOIR RÉUSSI SON PARI D'ENLEVER LA MAIRIE DE SANTIAGO DU CHILI À L'EXTRÊME-DROITE
Ce scrutin était le premier depuis une récente modification de la loi électorale qui a abouti à l'inscription sur les listes de plus de cinq millions de nouveaux électeurs, majoritairement des jeunes de moins de 35 ans. La gauche, qui a gouverné le pays durant les 20 années qui ont suivi la fin de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990), a remporté la mairie de Santiago, Carolina Toha, ex-ministre sous la présidence de Michelle Bachelet, ayant battu le sortant ultra-conservateur Pablo Zalaquet. 
Dans les environs de la capitale, à Providencia, la candidate indépendante Josefa Errazuriz (55,21%), sociologue et activiste locale, a défait un ancien colonel de l'armée, Cristian Labbé (44,65%), fervent partisan du général Pinochet et qui dirigeait la ville depuis 16 ans. 
Environ 13,5 millions de Chiliens étaient appelés à élire les maires et les conseillers municipaux des 345 communes du pays. 
Outre l'inscription automatique sur les listes, c'est la première fois que le vote n'est plus obligatoire. Auparavant, les Chiliens qui ne votaient pas encouraient une peine d'amende. (MARTIN BERNETTI)

SOLIDARITÉ AVEC LES PRISONNIERS MAPUCHES


Nous souhaitons rendre un hommage chaleureux et fraternel à leur courage et à leur détermination face à cet Etat chilien qui les persécute depuis 130 ans et les emprisonne arbitrairement, au mépris de leurs droits les plus fondamentaux en tant que personnes, en tant que Mapuche, en tant que Peuple Nation souveraine et autonome, en tant qu'héritiers légitimes d'un territoire ancestral dont ils ont été spoliés, qui a été livré en toute impunité aux appétits féroces et dévastateurs des entreprises forestières et minières et dont ils demandent la restitution.

Nous nous réunirons donc, une fois encore à Paris, ce DIMANCHE 28 octobre 2012, de 18h à 20h, devant la Fontaine St Michel, et nous espérons accueillir quelques musiciens Mapuche pour qu'au son de cette musique qui a traversé des siècles de colonisation hispano-chilienne, nous puissions célébrer l'issue de la grève de la faim des prisonniers politiques Mapuche incarcérés à Angol, ainsi que celle des prisonniers politiques Mapuche de la prison de Temuko, tous prêts, il y a seulement quelques jours, à donner leur vie pour être entendus.

Aujourd'hui, les 5 prisonniers de Temuko ont obtenu leur transfert à Angol -ce qu'ils réclamaient pour se rapprocher de leurs familles- après un jeûne de 23 jours, dont les 5 derniers furent aussi une grêve totale de la soif.. Cependant, toutes leurs revendications n'ont pas abouti, loin de là. De la même façon, les 4 d'Angol n'ont obtenu pour le moment qu'une victoire partielle. En effet, trois d'entre eux restent emprisonnés: Daniel Levinao sera rejugé après l'annulation de sa condamnation, quant à Eric Montoya et Rodrigo Montoya, ils sont en attente de leur procès et risquent jusqu'à 22 ans de prison.

Mais quoi qu'il se passe dans un avenir proche, la décision de la Cour Suprême n'en est pas moins un camouflet magistral pour l'Etat chilien et pour le Procureur Chamorro dont la responsabilité est sérieusement engagée dans les montages politico-judiciaires et les condamnations sans preuves de jeunes Mapuche, condamnations aujourd'hui mises à mal par la décision de la Cour Suprême, la plus haute instance de Justice au Chili.

Rien n'est donc encore vraiment gagné et cette victoire partielle ne constitue qu'une étape pour ce peuple courageux, en résistance depuis si longtemps. Car la répression continue de frapper les communautés, qui sont en permanence espionnées, discriminées, violemment réprimées par les forces spéciales de police qui quadrillent la campagne environnante et peuvent lancer à tout moment des raids sauvages, visant indifféremment les anciens, les femmes, les enfants...Cette torture au quotidien, ces humiliations, ce terrorisme institutionnel par la militarisation de toute une région, nous ne les acceptons pas. Aussi, nous continuerons de les dénoncer haut et fort, tant que le Peuple Mapuche n'aura pas retrouvé le plein exercice de ses droits, conformément à la Convention 169 de l'OIT, dans le respect de sa langue, de sa culture et son identité en tant que nation souveraine, et récupéré l'ensemble de son territoire où il vivait jadis, avant l'invasion espagnole, et où reposent ses ancêtres.

Dimanche 28 octobre, soyons le plus nombreux possible pour fêter la libération du jeune Weichafe, Paulino Levipan Coyán, et la fin de cette épreuve très dure que représente une longue grève de la faim en prison. Mais restons aussi attentifs et mobilisés pour la suite, pour dire à Piñera et à son gouvernement, que nous ne les laisserons pas continuer à exercer leur répression aveugle à l'encontre du Peuple Mapuche, à tirer sur les enfants et à condamner, au titre d'une Loi antiterroriste héritée de la dictature militaire, des femmes et des hommes qui refusent à juste titre de voir piller et violer leurs terres par les entreprises multinationales. Tout au long de cette grève de la faim, l'opinion internationale, en Europe notamment, s'est mobilisée, et nous savons que cette détermination à combattre l'injustice et le racisme de l'Etat chilien ne faiblira pas.

Pu peñis, pu lamngen, vous pouvez compter sur notre infatigable soutien et sur notre solidarité inconditionnelle, au-delà des mers et au-delà des mots. MARICHIWEU!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Paris, le 26 octobre 2012


Collectif de Soutien au Peuple Mapuche- Commission Ethique Contre la Torture (CECT-France) -Terre et Liberté Pour Arauco- Front de Gauche Latino- Fédération des Associations Chiliennes en France



jeudi 25 octobre 2012

84 MILLIONS D'ÉTOILES ET CE N’EST PAS TERMINÉ …

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LA VUE DU TÉLESCOPE VISTA (VISIBLE AND INFRARED SURVEY TELESCOPE FOR ASTRONOMY) INSTALLÉ À L’OBSERVATOIRE DE CERRO PARANAL AU CHILI, MONTRE LE TÉLESCOPE PENDANT L'HIVER, IMAGE PRISE PAR L'AMBASSADEUR STEPHANE GUISARD.

La plupart des galaxies spirales, y compris notre galaxie, la Voie Lactée, se caractérisent par une grande concentration d'étoiles âgées autour de leur centre que les astronomes appellent le bulbe. Comprendre la formation et l'évolution du bulbe de la Voie Lactée est essentiel pour comprendre la galaxie dans son ensemble. Toutefois, l'obtention d'observations détaillées de cette région n'est guère aisée.

« Les observations du bulbe de la Voie Lactée sont très difficiles car il est obscurci par la poussière, » explique Dante Minniti (Pontificia Universidad Catolica de Chile, Chili), co-auteur de l'étude. "Afin de scruter le cœur de la galaxie, nous devons effectuer les observations dans le domaine infrarouge, moins affecté par la présence de poussières".


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EN SCRUTANT AU TRAVERS DES ÉPAIS NUAGES DE POUSSIÈRE DU « BULBE » DE NOTRE GALAXIE (LES MYRIADES D’ÉTOILES ENTOURANT SON CENTRE) ET EN RÉVÉLANT UN NOMBRE ÉTONNANT DE DÉTAILS, UNE ÉQUIPE D’ASTRONOMES A DÉVOILÉ DES ÉTOILES D’UNE DIVERSITÉ PEU HABITUELLE DANS LE GROUPE D’ÉTOILES APPELÉ TERZAN 5. CE CURIEUX COCKTAIL D’ÉTOILES, ENCORE JAMAIS OBSERVÉ DANS LE BULBE, LAISSE SUPPOSER QUE TERZAN 5 EST EN FAIT UN DES BLOCS ÉLÉMENTAIRES PRIMORDIAUX DU BULBE, TRÈS PROBABLEMENT LE VESTIGE D’UNE GALAXIE NAINE AYANT FUSIONNÉ AVEC LA VOIE LACTÉE DURANT SES TOUS PREMIERS JOURS. PHOTO ESO/F. FERRARO

Le grand miroir, le large champ de vision et la grande sensibilité des détecteurs infrarouges équipant VISTA, le télescope de 4,1m de l'ESO dédié aux grands sondages dans le visible et l'infrarouge, en font de loin l'instrument le plus approprié pour cette tâche. L'équipe d'astronomes a extrait les données issues du programme « VISTA Variables in the Via Lactea » (VVV) [1], l'un des six sondages publics effectués à l'aide de VISTA. Les données ont été utilisées pour constituer une image couleur d'une taille monumentale de 108 200 par 81 500 pixels contenant pratiquement 9 milliards de pixels. Il s'agit de l'une des plus grandes images astronomiques jamais créées. L'équipe a ensuite utilisé ces données afin de compiler le plus vaste catalogue de la concentration d'étoiles au centre de la Voie Lactée jamais produit [2].

Afin de faciliter l'analyse de ce vaste catalogue, la luminosité de chacune des 84 millions d'étoiles est représentée en fonction de sa couleur, créant ainsi un diagramme couleur-magnitude. Ce diagramme contient au moins dix fois plus d'étoiles qu'il n'y en avait dans les études antérieures et, pour la première fois, un tel diagramme couvre l'ensemble du bulbe galactique. Les diagrammes couleur-magnitude constituent de précieux outils que les astronomes utilisent fréquemment afin d'étudier les différentes propriétés physiques des étoiles telles que leurs températures, leurs masses et leurs âges [3].


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CE DIAGRAMME INDIQUE LA LUMINOSITÉ DE PLUS DE 84 MILLIONS D'ÉTOILES DU CENTRE DE LA VOIE LACTÉE EN FONCTION DE LEUR COULEUR, DÉDUITES DES IMAGES VISTA RÉALISÉES DANS LE CADRE DU LE SONDAGE VVV. C'EST LA PREMIÈRE FOIS QU'UN TEL DIAGRAMME COULEUR-MAGNITUDE EST RÉALISÉ POUR L'INTÉGRALITÉ DU BULBE GALACTIQUE. IL CONSTITUE LE PLUS RICHE DIAGRAMME COULEUR-MAGNITUDE JAMAIS RÉALISÉ À CE JOUR. LES ÉTOILES LES PLUS BRILLANTES FIGURENT EN HAUT DE L'IMAGE, LES MOINS LUMINEUSES AU BAS DE L'IMAGE, LES ÉTOILES ROUGEOYANTES À DROITE ET LES BLEUES À GAUCHE DE L'IMAGE. LA PLUPART DES ÉTOILES FIGURENT DANS LES RÉGIONS DE COULEUR JAUNE. ELLES SONT TRÈS PEU NOMBREUSES DANS LA ZONE DE COULEUR BLEUE. LES GÉANTES ROUGES LES PLUS ÉVOLUÉES FIGURENT EN HAUT À DROITE ET LES NAINES LES MOINS BRILLANTES AU BAS DE L'IMAGE. PHOTO ESO/VVV CONSORTIUM 
« Chaque étoile occupe une zone particulière du diagramme à un moment précis de sa vie. Sa position dépend de sa luminosité et de sa température. Puisque les nouvelles données nous donnent un aperçu complet de l'ensemble des étoiles, nous pouvons effectuer le recensement de toutes les étoiles occupant cette partie de la Voie Lactée » explique Dante Minniti.

Le nouveau diagramme couleur-magnitude du bulbe contient une mine d'informations concernant la structure et le contenu de la Voie Lactée. Parmi les résultats intéressants révélés par cette étude figure le grand nombre de naines rouges peu brillantes. Elles constituent de bonnes candidates autour desquelles rechercher de petites exoplanètes par la méthode des transits [4].


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LE CŒUR DE LA VOIE LACTÉE, VU DANS LE DOMAINE VISIBLE (IMAGE EN BAS) ET EN INFRAROUGE (IMAGE EN HAUT). CETTE VUE SPECTACULAIRE EFFECTUE LA COMPARAISON ENTRE L'ÉNORME MOSAÏQUE RÉALISÉE À PARTIR DU TÉLESCOPE VISTA DANS LE DOMAINE INFRAROUGE ET UNE MOSAÏQUE DE LA MÊME RÉGION DU CIEL RÉALISÉE DANS LE DOMAINE VISIBLE À L'AIDE D'UN PETIT TÉLESCOPE. PARCE QUE VISTA EST ÉQUIPÉ D'UNE CAMÉRA SENSIBLE À LA LUMIÈRE INFRAROUGE, IL PEUT OBSERVER AU TRAVERS DE LA QUASI-TOTALITÉ DE LA POUSSIÈRE QUI OBSCURCIT LA VUE ET FOURNIR UNE IMAGE DÉGAGÉE DE LA MULTITUDE D'ÉTOILES QUI PEUPLE LES ZONES CENTRALES DE LA VOIE LACTÉE. PHOTO ESO/VVV CONSORTIUM/NICK RISINGER / IGNACIO TOLEDO, MARTIN KORNMESSER


« Ce qui est aussi formidable avec le sondage VVV c'est qu'il s'agit de l'un des sondages publics de l'ESO réalisé avec VISTA. Cela signifie que nous rendons toutes les données accessibles au public au travers de la base d'archives de l'ESO. Nous nous attendons donc à ce que de nombreux autres résultats tout aussi excitants émergent de cette formidable ressource », conclut Roberto Saito.





L'année 2012 marque le 50e anniversaire de la création de l'Observatoire Européen Austral (ESO). L'ESO est la première organisation intergouvernementale pour l'astronomie en Europe et l'observatoire astronomique le plus productif au monde. L'ESO est soutenu par 15 pays : l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Brésil, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, la France, l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la République Tchèque, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. L'ESO conduit d'ambitieux programmes pour la conception, la construction et la gestion de puissants équipements pour l'astronomie au sol qui permettent aux astronomes de faire d'importantes découvertes scientifiques. L'ESO joue également un rôle de leader dans la promotion et l'organisation de la coopération dans le domaine de la recherche en astronomie. L'ESO gère trois sites d'observation uniques, de classe internationale, au Chili : La Silla, Paranal et Chajnantor. À Paranal, l'ESO exploite le VLT « Very Large Telescope », l'observatoire astronomique observant dans le visible le plus avancé au monde et deux télescopes dédiés aux grands sondages. VISTA fonctionne dans l'infrarouge. C'est le plus grand télescope pour les grands sondages. Et, le VLT Survey Telescope (VST) est le plus grand télescope conçu exclusivement pour sonder le ciel dans la lumière visible. L'ESO est le partenaire européen d'ALMA, un télescope astronomique révolutionnaire. ALMA est le plus grand projet astronomique en cours de réalisation. L'ESO est actuellement en train de programmer la réalisation d'un télescope européen géant (E-ELT pour European Extremely Large Telescope) de la classe des 40 mètres qui observera dans le visible et le proche infrarouge. L'E-ELT sera « l'œil le plus grand au monde tourné vers le ciel ». 

L'ANNÉE 2012 MARQUE LE 50E ANNIVERSAIRE DE LA CRÉATION DE L'OBSERVATOIRE EUROPÉEN AUSTRAL (ESO). 

Notes

[1] Le sondage VVV (Variables VISTA in the Via Lactea) est un sondage public de l'ESO dédié à la couverture du plan méridional et du bulbe de la Voie Lactée au travers de cinq filtres dans le proche infrarouge. Il débuta en 2010 et bénéficie de 1929 heures d'observation sur une période de cinq ans. Via Lactea est le nom latin de la Voie Lactée.

[2] L'image utilisée dans le cadre de ce travail couvre environ 315 degrés carrés du ciel (un peu moins de 1% du ciel tout entier) et les observations ont été effectuées à l'aide de trois filtres infrarouges différents. Le catalogue mentionne les positions des étoiles ainsi que leur luminosité au travers de chacun des filtres. Il contient environ 173 millions d'objets, dont 84 millions sont assurément des étoiles. Les autres objets sont soit trop peu lumineux, soit indistinguables de leurs proches voisins, ou bien encore affectés par d'autres artéfacts, rendant impossible toute étude précise. D'autres encore sont des objets étendus tels que des galaxies distantes.

[3] Un diagramme couleur-magnitude est un graphique qui affiche la luminosité apparente d'un échantillon d'objets en fonction de leur couleur. La couleur est déduite de la comparaison de la brillance des objets au travers de différents filtres. Un tel diagramme est similaire au diagramme de Hertzprung-Russel (HR) bien que ce dernier affiche la magnitude absolue en lieu et place de la luminosité apparente des étoiles et requiert la détermination de leur distance.

[4] La méthode des transits est couramment utilisée pour découvrir des exoplanètes. Elle consiste à rechercher la faible variation de luminosité d'une étoile qui résulte du passage d'une planète devant son étoile et l'éclipse partiellement. Le passage de planètes de petite masse devant des naines rouges de faibles dimensions, souvent de type spectral K et M, se traduit par une variation de luminosité légèrement plus élevée, ce qui facilite la recherche de planètes en orbite autour d'elles.

mardi 23 octobre 2012

INTERDICTION DE L’AVORTEMENT THÉRAPEUTIQUE : UNE « TORTURE » POUR LES CHILIENNES

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SIMONE VEIL, NÉE SIMONE JACOB LE 13 JUILLET 1927 À NICE (ALPES-MARITIMES), EST UNE FEMME POLITIQUE FRANÇAISE. RESCAPÉE DE LA SHOAH, ELLE ENTRE DANS LA MAGISTRATURE COMME HAUT FONCTIONNAIRE JUSQU'À SA NOMINATION COMME MINISTRE DE LA SANTÉ, EN MAI 1974. À CE POSTE, ELLE FAIT NOTAMMENT ADOPTER LA « LOI VEIL », PROMULGUÉE LE 17 JANVIER 1975, QUI DÉPÉNALISE1 LE RECOURS PAR UNE FEMME À L'INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE. SIMONE VEIL LORS D'UNE RÉUNION PUBLIQUE DANS LE CADRE DES ÉLECTIONS MUNICIPALES À PARIS, LE 27 FÉVRIER 2008. PHOTO MARIE-LAN NGUYEN CHEZ WIKIPEDIA

Le sujet avait été débattu et rejeté au Sénat en avril 2012 : dépénaliser l’avortement thérapeutique n’est pas un sujet de discussion acceptable par le Sénat chilien !

Le poids de l’église catholique sur l’exécutif, transparaît dans cette prise de position. En vingt années de gouvernements post-Pinochetistes, aucun n’a osé se lancer dans la bataille d’un changement véritable.

Les rares femmes ministres, qui ont montré qu’elles allaient se battre pour qu’un avortement thérapeutique soit possible au Chili (de gauche comme de droite), n’ont pas mené le projet à bout.

Dans ce pays, il manque désespérément une femme-députée aussi décidée que Simone Veil, qui en 1975, est allée jusqu’au bout, dépassant les attaques, les menaces et les tabous. 

Interview d’Andrea Schilling.

Rue89 : Qu’est-ce qui se passe au Chili lorsque la contraception ne fonctionne pas et qu’une femme ne veut pas être enceinte ?

Andrea Schilling : L’avortement est complètement interdit. Mais ce qui est bien pire encore, c’est qu’en cas de malformation qui rende impossible une survie hors de l’utérus, ou encore si la mère risque de mourir ou qu’elle a été victime d’un viol et qu’elle ne veut pas avoir cet enfant-là, la loi lui interdit d’avorter. Et cela depuis 1989. A mes yeux, il s’agit là d’une atteinte aux droits humains.

En 1989 ? Vous voulez dire que la dictature a fait voter une loi juste avant de quitter le pouvoir et que celle-ci n’a jamais été changée ?

Oui. C’est l’amiral Merino – l’un des co-auteurs du coup d’Etat du 11 septembre 1973 – et l’église du cardinal Medina, qui se sont chargés de changer le code sanitaire qui, depuis 1931 permettait d’avoir accès à l’avortement thérapeutique.

L’argument, à l’époque, était que l’évolution et les avancées de la médecine rendaient l’avortement thérapeutique obsolète. L’église catholique est ainsi entrée dans le lit de tous les chiliens…

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  • « MON PÈRE JE SUIS ENCEINTE MAIS JE VEUX AVORTER... 
  • CECI C'EST UN PÉCHÉ!  SAIS-TU QUI EST LE PÈRE ?
  • VOUS...
  • DANS CE CAS NOUS FERONS UNE EXCEPTION »

Vous vous battez pour la dépénalisation ou pour la légalisation de l’avortement ?

La dépénalisation est différente de la légalisation. Dépénaliser, signifie que si vous avortez, vous ne serez pas attaquée par un tribunal, et que vous n’irez pas en prison pour cela. Lorsque l’avortement – thérapeutique – est légal, comme en France, cela signifie que l’Etat prend en charge l’acte médical. Il s’agit d’un service assuré par l’hôpital public. Nous sommes très loin de cela… Ici, nous demandons «juste » la dépénalisation pour avancer.

Pourquoi parlez-vous de torture ?

Beaucoup de gens ici, pensent que lorsque les femmes parlent d’avortement thérapeutique, il s’agit de supprimer un bébé tout rond, tout beau, tout sain. Ils sont complètement désinformés sur ce que sont les malformations incompatibles avec la vie. C’est la raison pour laquelle j’ai fait cette exposition où je montre ce que sont les malformations. Il suffit de voir ce qu’est une anencéphalie ou encore le syndrome de Potter (absence totale de reins), la trisomie 13 et la 18… toutes incompatibles avec la vie, pour comprendre qu’on ne peut pas obliger à mener de telles grossesses jusqu’au bout.

Obliger une femme à terminer une grossesse malgré ce genre de maladie, sachant que le bébé va mourir, c’est une véritable torture. Et la torture n’est pas esthétique.

Sentir un bébé dans son ventre et savoir qu’une fois né il ne pourra pas vivre, ou à peine quelques heures, c’est terrible. Certaines femmes appartenant à des communautés de croyants disent que c’est un «cadeau de Dieu » et elles sont capables de le supporter, mais pour le reste, pour la plupart des femmes, c’est une torture !

DÉPÉNALISER NE SIGNIFIE PAS OBLIGER À AVORTER 

D’autres cas de grossesses, comme l’extra-utérine ou la molaire, posent un problème légal, dites-vous…

Oui, si on n’interrompt pas une grossesse extra-utérine ou une grossesse molaire, c’est la vie d’une femme qui est en danger. Or, la loi chilienne dit qu’on ne peut pas interrompre la gestation et qu’il faut constater l’absence de battements du cœur du fœtus pour interrompre la grossesse.

Cependant, la plupart des obstétriciens interviennent dans le cas d’une grossesse extra-utérine… en d’autres termes, ils agissent hors la loi. Mais ils respectent la bioéthique.

Nous, médecins, avons les moyens de faire un diagnostique, mais en cas de malformation, tout nous est interdit. C’est ça aussi la torture.

L’Etat chilien ne donne aucun choix à ces femmes. Il les oblige à aller jusqu’au terme de la grossesse.


« CONTRACEPTIFS POUR NE PAS AVORTER,  AVORTEMENT LÉGAL POUR NE PAS MOURIR » GRAFFITI EN URUGUAY


Depuis quand est-ce qu’il y a des personnes au Chili qui essayent de changer cette loi ?

En fait, ça fait longtemps que des groupes de personnes de la société civile, des groupes de féministes surtout se sont battus pour que ça change. Je veux dire pour que l’avortement thérapeutique soit dépénalisé – je ne parle même pas d’un avortement tout court.

Mais les médecins, eux, ne se sont pas mobilisés. Sans doute par peur, parce qu’ils pensent que si quelqu’un en parle, il va être catalogué de défenseur de « l’avortement tout court » [très mal vu, ndlr]. C’est interdit, donc on n’en parle pas.

Il y a même pire : des médecins qui dénoncent les femmes qui avortent. Un livre très intéressant écrit en anglais, décrit cet état de fait : « Women behind bars» mais il n’a pas été publié ni vendu au Chili...

Visiblement, à l’époque du gouvernement Bachelet il y a eu des réflexions sur ce sujet, et une volonté de faire comprendre aux médecins qu’ils devaient arrêter de dénoncer. VOIR LE DOCUMENT (Fichier PDF)

En avril 2009, le ministre de la Santé, Alvaro Erazo de la Torre, a envoyé à tous les chefs de service, une lettre, expliquant qu’on ne pouvait pousser une femme à avouer un avortement, un acte illégal, au moment où elle faisait appel au corps médical à cause d’une complication due à l’avortement en question. Parce qu’une femme est dans ce cas protégée par la «Convention contre la Torture » des Nations-Unies.

Ensuite, c’est une femme, une ministre de la Santé de Michèle Bachelet, María Soledad Barría, qui s’est avancée. Elle était porte-parole du réseau Miles, une association qui se démène énormément pour que l’interruption de grossesse soit légalisée au Chili. C’était un début. Mais ça n’a pas eu de suite… Dernièrement c’était Evelyn Mattei, ministre du Travail du gouvernement Piñera, qui s’est prononcée pour l’avortement thérapeutique surtout lorsque la grossesse met en danger la vie de la mère.

Une chose est sûre : tant qu’il n’y aura pas de dépénalisation, personne ne créera un centre où l’avortement thérapeutique pourra se faire dans des conditions de sécurité nécessaires.

Les femmes qui veulent avorter le font quand-même ?

Oui, de manière clandestine, et c’est l’une des principales causes de décès de femmes dans le monde. C’est très injuste, parce que les femmes qui ont de l’argent et qui veulent avorter, elles prennent l’avion, vont en Uruguay ou à Miami aux Etats-Unis, elles se font avorter dans une clinique dans des bonnes conditions, elles font leur shopping et elles reviennent.

Alors que les autres, qui n’ont pas les moyens, elles n’ont accès qu’aux moyens clandestins qui profitent d’elles, et risquent fort de mourir. Bien sûr, il y en a qui font ça pour aider ces femmes, mais bien souvent, la clandestinité attire des gens qui en profitent. Qui profitent de leur malheur.

L’avortement après un viol, est également interdit…

Il y a deux positions concernant l’avortement suite à un viol : certains soutiennent qu’il s’agit de grossesses « normales » et qu’on ne peut donc pas poser la question d’un avortement, et d’autres pensent que l’impact psychologique sur la femme doit être pris en compte et que les études démontrent que ces enfants sont davantage victimes de maltraitance par la suite ou de négligence, parce qu’ils rappellent constamment à la femme qu’elle a été violée.

Pour ces derniers, un avortement après un viol devrait être possible. Cependant, si le sujet est discuté au niveau mondial, il ne l’est pas au Chili.

Les gens qui ont vu votre exposition, vous ont dit qu’ils « admiraient votre courage »…

Les seuls moments où l’on parle de ce sujet c’est pendant les campagnes présidentielles… et ce qu’on remarque c’est que ceux qui en parlent, comme l’ex-président Frei l’a fait en 2009, au moment de la campagne, n’ont rien fait lorsqu’ils étaient au pouvoir.

Ici, la bonne société considère que si on vit dans un milieu aisé, on doit se taire. Il n’y a que les étudiants et les Mapuche (amérindiens autochtones) qui protestent, disent-ils. Du coup, si vous ouvrez la bouche, on vous dit que vous êtes aigri... Et bien, moi, je me donne la possibilité de protester pour ceux qui ne peuvent pas le fair

LES ÉTUDIANTS CHILIENS LAURÉATS DU PRIX DES DROITS DE L'HOMME LETELIER-MOFFITT


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LES MÉDAILLES DU PRIX LETELIER-MOFFIT ATTRIBUÉ AUX ÉTUDIANTS CHILIENS EN OCTOBRE 2012 - PHOTO AGENCE UNO
Titelman a signalé sa surprise face à « l'accueil qui a reçu leur mouvement de la part des étudiants aux Etats Unis », et il y voit « la reconnaissance des nécessités de transformations profondes de notre éducation, pas seulement au Chili mais dans tout le monde. Pendant trop longtemps et un peu partout, l'éducation a été perçue seulement comme un bien mercantile. A ce sujet, le cas chilien est particulièrement intéressant, car c'est le meilleur exemple d’une éducation mercantilisée à l’extrême », a exprimé le président de la Feuc.

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CAMILA VALLEJO, JEUNE LEADER DU MOUVEMENT D’ÉTUDIANTS EN DÉFENSE DE L’ÉDUCATION PUBLIQUE AU CHILI, EXHIBE LE PRIX LETELIER-MOFFIT AUX DROITS DE L'HOMME,  DÉCERNÉ AUX ÉTUDIANTS CHILIENS EN OCTOBRE 2012 À NEW YORK. PHOTO AGENCE UNO

À son tour, Camila Vallejo, a soutenu que « suite à nos rencontres avec les étudiants et les mouvements sociaux américains, ils s’organisent davantage pour ne pas permettre que leur éducation tombe dans les mêmes pièges qu'au Chili. Grâce au mouvement des étudiants chiliens, ils voient clairement les conséquences néfastes d'un modèle d’éducation mercantile, et l'impact social qu'elle génère ».

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LE 16 OCTOBRE 2012, QUAND LE MILLIARDAIRE CONSERVATEUR SEBASTIÁN PIÑERA VISITAIT LA RÉGION DE L'ARAUCANIE, LA POLICE DÉCLENCHE UN VIOLENT RAID D’HÉLICOPTÈRE CONTRE LA COMMUNAUTÉ TRADITIONNELLE DE TEMUCUICUI, QUI A FAIT DES NOMBREUX BLESSÉS PAR DES TIRS DE CHEVROTINE PARMI LES ADULTES ET DES ENFANTS DE LA COMMUNAUTÉ MAPUCHE

« Cette reconnaissance reçue aux Etats-Unis, nous la dédions aujourd’hui au peuple Mapuche, dont un groupe de dirigeants se trouve maintenant en grève de la faim suite aux arrestations illégales qu'ils ont subi, et par tant d'années de violences qu’ils supportent avec leurs familles lors des rafles des forces spéciales de la police », a déclaré la vice-présidente de la Fech.


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À WASHINGTON, LE MÉMORIAL LETELIER–MOFFIT ÉRIGÉ À SHERIDAN CIRCLE, SUR LE SITE OÙ LA VOITURE PIÉGÉE PAR LA DINA A TUÉ L’ANCIEN MINISTRE CHILIEN ET SA SECRÉTAIRE EN 1976.

L’Institut d'études politiques, une grande ONG américaine avec plus de 50 ans de recherche et d'intervention politique aux Etats Unis a institué ce prix en mémoire d’Orlando Letelier, l'ex-ministre chilien des affaires étrangères et de Ronni Moffitt, sa collaboratrice américaine, assassinés le 21 septembre 1976 à Washington dans un attentat à la bombe organisée par la Dina, la sinistre police politique de la dictature militaire de Pinochet.

lundi 22 octobre 2012

À 35 ANS DU DÉPART D’HERNÁN RAMÍREZ NECOCHEA, UN GRAND HISTORIEN DU CHILI

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COUVERTURE DU LIVRE « HISTOIRE DU MOUVEMENT OUVRIER AU CHILI », (HISTORIA DEL MOVIMIENTO OBRERO EN CHILE, 1956) D'HERNÁN RAMÍREZ NECOCHEA
Avec d'autres auteurs, le professeur Ramírez Necochea a inauguré une école historiographique tournée vers l'étude des classes populaires comme protagonistes du changement social, et vers la dimension économique et sociale des processus historiques.

Hernán Ramírez Necochea a fondé la chaire d'Histoire économique et sociale à l'Université du Chili en 1952. Une nouvelle forme de faire l’Histoire est née avec lui qui essaie de déborder l'historiographie traditionnelle. Celle ci relevait seulement les faits politiques ou idéologiques, et considérait les figures significatives des classes dominantes ou liées au pouvoir économique comme des acteurs uniques de l'Histoire.

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DANS  UNE  COUR  DE L’ANCIEN  INSTITUT PÉDAGOGIQUE
DE L'UNIVERSITÉ DU CHILI, L’HOMMAGE À HERNAN RAMI-
REZ  NECOCHEA  À  10  ANS  DE  SA  MORT  EN EXIL,   ET 
ENCORE SOUS LA DICTATURE. AVEC AUGUSTO SAMANIE-
GO,  ARMANDO URIBE,  SES  ANCIENS  COLLÈGUES,    ET 
D’AUTRES PERSONNALITÉS DU MILIEU CULTURELCHILIEN,
LE 23 OCTOBRE 1989. PHOTO FORTÍN MAPOCHO. 
SANTIAGO, 26 OCTOBRE 1989, P. 8.
Une perspective différente, riche et novatrice fait alors irruption dans les études historiques, qui considère non seulement les classes dirigeantes mais aussi les ouvriers, les paysans, les professionnels et artisans comme véritables constructeurs de l'Histoire du pays.

Le sanglant putsch militaire de 1973 et la barbarie qui s’est installé au Chili a été pour lui une tragédie politique et personnelle qu'il n'a jamais pu surmonter.

Il a dû partir à l'exil comme tant d'autres intellectuels, et il a été accueilli en France comme professeur d'Histoire latino-américaine à l'université de Paris VIII Vincennes, où il a continué ses recherches et son enseignement fécond.

EN EXIL, LE PROFESSEUR RAMIREZ NECOCHEA A ÉTÉ AUSSI UN DES FONDATEURS ET ANIMATEURS DE « ARAUCARIA DU CHILI », CÉLÈBRE REVUE CRÉÉ PAR DES UNIVERSITAIRES, ARTISTES ET INTELLECTUELS BANNIS DU CHILI PAR LA DICTATURE DE PINOCHET, DEVENUE UNE RÉFÉRENCE CULTURELLE DANS LES MILIEUX DÉMOCRATIQUES D’EUROPE ET AUX AMÉRIQUES. COUVERTURE REVUE ARAUCARIA N°9, FRAGMENT D’UN TABLEAU D’EDUARDO BONAT. EDITIONS MICHAY, MADRID, 1980
Les travaux du professeur Ramírez ont sans doute subi les rigueurs inévitables de la critique et du temps qui passe. Mais les objections possibles ne diminuent pas son indéniable apport, qui enrichit encore notre vision de l'Histoire et constitue un legs utile même pour les nouvelles générations.

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LE BUREAU DE L’HISTORIEN HERNAN RAMIREZ NECOCHEA DANS SON DEUX PIECES DE L’AVENUE LOWENDALE  A PARIS - PHOTO JORGE TRIVIÑO, IN REVUE ARAUCARIA N°9, EDITIONS MICHAY, MADRID, 1980.
Hernán Ramírez Necochea est un des meilleurs exemples de l'intellectuel surgi en vie démocratique, dans la République antérieure au coup d'État de 1973. Loin de l'image conventionnelle du chercheur de bureau, son intervention directe sur la scène sociale et politique nationale a prolongé jusqu'à sa mort en exil la tradition des grands historiens et érudits chiliens du XIXe siècle.

REVISTA ARAUCARIA DE CHILE Nº 1

REVISTA ARAUCARIA DE CHILE Nº 1

REVISTA ARAUCARIA DE CHILE Nº 9


REVISTA ARAUCARIA DE CHILE Nº 9

dimanche 21 octobre 2012

CHILI: « IL FAUT UNE CONVERGENCE DES MOUVEMENTS SOCIAUX »

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LE GÉNÉRAL CARLOS IBÁÑEZ DEL CAMPO ÉTAIT UNE PERSONNALITÉ POLITIQUE CHILIENNE. IL FUT PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE DE 1927 À 1931 PUIS DÉMOCRATIQUEMENT RÉÉLU, DE 1952 À 1958.

Bientôt, le mouvement va prendre plus de force et s’étendre vers d’autres régions et types d’enseignement, se développant plus ou moins en articulation avec d’autres mouvements populaires, en particulier avec le mouvement ouvrier. A tel point, qu’il va être le protagoniste de profonds changements sociaux et politiques. Par exemple, en 1931, nous pourrions dire que l’avant-garde du mouvement qui a renversé la dictature de Ibáñes [Carlos Ibáñes Campo devient président, de facto, en 1927, suspend les élections et gouverne par décrets] ce furent les étudiants et plus particulièrement ceux de l’Université du Chili. Si des travailleurs et des citoyens ont certes participé aux événements, leur rôle fut cependant moins important.


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PIÈCE DE MONNAIE CHILIENNE  DE (VINGT CENTIMES) DE PESO 1924. LA RÉVOLUTION DE LA « CHAUCHA  »  OU RÉVOLTE DE LA « CHAUCHA  »  FUT UNE MANIFESTATION VIOLENTE A EU LIEU LES JOURS 16 ET 17 AOÛT DE 1949, À SANTIAGO DU CHILI, SUITE À LA HAUSSE DU PRIX DU TICKET DE TRANSPORT COLLECTIF DE 20 CENTIMES DE PESO (UNE « CHAUCHA  » DANS LE LANGAGE POPULAIRE CHILIEN).
Ainsi, successivement, nous allons rencontrer le mouvement estudiantin dans tous les grands moments qui ont accompagné la démocratisation sociale et politique au cours du 20ème siècle. Par exemple, ils ont participé contre la hausse du prix des transports collectifs, la Grève de la Chaucha [du sou] en 1950. Sans parler des débuts des années 1960 et 1970 lorsque ce mouvement a développé de nombreuses luttes spécifiques, comme les mobilisations contre le service militaire anticipé qu’a essayé de mettre en place le Gouvernement de Eduardo Frei Montalva  [1964-1970], ou s’est battu, également sous le gouvernement , sur des questions politiques telles que la venue de Nelson Rockefeller, une mobilisation qui a d’ailleurs été un succès. N’oublions pas non plus le grand mouvement pour la réforme universitaire que les étudiants de l’Université catholique du Chili ont mené en 1967 et qui a été suivi ultérieurement par d’autres universités.

Nous ne pouvons laisser de côté la participation du mouvement étudiant dans les luttes contre la dictature. Au début des années 1970, ce furent d’abord des segments militants puis, à la fin de cette même décennie, les étudiants se sont joints de manière beaucoup plus large aux journées de protestation et autres mobilisations contre la dictature. Il y a eu, en tout cas jusqu’à la fin des années 1980, une articulation assez étroite entre les mouvements étudiant et populaire.

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DES MANIFESTANTS DÉPLACENT UN BLESSÉ LORS DE VIOLENTS AFFRONTEMENTS ENTRE MANIFESTANTS ET POLICE DE CARABINIERS LORS DE LA GRÈVE DE LA « CHAUCHA  » EN 1950 
Qu’a-t-il obtenu, ce mouvement? Les succès ont été inégaux. Il a obtenu la réforme universitaire, mais à d’autres occasions il a été confronté à l’échec non seulement de son mouvement, mais des mouvements sociaux et politiques qui l’ont débordé.

Au cours du 20ème siècle, est-ce surtout la participation des universités qui a dominé dans le mouvement étudiant ou bien y a-t-il également eu participation des lycéens ?

Dans les années 1970, le mouvement des lycéens était déjà très puissant. La Fédération des Etudiants du Secondaire, la Feses, a, si je me souviens bien, joué un rôle important contre la venue de Rockefeller et s’est également mobilisée contre la guerre du Vietnam. En octobre 1969, un soulèvement militaire du régiment Tacna a eu lieu et nous, les étudiants de l’Institut National, nous sommes sortis, avec une grande dose d’idéalisme il est vrai, pour essayer d’empêcher le coup avec d’autres secteurs. Le mouvement étudiant était alors un acteur très important, déjà au niveau des lycéens du secondaire.

Quelles différences y a-t-il entre le mouvement estudiantin des années 1960-1970 et celui d’aujourd’hui ?

La structuration du mouvement estudiantin était jusqu’en 1973 assez élevée. Il y avait des fédérations universitaires et secondaires dans différentes parties du pays et la présence des partis politiques était très forte. Tous les étudiants ne se reconnaissaient pas dans ses prises de position, mais l’influence qu’il exerçait organiquement était très marquée. Il n’existait pas ce phénomène actuel de discrédit des partis. Cela constituait une différence par rapport à aujourd’hui.

Une autre différence est celle de l’articulation avec d’autres mouvements qui était alors plus forte. Même si l’année passée (2011), le mouvement étudiant est parvenu à compter sur un large appui citoyen, il n’est pas moins sûr qu’il s’est agi d’une sympathie plutôt diffuse qui n’a pas d’assise organique sur une participation des travailleurs dans des mouvements d’appui convergeant avec la lutte des étudiants. Jusqu’à maintenant, les revendications des uns ou des autres ont été avancées par des canaux séparés, même si au cours de cette année 2012, en se basant sur leurs propres analyses, les étudiants ont essayé de s’approcher d’autres secteurs et mouvements sociaux. La Confech a cherché à articuler sa lutte avec celle des Mapuches, avec celle de défense de la région d’Aysen [située en Patagonie chilienne] et avec d’autres mouvements encore; les étudiants essaient aussi d’entrer en contact avec certains porte-parole des lycéens. Comme cela en est encore au tout début, il y a beaucoup de travail à accomplir pour arriver à quelque chose de semblable à ce que nous avons connu dans les années 60 et au début des années septante.

A quoi attribuez-vous le fait d’avoir «abandonné» cette idée de cheminer chacun pour soi et cette tentative de convergence avec d’autres secteurs ?

Cela est dû au déroulement des mobilisations de 2011. Cette année s’est terminée sur une grande déception dans de vastes secteurs du mouvement, sur un fort sentiment largement partagé que l’on n’était parvenu à rien.

A mon avis, c’est une perception erronée parce que je pense que l’on est tout de même parvenu à quelque chose. Non en termes de revendications concrètes, puisque les concessions du gouvernement ont été minimes, et qu’elles n’ont tendu à rien d’autre qu’à réformer ou à renforcer le modèle actuel d’éducation de marché et non à le substituer par un modèle de responsabilité de l’Etat et de protagonisme social. Malgré cela, le mouvement étudiant a obtenu de grands succès politiques, comme le fait d’avoir permis d’installer dans la société chilienne le thème de l’éducation en tant que problème prioritaire, un thème qui était absent des préoccupations des gens au début de 2011.

En second lieu, ce mouvement a approfondi le discrédit de la classe politique, processus qui était déjà en marche mais qui s’est accentué en raison de l’incapacité de celle-ci à apporter une réponse à ses revendications.

En troisième lieu, ce mouvement a contribué à délégitimer les institutions en place, héritées de la dictature et installées par elle. Voilà pour les succès politiques.

Le mouvement étudiant a apporté – et est en train d’apporter – une contribution à la repolitisation de la société chilienne, à la dénaturalisation du modèle de société néolibérale, modèle qui s’est naturalisé dans la tête de la grande majorité des gens. Le mouvement étudiant a montré que ce modèle n’était pas un fait naturel, mais que c’était le produit de la corrélation de forces historiques, et que ce modèle, qui s’était implanté par le sang et les larmes, on pouvait et on devait le changer. Tous ces apports sont des victoires.

Pour une partie significative de la jeunesse, ce ne sont pas des victoires tangibles…

Je crois que les directions de ce mouvement comprennent que c’est un acquis politique qui doit être mis en  valeur, de telle manière que même si le mouvement étudiant n’a pas obtenu la satisfaction de ses revendications, il a cependant installé cette nouvelle réalité politique qui se traduit par le fait que, dans d’autres secteurs, la protestation sociale est aujourd’hui beaucoup plus présente et acceptée par la grande masse des citadins.

Maintenant qu’il a accompli cette première étape, ce mouvement commence à être en mesure d’établir des liens et des vases communicants avec d’autres. Si cela paraissait impossible il y a un an encore, il semble aujourd’hui que les conditions soient favorables. Lors de la manifestation du 28 août 2012, il y a eu une présence modeste, mais significative de certains syndicats de travailleurs et non seulement de ceux de l’éducation. C’est un début qui peut être très fructueux.

Le mouvement étudiant doit continuer à réaliser ce travail de pédagogie politique auprès du reste de la société chilienne, particulièrement auprès des travailleurs, de telle manière que se produise une convergence de luttes entre les étudiants, les travailleurs et d’autres secteurs encore. Si les étudiants n’ont rien obtenu, c’est parce que la seule force de leur mouvement et du mouvement pour l’éducation publique ne suffit pas pour vaincre la résistance des partisans du modèle en vigueur. Il est nécessaire qu’il y ait d’abord accumulation des forces et convergence des mouvements sociaux.

J’ai toujours pensé qu’ils n’allaient pas obtenir la satisfaction de leurs revendications; mais il était nécessaire qu’ils mènent leur lutte. Et ils n’allaient pas gagner. Parce qu’il était inconcevable que le gouvernement démantèle le modèle pour lequel il y avait eu le coup d’Etat de 1973. Qui pouvait croire qu’avec 20 à 30 manifestations on allait pouvoir défaire l’«œuvre» de la dictature sur le plan de l’éducation? Si pour cela il y a eu un coup d’Etat, si on a exilé, torturé, tué et violé les droits sociaux, politiques et économiques… Cela ne se défait pas au moyen de toutes les manifestations que l’on veut, il faut accumuler beaucoup de force politique. Les processus historiques ne se déroulent pas de manière linéaire, ils font avec des avancées et des reculs, ce sont des phases et il me semble qu’aujourd’hui le mouvement étudiant et d’autres sont en mesure de passer à une nouvelle phase.

Vous voyez ce processus en 2012 avec plus d’optimisme qu’en 2011?

Je crois que le processus suit le cours qu’il peut rationnellement suivre. Je le vois avec plus d’optimisme, mais je ne vois pas le bout du tunnel pour tout de suite. Dans ce sens, il faut tenir un discours clair auprès des étudiants; il ne faut pas être démagogue, il faut leur faire comprendre que c’est une lutte longue et qu’elle va durer des années. C’est un processus d’accumulation de forces où vaincra celui qui accumulera le plus de force sociale et politique et qui aura la plus grande intelligence politique pour capitaliser ses propres forces. Parce que les forces sont un capital politique: on peut construire, mais on peut aussi détruire…

Certains analystes parlent d’un processus de changement qui s’étendrait sur 4 à 5 ans…

Il est difficile de faire de la futurologie. Nous, les historiens, sommes capables d’analyser le passé jusqu’au moment présent, mais personne n’a de boule ce cristal lui permettant de prévoir le futur. L’histoire est pleine de faits dus au hasard qui changent une conjoncture, même si cela ne signifie pas qu’il n’y ait pas certaines matrices pouvant faire l’objet d’une analyse. Mais, indubitablement, le changement n’est pas pour dans six mois ou une année ou une année. Il y a d’autres facteurs qui ont une influence, comme des conjonctures politiques électorales, des cycles économiques, des événements internationaux, entre autres. Il est impossible de déterminer tout cela de manière certaine.

Un thème, par exemple, était impensable jusqu’il y a quelques mois encore: c’est celui de l’Assemblée constituante. L’envol que cette thématique a pris ces dernières semaines est impressionnant; il n’y a pas un politicien qui ne fasse maintenant référence à elle. Peut-être sommes-nous à un moment de rupture qui peut s’étendre sur de nombreuses années. Ou alors il peut y avoir un retour en arrière et nous nous retrouvons à la case départ après un coup d’Etat, avec une répression permanente. Sans parler de la trahison de certaines représentations qui se laissent dévier par les canaux institutionnels et il y a des acteurs qui sont disposés à cela. (Traduction par A l’Encontre; entretien publié dans la Revista Chili Salud Publica, 2012, vol. 16 – 3)