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lundi 25 février 2013

ÉTATS-UNIS, DOCUMENTS DÉCLASSIFIÉS : PINOCHET VOULAIT RÉSISTER À SA DÉFAITE AUX URNES

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COUVERTURE DU LIVRE LE DOSSIER  PINOCHET : DOCUMENTS DÉCLASSIFIÉS, «THE PINOCHET FILE: A DECLASSIFIED DOSSIER ON ATROCITY AND ACCOUNTABILITY »

Selon les documents, Pinochet était furieux après avoir pris connaissance des résultats du vote.

Dans une dernière tentative de conserver le pouvoir, l'homme fort du pays, qui s'est déjà comparé aux plus grands empereurs de Rome, a demandé aux membres de la junte militaire de le rencontrer dans son bureau du palais présidentiel.

Le dictateur avait préparé un document à faire signer par les autres généraux, et «a parlé d'utiliser des pouvoirs extraordinaires pour que les forces armées s'emparent de la capitale», mentionne un rapport du département de la Défense.

Mais même les plus proches alliés de Pinochet ont dit non.

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LE FILM «NO» EST EN NOMINATION POUR L'OSCAR DU MEILLEUR FILM ÉTRANGER. PHOTO EFE
Perdant toute capacité de renverser le plébiscite, Pinochet a accepté la défaite.

Les événements ayant mené à cette décision sont présentés dans «No», qui est en nomination pour l'Oscar du meilleur film étranger. Le film chilien est basé sur la campagne de publicité qui a aidé à renverser Pinochet et à ramener le Chili sur la voie de la démocratie.

Le général a dirigé le Chili de 1973 à 1990. Il est mort en résidence surveillée, sans même être jugé, malgré des accusations de s'être illégalement enrichi et d'avoir commis des violations des droits de la personne.

dimanche 17 février 2013

BERLINALE : L'OURS D'OR À LA ROUMANIE, L'ARGENT AU CHILI

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LE PRIX DE LA MEILLEURE INTERPRÉTATION MASCULINE A ÉTÉ ATTRIBUÉ À NAZIF MUJIC, ROM DE BOSNIE POUR SON INTERPRÉTATION DANS « AN EPISODE IN THE LIFE OF AN IRON PICKER»  

Le prix de la meilleure interprétation masculine a été attribué à Nazif Mujic, Rom de Bosnie pour son interprétation dans « An episode in the life of an iron picker»  de Danis Tanovic, également récompensé par le Grand prix du jury.

Oscarisé pour « No man's land» , le réalisateur bosnien raconte cette fois la vie désespérée d'un couple de Roms, privés de toute assistance médicale dans un long métrage tourné en neuf jours avec un appareil photo numérique au budget très modeste et avec des acteurs non professionnels qui interprètent leurs propres rôles. « Je suis tombé amoureux de ces gens, ce sont vraiment des gens biens... Ils méritent mieux que leur sort actuel et j'espère que (ce film) va les aider» , a déclaré Tanovic.

L'Ours d'argent du meilleur réalisateur a été décerné au jeune David Gordon Green (37 ans) pour « Prince Avalanche» , remake du film islandais de 2011 « Either Way» . Le film dépeint Alvin (Paul Rudd) et Lance (Emile Hirsch), dont le métier monotone consiste à tracer des lignes jaunes sur des routes apparemment sans fin, dans les paysages sauvages du Texas. Avec ce trophée, le jury a récompensé la seule vraie comédie parmi les 19 films de la sélection officielle.

Des films engagés

Le réalisateur chinois Wong Kar Wai, qui présidait le jury cette année, a expliqué avoir voulu récompenser des films engagés « qui montrent que la vision du cinéma fait la différence» .


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L'ÉCRIVAIN ET CINÉASTE CLAUDE LANZMANN, LE 14 FÉVRIER 2013 À BERLIN. PHOTO JOHN MACDOUGALL
Il a annoncé deux mentions spéciales : l'une à un film sud-africain « Layla Fourie»  de la réalisatrice Pia Marais et l'autre à « Promised Land»  de l'Américain Gus Van Sant avec Matt Damon, sur la société américaine contemporaine confrontée, à travers une petite communauté rurale, à l'exploitation des gaz de schiste et aux effets du capitalisme effréné.

Une production québécoise, « Vic + Flo ont vu un ours»  de Denis Côté, un drame surréaliste avec Romane Bohringer et Pierrette Robitaille, a obtenu un Ours d'argent récompensant « un film ouvrant de nouvelles perspectives» .

Fidèle à sa tradition de festival politique, la Berlinale a aussi récompensé d'un Ours d'argent du meilleur scénario le réalisateur iranien Jafar Panahi pour «Pardé»  (Closed Curtains), un huis clos et un appel à la liberté pour deux personnages. Assigné à résidence dans son pays et interdit d'exercer son métier, le cinéaste a tourné ce film sous le manteau avec Kambozia Partovi (co-scénariste du Cercle, lion d'Or de la Mostra de Venise 2000).

Parallèlement, le festival a remis cette année un ours d'or d'honneur pour l'ensemble de sa carrière au cinéaste français Claude Lanzmann, auteur de «Shoah» . Les trois films français en compétition sont en revanche repartis bredouille.



jeudi 14 février 2013

LE CHILI A CONFIANCE DANS SES ENSEIGNANT(E)S ET SON MOUVEMENT ÉTUDIANT

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« L'IGNORANCE TE RABAISSE À LA SERVITUDE, L'ÉDUCATION T’ÉLÈVE À LA LIBERTÉ  »

Revalorisation de la profession enseignante

Jaime Gajardo, Président du CPC et membre du Bureau exécutif de l’IE, a déclaré : « Les bons résultats obtenus démontrent que la population nous soutient et a confiance en nous. A ses yeux, la profession enseignante fait partie de la solution et non du problème, comme ont tendance à le croire les autorités. »

Gajardo, qui a participé récemment à la Conférence de l’IE pour les affiliés dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à Londres, a demandé au Ministre de l’Education chilien, Harald Beyer, d’accepter l’invitation lancée par l’IE aux gouvernements et aux partenaires sociaux pour participer au Sommet international sur la profession enseignante.

Ce Sommet, qui examinera essentiellement le rôle public de l’éducation et de la profession enseignante, se tiendra à Amsterdam aux Pays-Bas, les 13 et 14 mars, et organisera pour la troisième année consécutive ladite Table ronde internationale du dialogue social pour l’éducation.

« Nous demandons au Ministre Beyer de ne pas décliner l’invitation à cette rencontre importante, offrant l’occasion d’initier un débat qui, jusqu’à ce jour n’a jamais eu lieu dans notre pays », a déclaré Gajardo.

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LE PORTRAIT DE JAIME GAJARDO, PRÉSIDENT DU COLLÈGE DES PROFESSEURS DU CHILI –LE PUISSANT SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNANTS-, EN «SUPER GAJARDO» PHOTOMONTAGE THE CLINIC

L’éducation est un droit et non un privilège

Suite au processus de privatisation mis en place sous la dictature militaire d’Augusto Pinochet dans les années 1980, plus de 50% de la population chilienne paie actuellement pour recevoir une éducation. 

Les milieux défavorisés se concentrent dans les établissements publics municipalisés, qui enregistrent un peu plus de la moitié des inscriptions. L’autre frange de la population fréquente les établissements privés, également financés par l’Etat mais qui, en plus, bénéficient de la participation financière directe des familles.

L’IE soutient le personnel enseignant et le mouvement étudiant chiliens dans leurs revendications visant à ce que l’éducation soit considérée comme une fonction essentielle de l’Etat. De même, elle s’oppose à une vision biaisée de la qualité de l’éducation, réduite en réalité aux résultats des tests standardisés et aux velléités mercantiles qui touchent le secteur.

Comme le souligne le document politique de l’IE sur l’éducation, les pouvoirs publics « assument la responsabilité clé de veiller à ce que l’éducation gratuite et universellement accessible ait les ressources appropriées et soit constamment mise à jour et développée. »

mercredi 13 février 2013

ESPAGNE: BEATRIZ TALEGÓN FAIT LE BUZZ


Dans un silence de plomb, elle a poursuivi son discours, expliquant lors des manifestations qui ont eu lieu contre l'austérité ces derniers mois: «Les gens ne sont pas descendus dans la rue par solidarité universelle, [...] les gens sont sortis dans la rue par pur égoïsme, parce qu’on touchait à leur porte monnaie, parce qu’ils perdaient ce qu’ils avaient». Pointant du doigt les "dérives" des leaders socialistes, elle les a finalement accusé d'être «les responsables de ce qui est en train de se passer […]. Nous sommes en train de payer les conséquences de votre manque d’action ou de votre action» .

Même si des voix se sont élevées, l’ensemble de la salle l'a finalement applaudi. Le président de l’Internationale socialiste, George Papandreou, s’est défendu de «lutter depuis des hôtels 5 étoiles». «Nous luttons dans la rue, dans les syndicats, dans nos pays. Nous essayerons de travailler ensemble», a-t-il répondu.

Plusieurs délégués des partis socialistes de différents pays européens étaient présents à Cascais, à 25 kilomètres de Lisbonne pour assister au congrès. Parmi eux, l’ancien premier ministre grec George Papandreou, ainsi que l’ancienne candidate à l’élection présidentielle française Ségolène Royal.

jeudi 7 février 2013

AU CHILI, DES SUISSES VICTIMES DE LA GUERRE DE LA TERRE

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LA « PACIFICATION DE L'ARAUCANIE », EUPHÉMISME DE LA CONQUÊTE MILITAIRE, A CONDUIT À LA DÉPOSSESSION DE L'ESSENTIEL DES TERRES DES MAPUCHE.  LE CHANGEMENT DE LA FRONTIÈRE DU CHILI LORS DE  L'OCCUPATION DE L'ARAUCANIE. CARTE DES VILLES D'ARAUCO ET VALDIVIA AVEC LE TRACÉ  DE L'ANCIENNE ET NOUVELLE  LIGNE DE FRONTIÈRES CONTRE LES INDIENS : 1870

La Suisse et le Chili


La « pacification » du sud du Chili entre 1861 et 1883 a conduit à l’appauvrissement d’une grande partie des Mapuche, qui vivaient de l’agriculture et de l’élevage.


Entre 1883 et 1886, les autorités chiliennes ont recruté des colons en Europe. Les premiers Suisses, dont Adam Luschinger, sont arrivés en 1883 sur le territoire de l’Araucanie.  Jusqu’en 1890, 22'700 Suisses y ont trouvé une nouvelle vie.


Les immigrants ont reçu des terres et un attelage de bœufs. On leur a également remboursé les coûts du voyage et octroyé deux ans d’avance de salaire. Si le prêt n’était pas remboursé en huit ans, la terre retournait à l’Etat.


De nombreux descendants de 3e et 4e générations ont la double nationalité suisse et chilienne.
Au vu du nombre de Suisses qui résident et voyagent dans la région, la Suisse a ouvert en 2008 un consulat à Temuco.
Par l’entremise de l’ambassade, l’agence de coopération suisse (DDC) finance diverses petites actions destinées aux Chiliens les plus pauvres, qu’ils soient ou non mapuches. On peut citer les instruments de musique destinés à un orchestre scolaire de Temuco ou des activités sportives pour les enfants de Lautaro.

Les origines du conflit

Dans la seconde moitié du 19e siècle, le gouvernement chilien a encouragé la colonisation de l’Araucanie, le cœur du territoire des Mapuches, à 700 km au sud de la capitale Santiago, par les colons européens. Alors que les nouveaux arrivants se sont vu octroyer jusqu’à 60 hectares de terre par famille, les Mapuche n’ont pu conserver que de minuscules parcelles, à peine suffisantes pour survivre.

Dans le cadre de la réforme agraire mise en place entre 1964 et 1970, les communautés mapuches ont réclamé pour la première fois la restitution des terres héritées de leurs ancêtres. Mais c’est un processus inverse qui a été engagé sous la dictature d’Augusto Pinochet, puisque la nouvelle législation adoptée alors enterrait définitivement l’idée de propriété communautaire au détriment de la seule propriété individuelle.

Depuis une dizaine d’années, les communautés mapuches revendiquent la restitution des terres au-travers d’actions radicales.
Immigration encouragée

Les opérations d’occupation des terres par les Mapuche ont été couronnées de succès, malgré les actions d’expulsion répétées de la police. Jorge Luschinger, l’oncle du défunt Werner, qui a été très critiqué pour ses remarques désobligeantes envers les aborigènes, a ainsi été contraint de vendre sa propriété à l’Etat en leur faveur.

Militza Luschinger, la nièce du couple assassiné, est membre active de l’Association des descendants suisses de l’Araucanie (ADES). Pour elle, la situation est paradoxale. Il y a plus de 100 ans, le gouvernement chilien a encouragé l’immigration en provenance d’Europe, de Suisse et d’Allemagne notamment. Le processus s’est aujourd’hui inversé et Militza Luschinger peine à cacher son amertume: «Mes ancêtres ont émigré avec les meilleures intentions du monde. Ils voulaient simplement se bâtir un nouvel avenir dans l’agriculture. Des colonies ont été créées, le banditisme a été mis au pas et la région est devenue le grenier du pays. Nous avons travaillé avec les Mapuche et pris soin les uns des autres. Désormais, nous sommes poursuivis par des bandits et les terres fertiles se transforment en marais».

Paola Aroca Cayuno, une chamane non politisée, a travaillé plusieurs années en Suisse dans le domaine hospitalier et de l’action sociale. En 2007, elle est retournée au Chili pour s’occuper d’un centre consacré à la médecine traditionnelle. Avec les dons de guérison hérités de sa grand-mère, elle dit vouloir aider les riches et les pauvres, sans distinction entre Blancs et Mapuche, et contribuer ainsi à la paix entre les peuples.

Elle aussi se sent involontairement embarquée dans ce conflit. Bien qu’elle ne vive pas dans la zone de conflits, elle craint, en cas d’attentat dans son entourage, de se voir accuser de terrorisme.

L’ambassadrice de Suisse au Chili, Yvonne Baumann, suit avec attention l’évolution de la situation dans l’Araucanie, en particulier celle des descendants suisses. Elle se dit préoccupée par l’escalade du conflit et l’attentat commis à l’encontre du couple Luschinger-MacKay. Elle espère que «les coupables seront traduits en justice» et reste convaincue que des «solutions pourront être trouvées par le dialogue».

Les Mapuches
Selon les dernières données de 2002, 4,6% de la population chilienne est aborigène. 87% appartiennent aux communautés Mapuche. 62,8% d’entre eux vivent dans des villes, 30% dans la région de l’Araucanie et 28% dans l’agglomération de Santiago, la capitale. Un tiers des Mapuche vivent sous le seuil de pauvreté.

Cohésion renforcée

Des familles d’origine suisse avaient déjà manifesté par le passé leurs préoccupations auprès de l’ambassade, mais jamais une menace imminente n’a été évoquée, affirme Yvonne Baumann. «Ce sont en premier lieu les autorités chiliennes qui sont compétentes pour leur sécurité», ajoute-t-elle.

Selon Militza Luschinger, la mort de son oncle et de sa tante a au moins eu le mérite de renforcer la cohésion entre voisins, parmi lesquels figurent des Suisses. Vivant à proximité de communautés mapuches militantes, elle s’estime également menacée. Bien qu’elle lui cause beaucoup de frustration, cette insécurité ne lui fera cependant pas abandonner de sitôt sa terre d’adoption.

Près de 60% des familles de troisième et quatrième génération sont encore en possession de la nationalité suisse, estime Militza Luschinger. La majorité d’entre elles parlent encore l’allemand et a de la parenté en Suisse. Les  descendants de colons suisses dans le sud du Chili voudraient pouvoir compter sur «le soutien déterminé des autorités suisses» et la condamnation de la violence contre les citoyens suisses. «Nous n’avons cependant pas encore demandé de l’aide à l’ambassade. Nous espérons toujours que le gouvernement trouve une solution afin que nous puissions vivre en paix».

Regula Ochsenbein, swissinfo.ch
Santiago du Chili

mercredi 6 février 2013

I. - CHILI : À LA RECHERCHE DES FACES CACHÉES DE VALPARAISO

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GRAFFITI À VALPARAISO. PHOTO  PORTEÑO_ROJO

Ascensores… en panne !

Le port a gagné en nostalgie ce qu’il a perdu en richesse. 

Les charmes du passé sautent aux yeux des visiteurs, tels ces milliers de maisons peintes en couleurs vives. 

Ce pinceau chromatique, ultra photogénique sur les villas proprettes des collines Alegre, Concepción, Artilleria et Bellavista - toutes quatre en plein renouveau touristique, avec boutiques-hôtels et restaurants-concepts -, devient vite un cache-misère sur les façades quelconques des baraques des quartiers pauvres, aux accents de vrais-faux bidonvilles. 

Il faut oser traverser en voiture ces cerros (collines) populaires (Toro, Chaparro, San Francisco, Jiménez…), prendre le temps de s’arrêter pour découvrir les maisons aux bardages de tôles rouillés, les rues sommaires, les terrains vagues enchâssés à flanc de versants, transformés en (mini) stades de foot poussiéreux… 


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GRAFFITI À VALPARAISO « LES MAINS »  MAI 2010. PHOTO BLOG MELYSO
Les fameux ascensores (funiculaires) sont aussi révélateurs d’une ville en souffrance. Jadis, la ville en comptait une trentaine. Aujourd’hui, il en reste quinze mais seuls… quatre sont en état de marche. 

Bien que classés depuis 2003 au patrimoine mondial de l’Unesco, comme l’ensemble du centre historique, les autres végètent entre promesses de réouverture, travaux interminables, pannes et problèmes incurables de gestion... 

Ces funiculaires sont pourtant pratiques pour rejoindre les collines, dans une ville où les escaliers, étroits et disjoints par les tremblements de terre, mettent les mollets à l’agonie.



Seconde capitale au monde pour le graf

Si les maisons peintes sont l’emblème de Valparaiso, d’autres compositions colorées interpellent. Ce sont celles des fresques murales, témoins d’un art graphique très en verve au Chili depuis vingt ans. 

Valparaiso est considérée par les spécialistes comme la seconde capitale au monde pour le graf, après São Paulo ! Les thèmes puisent dans le registre du surréalisme, de la bande dessinée, de l’Histoire chilienne, des traditions nationales… 

Cet art ne s’est pas émancipé par hasard. Développé après la dictature Pinochet, il est l’héritier du muralisme chilien, une expression artistique de revendications sociales et politiques née à Valparaiso à l’initiative de partis de gauche, dans les années 1960. 

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GRAFFITI À VALPARAISO. PHOTO  VALPARAISO CHILI MONSIEUR CHILI GRAFFITI ART URBAIN MAPUCHE 10, 03 2012
Les messages revendicatifs ont disparu. Reste un courant artistique fort, facette moins connue mais plus originale de l’identité de la ville. 
Enfin, on l’oublie parfois, Valparaiso vit toujours de la mer ! 

Malgré la concurrence du port de San Antonio, plus au sud, le trafic des containers bat son plein. La marine chilienne y est aussi chez elle, comme en témoigne son quartier général, vaste bâtiment néo-classique dressé plaza Sotomayor

Un tour au marché aux poissons de la caleta Portales, installé sous une grande halle à la sortie est de la ville, rappelle que le destin d’un port se joue à peu de choses. Il aura suffi d’un canal, raccourci entre l’Europe et l’Amérique du Nord, pour étouffer le dynamisme de Valparaiso. 
L’énergie brisée est devenue en soi une « histoire », à découvrir sur place si affinités. Pour le visiteur attentif, elle va au-delà – c’est l’intérêt – des traditionnels poncifs débités à longueur de guides touristiques. 

Jean-François RUST 

lundi 4 février 2013

AVEC STALINGRAD, LA SECONDE GUERRE MONDIALE BASCULE

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LA FONTAINE DE STALINGRAD. 23 AOÛT 1942 À STALINGRAD, APRÈS UNE ATTAQUE AÉRIENNE MASSIVE DE LA FLOTTE ALLEMANDE. PHOTOGRAPHIE EMMANUEL EVZERIKHINE

Les trois raisons de la victoire

À ce tournant de l’histoire, l’URSS a tout juste achevé la reconversion de son économie de guerre après avoir replié vers l’est 1 360 usines : fin 1942, la production industrielle de l’Oural a été multipliée par cinq et plus encore celle de la Sibérie. Si le nombre d’ouvriers a baissé de 10 %, la productivité du travail a crû de 40 % : la journée de travail est passée de huit à douze heures, six jours sur sept. L’URSS produit déjà deux fois plus de chars et quatre fois plus de canons que l’Allemagne. L’aide alliée est encore aléatoire : les livraisons américaines ont été interrompues de juillet à octobre. À Stalingrad, si l’Armée rouge a une nette supériorité en artillerie, elle n’aligne guère plus de chars que la Wehrmacht (790 contre 770) et moins d’avions que la Luftwaffe (1 035 contre 1 066). Mais cet armement est de bonne qualité : le char léger T 34 s’impose déjà face au « Tiger » allemand. Stalingrad n’est cependant pas une victoire du matériel comme le sera la gigantesque bataille de chars de Koursk en juillet 1943.


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UN SOLDAT SOVIÉTIQUE HISSE VICTORIEUSEMENT UN DRAPEAU  SUR LA PLACE CENTRALE DE STALINGRAD STALINGRAD EN FÉVRIER 1943.

La victoire de Stalingrad est en effet le fruit d’une mobilisation humaine exceptionnelle. Dès septembre 1941, pour compenser les immenses pertes en hommes, le Conseil d’État pour la défense, présidé par Staline, a lancé un vaste plan d’instruction militaire générale qui allait former sept millions de soldats en trois ans. Les généraux de l’état-major ont restauré leur autorité et l’unité de commandement avec la suppression des commissaires politiques aux armées rendus responsables des échecs antérieurs. Joukov persuade Staline de regrouper le maximum de forces à Stalingrad et l’Armée rouge réussit à y aligner, en novembre 1942, 854 000 recrues face aux 846 000 soldats des forces de l’Axe (deux tiers d’Allemands plus des Roumains et des Italiens).

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LE CENTRE DE STALINGRAD APRÈS LIBÉRATION, LE 2 FÉVRIER 1943

La mobilisation de nouveaux soldats compliquait pourtant le problème de la main-d’œuvre ouvrière et paysanne. Dès février 1942, 830 000 adolescents scolarisés ont été versés dans les usines pour être rapidement formés comme ouvriers qualifiés par des spécialistes démobilisés. Pour les autres travaux, il est fait appel massivement aux femmes, aux vieux et aux détenus. C’est toute la population urbaine, puis rurale, qui est mobilisée. À Stalingrad, les comités locaux du Parti ont levé une immense milice populaire pour édifier des lignes de fortification alors que les usines produisaient sans relâche armes et munitions et que des groupes de partisans coupaient les lignes de ravitaillement trop étirées des envahisseurs à l’arrière du front. Stalingrad n’est pas qu’une victoire de militaires.

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LES BRUTALES CONDITIONS DE BATAILLE ONT ÉTÉ RENFORCÉES PAR L'HIVER RUSSE .
Stalingrad s’explique encore par la démoralisation des forces de l’Axe et la sacralisation de l’amour de la patrie pour les Soviétiques. Les lettres des soldats encerclés ou les mémoires des officiers allemands révèlent combien brutale fut pour eux la découverte de l’aveuglement d’Hitler et de l’absurdité de ses ordres de mourir sur place plutôt que de capituler : « Nous sommes tout seuls, sans aucune aide. Hitler nous laisse tomber », écrit l’un deux. Les Italiens et les Roumains repliés derrière le Don sont encore plus démotivés.


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UN AVION DE CHASSE ALLEMAND ABATTU EST COUCHÉ PARMI LES RUINES DE STALINGRAD. 

Par contre, Staline ne cesse d’exalter la « guerre sacrée » et d’inviter tout le peuple soviétique au sacrifice commun. La guerre est sacrée parce qu’elle est une guerre juste de défense de la patrie et de libération de la terre des ancêtres. Le 22 décembre 1942, un nouvel hymne national remplace l’Internationale. La guerre est sacrée aussi parce qu’elle permet la réconciliation de l’Église orthodoxe et de l’État soviétique. Le 7 novembre 1942, le métropolite Serge s’adresse à Staline : « Au nom du clergé et de tous les fidèles de l’Église orthodoxe, fidèles enfants de notre patrie, je salue en votre personne le chef choisi par Dieu de toutes nos forces civiles et militaires, qui nous conduit à la victoire sur les envahisseurs barbares, à la prospérité dans la paix de notre pays, et à l’avenir radieux de ses peuples. »

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BEAUCOUP D'ALLEMANDS ONT PRÉFÉRÉ SE BATTRE JUSQU'AU BOUT PLUTÔT QUE LA REDDITION AUX FORCES SOVIÉTIQUES.
La guerre est certes encore présentée comme une guerre du droit contre le « fascisme », pour la démocratie et le socialisme, mais, par une série de glissements progressifs, la guerre est vécue comme la communion des patriotes russes, des citoyens des autres peuples soviétiques et des communistes de toutes générations, tous « frères et sœurs » aux yeux de Staline depuis son premier discours à la radio le 3 juillet 1941. Jamais le peuple soviétique n’a été aussi uni derrière son chef charismatique.


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Les conséquences de Stalingrad

Alors qu’Hitler décrète trois jours de deuil national en Allemagne, les Alliés, les résistants et les communistes du monde entier témoignent de leur reconnaissance au peuple soviétique. Bien avant la victoire, l’Humanité clandestine salue l’Armée rouge et appelle tous les résistants à l’unité et à l’action. Désormais l’espoir a changé de camp.


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La coalition des Nations unies en est renforcée. Le 21 février, le roi George VI d’Angleterre déclare que « la ferme résistance de Stalingrad a changé le cours des événements » et offre une épée d’honneur à la ville héroïque en témoignage de l’admiration « de tout le monde civilisé ». Le président Roosevelt salue ses « valeureux défenseurs » dont « la victoire glorieuse a représenté un tournant dans la guerre des nations alliées contre les forces de l’oppression ». Stalingrad soude plus que jamais les Alliés jusqu’à Yalta. 


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En position de force, Staline se permet de faire quelques concessions diplomatiques. Après l’opération « Torch » en Afrique du Nord, il ne réclame plus aussi fortement l’ouverture d’un second front en Europe, et il ne dénonce pas encore le danger d’une paix séparée à l’Ouest. L’essentiel est alors pour lui d’obtenir le plus d’aide matérielle possible car l’URSS continuera longtemps à supporter l’essentiel du poids de la guerre contre l’Allemagne nazie. Mais s’il s’est engagé à dissoudre officiellement l’Internationale communiste, c’est moins pour rassurer ses alliés sur les objectifs des Partis communistes européens que pour ne pas cautionner la stratégie politique de Tito en Yougoslavie.


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Stalingrad a eu cependant des effets ambivalents à moyen terme. Staline s’est attribué tous les mérites de Joukov et sera gratifié du titre de « plus grand stratège de tous les temps » et de « guide suprême ». Le culte de sa personnalité prend des dimensions inimaginables masquant sa responsabilité dans la désorganisation de l’armée depuis 1937 et les désastres de 1941. Khrouchtchev, dernier commissaire politique à Stalingrad, lui en fera reproche en 1956.


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Staline n’a pas compris les véritables raisons des succès de l’économie de guerre soviétique manifestes dès Stalingrad. Voznessenski, le président du Gosplan depuis 1938, avait mis en œuvre la décentralisation des décisions, les relations directes entre entreprises, la mobilisation morale des ouvriers, le développement de la production familiale dans les campagnes. Dès 1945, il s’opposa au retour aux plans quinquennaux bureaucratiques d’avant-guerre, mais il sera condamné et exécuté en 1948. Staline et les militaires imposeront à nouveau une priorité absolue à l’industrie lourde au nom de la défense du camp socialiste et de la « mémoire de Stalingrad ».


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LE COMMISSAIRE POLITIQUE NIKITA KHRUSCHEV (À GAUCHE) DISCUTE LA TACTIQUE AVEC LE GÉNÉRAL ANDREI YERYOMENKO (DEUXIÈME À GAUCHE), COMMANDANT DU FRONT SUD-EST  DE L'ARMÉE ROUGE À STALINGRAD ET D'AUTRES OFFICIERS.
ce qu’écrivait l’humanité clandestine n° 200, 21 janvier 1943 (extraits) Grande victoire soviétique sur tout le front de l’estLes troupes soviétiques ont pris Schlusselbourg, mettant ainsi fin au siège de Leningrad (1), quelques jours avant la commémoration de la mort du grand Lénine. L’Armée rouge continue à avancer dans le Caucase (et) dans la région du Don moyen… Devant Stalingrad, la VIe armée hitlérienne est en voie d’anéantissement ; sur 200 000 hommes, il n’en reste plus que 70 000, un butin énorme a été capturé, le dernier aérodrome des nazis a été occupé…
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Partout, l’Armée rouge, sous la conduite de notre grand camarade Staline, est passée à l’offensive et devant les exploits de cette héroïque armée qui, le 23 février prochain, célébrera son 25e anniversaire, des millions d’hommes de tous les pays crient avec enthousiasme et confiance : Vive la glorieuse et héroïque Armée rouge ! Vive le grand Staline !

(1) Il faudra attendre, en fait, le 27 janvier 1944.



Jean-Paul Scot, historien