Catégorie

vendredi 22 mai 2015

CHILI : LA PRÉSIDENTE FAIT LES PREMIERS PAS VERS LA GRATUITÉ SCOLAIRE

PHOTO REUTERS


Le chemin vers la gratuité scolaire est entamé au Chili avec des mesures qui offriront un accès à 260 000 étudiants.
Le système chilien d'éducation subira un changement majeur dans les années à venir. La présidente Michelle Bachelet à annoncer son plan pour atteindre la gratuité complète d'ici 2020. Le système actuel est très critiqué et favorise largement les mieux nantis financièrement. Cet héritage d'Augusto Pinochet est sur le point de disparaître. Lors d'un discours à la Nation de deux heures, la présidente a indiqué que d'ici 2016, 60% des élèves défavorisés auront accès à la gratuité scolaire.

Prononcé depuis Valparaiso, le discours est conséquent avec les promesses effectuées par la présidente lors de sa campagne électorale. Cela fait longtemps que le peuple réclame une refonte du système de l'éducation dans ce pays d'Amérique latine. La mesure permettra à 260 000 étudiants parmi les plus pauvres du Chili d'obtenir un accès à l'éducation.

« C'est un premier pas. Nous allons continuer de progresser vers la gratuité universelle. J'espère atteindre les 70% d'accès en 2018 et obtenir l'universalité des services en 2020 », a-t-elle expliqué dans son discours.

Malgré les réformes, des questions demeurent

Les étudiants et les enseignants demandent à être consultés davantage lors de cette refonte du système. Plusieurs manifestations se sont déroulées ces dernières semaines afin de faire comprendre au gouvernement l'importance de les inclure dans le processus de réforme. Les personnes qui sont les plus concernées par ces changements ne se sentent pas écoutées. Ainsi, le rôle des enseignants et des étudiants dans la réforme est toujours incertain.

En janvier dernier, le premier pas de la réforme avait été effectué par la fin de la sélection des étudiants à l'entrée des institutions d'enseignement. La fin des profits des les écoles subventionnée par l'État est également entrée en vigueur à ce moment. Ces réformes ont été noircies un peu par la crise que son gouvernement à traverser suite à des scandales de corruption impliquant le fils de la présidente socialiste.

Néanmoins, elle a démontré aujourd'hui que son projet de gratuité universelle est loin d'être du vent. Elle a été élue pour cela et elle est bien décidée à rétablir l'accès à l'éducation pour tous les Chiliens.


jeudi 21 mai 2015

CHILI: BACHELET ANNONCE LA GRATUITÉ POUR 60% DES ÉTUDIANTS PAUVRES

 PHOTO ALEX IBAÑEZ


La présidente chilienne Michelle Bachelet a annoncé jeudi la gratuité des études pour 60% des étudiants les plus pauvres à partir de 2016, dans le cadre d'une réforme de l'éducation au coeur de son programme, mais éclipsée récemment par une crise de confiance au sein du gouvernement.
Dans un discours à la nation de près de deux heures depuis le Congrès réuni au grand complet à Valparaiso (120 km à l'ouest de Santiago), la présidente socialiste a précisé que la mesure bénéficiera à quelque 260 000 étudiants les plus pauvres du pays.

«Ceci est cohérent avec ce que nous avons proposé, et nous allons continuer à progresser régulièrement vers la gratuité universelle», a déclaré la présidente, ajoutant qu'elle espérait que vers la fin de sa présidence, en 2018, 70% du groupe d'étudiants les plus vulnérables profitent de la gratuité de l'enseignement, pour atteindre 100% en 2020.

Les étudiants chiliens réclament une éducation publique de qualité et une réforme en profondeur d'un système éducatif largement privatisé et inégalitaire, hérité de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990).

 PHOTO ALEX IBAÑEZ
En janvier, la première partie de la réforme de l'éducation, mettant fin à la sélection des étudiants et aux profits dans les écoles subventionnées par l'Etat, a été approuvée.

Plusieurs milliers d'étudiants s'étaient rassemblés devant le Congrès de Valparaiso en hommage aux deux étudiants tués dans la ville lors d'une manifestation nationale la semaine dernière autour de la réforme de l'éducation.

La présidente Bachelet a procédé récemment à un remaniement ministériel pour tenter de désamorcer la profonde crise de confiance provoquée par plusieurs cas de corruption, dont l'un impliquant son propre fils.

CHILI - « EN CETTE HEURE HISTORIQUE DE L’ÉGLISE CHILIENNE »

Alors que les crises auxquelles est confrontée l’Église chilienne se sont multipliées ces derniers mois, une série de laïcs ont pris position dans cette déclaration publique, diffusée sur le site de Reflexión y Liberación, le 14 avril 2015.

Allez de par le monde, annoncez la Bonne Nouvelle… (Mc. 16, 9-15)

En tant que personnes responsables et en conscience, nous adhérons pleinement aux paroles du Pape François exprimées avec sagesse dans son premier écrit officiel, qui remarquent que l’Église ne peut pas continuer dans son état actuel : « je souhaite que toutes les communautés s’efforcent de mettre les moyens nécessaires pour avancer sur le chemin d’une conversion pastorale et missionnaire, qui ne peut pas laisser les choses dans l’état où elles sont. » (EG 25), nous voyons que cette réflexion claire entre en conflit avec divers événements qui touchent, douloureusement, notre Église catholique chilienne.

JOSÉ ALDUNATE SJ, MARIANO PUGA ET FELIPE BERRÍOS SJ. 


En octobre 2014 on a appris que trois éminents prêtres chiliens faisaient l’objet d’une procédure secrète d’investigation canonique. L’accusation anonyme concernait José Aldunate SJ, Mariano Puga et Felipe Berríos SJ. Le fait éveilla l’indignation sociale et il se développa alors une campagne inédite de solidarité et de reconnaissance publique envers ces trois témoins exemplaires de l’Évangile. Les autorités ecclésiastiques ont refusé d’assumer toute responsabilité et le nonce Ivo Scapolo et le cardinal Ricardo Ezzati en vinrent à s’accuser publiquement et réciproquement.

Le fait mettait en évidence un certain manque de liberté de pensée et d’action à l’intérieur de l’Église, portant ainsi atteinte aux droits fondamentaux. Non sans stupeur et incrédulité on constatait qu’au XXIe siècle encore « [e]xistent des violations des droits humains à l’intérieur de l’Église » (Église : charisme et pouvoir. L. Boff). Cela en dépit des déclarations du magistère : « L’Église reconnaît à tous le droit à une liberté d’expression et de pensée opportune, ce qui suppose également le droit à ce que chacun soit écouté dans un esprit de dialogue qui maintienne à l’intérieur de l’Église une légitime diversité. » (La justice dans le monde. Synode des évêques. Rome 1971).

Récemment on a appris avec perplexité que l’archevêque de Santiago, le Cardinal Ricardo Essati Andrello, avait notifié à l’excellent théologien Jorge Costadoat SJ que la mission canonique d’enseignement à la Faculté de théologie de l’Université catholique ne serait pas reconduite. À ce jour aucune raison valable, propre à justifier une sanction aussi sévère à l’encontre d’un théologien réputé et reconnu à un niveau international, n’est indiquée dans la décision. Cette mesure porte atteinte au statut de la liberté théologique et constitue une mesure d’intimidation à l’égard des penseurs et chercheurs qui se consacrent à servir l’Église aux frontières de la pensée théologique. Apparaît ici une preuve irréfutable de l’atteinte à un droit fondamental de la personne humaine, qui, de surcroît, constitue une entrave à la liberté de l’enseignement universitaire.

En plein XXIe siècle, il n’y a pas de place dans l’Église pour ce type de répression, d’autant plus que le Pape François lui-même réclame dialogue, clémence et capacité d’écoute à l’égard de tous dans la communauté chrétienne. En outre, son appel à « ouvrir des débats » et à construire une « Église pauvre pour les pauvres » nous interpelle.

À ces très graves événements viennent s’ajouter la nomination imposée Juan Barros en tant qu’évêque du Diocèse d’Osorno, caractérisée par l’absence de dialogue avec l’Église peuple de Dieu, ainsi que la compromission ou complicité d’une proportion importante du clergé national dans des délits d’abus sexuels sur des mineurs. Ces événements expliquent la dramatique détérioration de la crédibilité et de la confiance que les citoyens chiliens accordent à l’Église catholique. En effet, selon l’enquête d’opinion « Imaginacción - Universidad Central », rendue publique le 31 mars 2015, 73,3% des citoyens a « peu ou pas confiance en l’Église catholique chilienne ». Cela ne peut laisser personne indifférent.

La gravité de cette situation, qui compromet sérieusement la mission évangélisatrice de l’Église a été portée à la connaissance de la hiérarchie de l’Église chilienne et de l’Église universelle, de façon responsable, par les laïques chiliens, sans recevoir quelque réponse que ce soit. Nous n’avons pas été écouté du fait d’une absence de dialogue et d’une bureaucratie ecclésiastique excessive. Notre hiérarchie a très peu intégré l’appel du Pape François lorsqu’il remarque : « Il est vrai que, dans notre relation au monde, nous sommes invités à expliciter les raisons de notre espérance, mais pas comme des ennemis qui dénoncent et condamnent… Il est clair que Jésus Christ ne nous veut pas semblables à des princes qui toisent avec mépris, mais à des hommes et des femmes du peuple. Et ce n’est pas là l’opinion d’un Pape ni une option pastorale parmi d’autres possibles ; ce sont des indications, si claires, directes et sans ambiguïté qu’elles n’ont pas besoin d’interprétations qui leur enlèvent de leur force d’interpellation, que donne la Parole de Dieu. Vivons-les « sine glossa », sans commentaires » (EG 271).

En cette heure historique de l’Église au Chili, qui se caractérise par la présence d’une grave crise de compréhension et de crédibilité, qui affecte l’ensemble de la structure ecclésiastique de notre pays, nous voyons à l’origine de cela des signes clairs d’abus de pouvoir clérical. Nous proposons comme voie de retour à une Église authentique de communion et de participation d’entamer un débat ouvert et respectueux, qui prenne en compte les sept critères qu’en son temps avait proposé le théologien et missionnaire José Comblin :

1.- Respecter le service des laïques, fondé sur les charismes et dons spirituels reçus, en reconnaissant la fécondité et la co-responsabilité de leur service apostolique. 
2.- Dans toutes les instances, du concile œcuménique jusqu’aux conseils paroissiaux, les laïques doivent avoir une voix délibérative et un pouvoir de décision, en collaboration avec le clergé, sur ce qui touche aux questions de doctrine qui les concernent directement. 

3.- Les voix des laïques doivent être prises en compte dans les élections à tous les niveaux, de l’élection du Pape aux élections des évêques et curés. 

4.- Les laïques doivent avoir voix délibérative sur ce qui touche à la liturgie, à la catéchèse et à l’organisation de l’Église. 

5.- Reconnaître que le pouvoir ne peut pas être concentré entre les mains d’une seule personne dans aucune des instances ecclésiastiques.

6.- Agir avec transparence dans les décisions ecclésiastiques, en évitant toute culture du secret et toute utilisation d’information privilégiée, en particulier en ce qui concerne les nominations, l’administration économique et la planification pastorale. 

7.- Il est nécessaire de créer une instance juridique indépendante, auprès de laquelle les chrétiens qui se sentent victimes d’injustices et d’abus de la part d’ecclésiastiques puissent chercher recours en liberté et sécurité pour que justice leur soit faite et pour que leurs droits soient adéquatement protégés. Actuellement un laïque ne peut pas se défendre face au clergé ou aux religieux, les religieuses ne peuvent se défendre face au clergé ; les prêtres ne peuvent se défendre face à l’évêque, et les évêques ne peuvent se défendre face au Pape.

Nous appelons l’épiscopat chilien à témoigner publiquement d’une véritable conversion pastorale, dans l’esprit des paroles du Pape François : « L’évêque doit toujours fomenter la communion missionnaire dans son Église diocésaine selon l’idéal des premières communautés chrétiennes, dans lesquelles les croyants ne faisaient qu’un seul cœur et une seule âme. (cf. Hch 4,32). À cette fin , il se trouvera parfois à l’avant pour indiquer le chemin et soutenir l’espérance du peuple, d’autres fois, il sera simplement au milieu de tous dans une proximité humble et miséricordieuse, et, en certaines occasions, il devra cheminer derrière le peuple pour aider les retardataires, et, surtout, parce que le troupeau a de lui-même le flair de trouver des chemins nouveaux. Dans cette mission d’encouragement d’une communion dynamique, ouverte et missionnaire, il devra encourager et aider à mûrir les mécanismes de participation que propose le Code de droit canon et d’autres formes de dialogue pastoral, guidé par le désir d’écouter tout le monde et pas seulement une minorité qui flatte son oreille. » (EG 31)

Marta Cruz Coke
Mónica Echeverría
María Jesús Martínez
Isabel Margarita Morel
Andrés Aylwin A.
Juan Subercaseaux A.
Juan Carlos Navarrete M.
Claudia Rozas G.
Alfredo Barahona
Juan Carlos Claret P.
Roberto Celedón
Matilde Chonchol
Jaime Escobar M.
Marco Antonio Velásquez

Samedi de l’Octave de Pâques.

Traduction d’Annie Damidot pour Dial.
Source (espagnol) : Reflexión y Liberación, 14 avril 2015.

mercredi 20 mai 2015

CHILI : MYSTÈRE AUTOUR DE LA MORT DE 1300 OISEAUX

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ] 
DES EMPLOYÉS DE LA VILLE DE HUALPEN (CHILI) RAMASSENT LES CADAVRES DES VOLATILES MORTS SUR UNE PLAGE. PHOTO AFP 
MYSTERE - Plus de 1 300 cadavres d'oiseaux ont été retrouvés sur une plage chilienne. Les autorités ont ouvert une enquête pour comprendre les causes du décès de ce drame écologique.
Sur une plage chilienne, à Hualpén, un spectacle
HÉCATOMBE SUR UNE PLAGE CHILIENNE.
PHOTO PAOLO AVILA
 
désastreux : plus de 1 300 cadavres d'oiseaux. Une hécatombe mystérieuse qui fait désormais l'objet d'une enquête ouverte par les autorités. 





Filets ou grippe aviaire ?

En attendant les réponses scientifiques, plusieurs pistes sont d'ores et déjà avancées. Ces oiseaux, qui appartiennent à la famille des Procellariidés ou Pétrels, pourraient être morts noyés après avoir été pris dans des filets. Mais ils pourraient également avoir été victimes d'une forme de grippe aviaire, qui n'est pas endémique au Chili.

Les volatiles ont été retrouvés dimanche sur la plage de Lenga, à environ 550 km au sud de Santiago. Une crique qui abrite quelques centaines d'habitants vivant du tourisme et de la pêche artisanale. En 2010 des centaines d'oiseaux morts avaient été retrouvés dans cette zone. Les autorités avaient alors mis en cause les filets de pêcheurs.

mardi 19 mai 2015

ENTRE ICÔNE ET FANTÔME, SALVADOR ALLENDE, UN GRAND-PÈRE PAS ORDINAIRE

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]
Si elle a réalisé un documentaire, c'est qu'elle a ressenti le besoin d'enquêter sur son nom et d'explorer le passé d'une famille qui s'est délitée, reconstruite, décomposée, recomposée dans la douleur des années d'exil, après le coup d'Etat de Pinochet en 1973.
[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]

Elle a grandi loin du Chili. Au Mexique. Sans rien savoir de son grand-père, héros et martyr du peuple chilien, qui s'est suicidé dans son palais présidentiel pilonné par les putschistes. Pendant les années 70, celles de l'enfance de Marcia, Salvador Allende est devenu une icône pour les peuples opprimés. Quand son épouse se déplaçait en Amérique du Sud ou ailleurs, les foules s'enflammaient. « Comme pour les Beatles. Tout le monde voulait l'approcher, lui parler, la toucher, raconte sa petit-fille. Allende était vénéré, il était intouchable. Personne ne le critiquait jamais. Ça lui ôtait toute réalité. Ça m'a donné envie d'en savoir plus. D'autant que dans notre famille, personne ne parlait jamais du passé. »

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]

Sur la plage de Cannes où elle raconte son histoire, la petite fille d'Allende, qui est aujourd'hui une femme de 43 ans, s'excuse de garder ses lunettes noires. Plusieurs hyppothèses : les cernes, la fatigue du voyage, le décalage horaire, le soleil un peu pâle, le vent ou l'émotion incontrôlable. Son documentaire, Allende mi abuelo Allende, est un drôle d'objet, pas très bien ficelé, pas très bien filmé, mais qui impressionne par la douleur insoutenable qu'il fait jaillir au cours d'interviews parfois tendues. « Je me suis lancée dans ce projet parce que tout était douloureusement enfoui. Dans ma famille, personne n'évoquait cette époque. Même ma mère, la fille de Salvador, a toujours évité le sujet quand j'essayais de l'aborder. »


[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]

Quand le Chili retrouve la démocratie, en 1988, le clan Allende, que la vie a dispersé, est accueilli par un pays en liesse. Le corps de l'ancien président est déménagé de sa sépulture anonyme à Vina Del Mar pour connaître enfin la dignité de funérailles nationales. Mais loin des célébrations politiques, la famille peine à se retrouver, à faire son deuil et à sortir du traumatisme. Dans le documentaire, la parole ne se libère pas facilement et les phrases sont souvent interrompues par la pudeur, l'agacement ou les larmes.

Au risque de se mettre tous les siens à dos, la petite-fille s'est accrochée pendant huit ans, elle cherche à faire surgir des images de Salvador Allende et des siens là où la dictature de Pinochet a tout brûlé et tout effacé. Elle convoque aussi un autre fantôme, celui d'une de ses trois filles, Beatriz, qui, enceinte, resta aux côtés de son père pendant l'assaut des putschistes dans la palais de la Moneda. Et se suicida à son tour, en 1977, pendant son exil à Cuba.


[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]

Allende mi abuelo Allende enregistre les réticences des uns et des autres à rouvrir le dossier et à revenir sur des souffrances profondes. Le tournage du film a été interrompu plusieurs fois. Notamment par la mort de l'épouse de l'ancien président, Hortensia Bussi (à 94 ans) que sa petite-fille a interrogée quasiment sur son lit de mort, dans des séquences d'une tristesse à la limite du soutenable.

Sans fouiller beaucoup l'histoire du Chili, Marcia Tambutti dresse le portrait d'un animal politique. Salvador Allende, homme du peuple que l'histoire a figé dans le rôle du héros positif et qui entraînait femme et enfants dans le tourbillon des campagnes électorales et des espoirs innombrables qu'il faisait naître.


[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]

« Je voulais recréer la trajectoire et l'intimité de ce leader hors du commun. Les gens entretenaient avec lui une relation hors du commun. Il parcourait le pays en tous sens et se souvenait de tous ceux qu'il avait croisés, ça n'est pas un mythe. Aujourd'hui, encore, les gens lui écrivent des lettres le 11 septembre (date de son suicide), ils déposent des offrandes sur sa tombe, font des vœux, lui demandent conseil sur la vie, l'amour, la politique… »

Allende mi abuelo Allende sortira au Chili en septembre dans une vingtaine de villes. Marcia Tambutti ne sait pas s'il sera beaucoup vu : « Les Chiliens ne vont guère au cinéma, encore moins pour y voir des documentaires. » Elle ne sait d'ailleurs pas à quel public il s'adresse. C'est une question qu'elle ne se posait pas. Sur bien des points, Allende mi abuelo Allende est un film de famille comme un autre, une quête thérapeutique qui ne cherche pas à soulager un peuple, ou à le faire réfléchir, mais à soulager quelques invididus et à leur tisser une mémoire.

L'apprentie cinéaste a souvent douté du bien-fondé de son entreprise, et ses interlocuteurs, sa mère comprise, lui ont souvent reproché son intrusion. Mais elle est aujourd'hui au pays (ce qu'elle n'avait pas prévu à l'origine) et elle a le sentiment d'un devoir accompli. Son premier public était le clan Allende, qui s'est réuni pour une projection et dont les discussions se sont prolongées « tard dans la soirée ».    

Marcia Tambutti Allende quinzaine des réalisateurs

Quinzaine des réalisateurs 2015


vendredi 15 mai 2015

CHILI : DEUX ÉTUDIANTS, ÂGÉS DE 18 ET 24 ANS ONT ÉTÉ ASSASSINÉS À VALPARAISO

DIAPORAMA DU « VELATÓN» POUR LES ÉTUDIANTS ASSASSINÉS



« Velatón»

Selon des témoins, les tirs proviendraient d'un jeune de 22 ans vivant dans la maison où les manifestants s'apprêtaient à coller des affiches. Ce dernier a été arrêté. Des bougies ont été allumées à Valparaiso et à Santiago, en hommage aux deux étudiants tués.

Cette manifestation s'inscrivait dans un large mouvement de contestation, à travers le pays, dont la capitale Santiago, où des milliers d'étudiants et d'enseignants ont défilé. Cette manifestation a été émaillée en fin de parcours de quelques heurts entre des manifestants cagoulés, armés de bâtons et de pierres, et les forces de l'ordre qui ont utilisé des canons à eau. Plus de 130 personnes ont été arrêtées.

jeudi 14 mai 2015

CHILI: MANIF D'ÉTUDIANTS MARQUÉE PAR DES INCIDENTS

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]


LES ÉTUDIANTS,EXEQUIEL BORVARÁN ET  DIEGO GUZMÁN MORTS ASSASSINÉS
Elle toutefois été émaillée en fin de parcours de quelques heurts entre des manifestants encagoulés armés de bâtons et de pierres et les forces de l'ordre qui ont utilisé des canons à eau.

D'autres incidents se sont produits dans des manifestations parallèles organisées ailleurs dans le pays, notamment à Valparaiso et Concepcion, dans le sud.

Les étudiants chiliens, qui depuis des années réclament une éducation publique de qualité et une réforme en profondeur d'un système éducatif largement privatisé et inégalitaire, hérité de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990), cherchent à influencer les projets de loi en cours lancés par la présidente socialiste.

«On ne nous prend pas en considération pour faire la réforme, nous voulons être entendus. Nous sommes très déçus, c'est toujours la même chose, les réformes sont bloquées avant de se concrétiser en quelque chose de vraiment bien», a regretté Maria José, une étudiante de 17 ans, interrogée par l'AFP dans la manifestation.

En janvier, la première partie de la réforme de l'éducation, mettant fin à la sélection des étudiants et aux profits dans les écoles subventionnées par l'État, a été approuvée.

Mais il est encore difficile de savoir comment la présidente tiendra sa promesse d'établir la gratuité dans l'enseignement supérieur pour les 70% les plus pauvres de la population.

Les enseignants exigent pour leur part de meilleures conditions de salaires dans le projet de loi envoyé par Bachelet au Congrès, qui fixe une augmentation de 28% pour les nouveaux enseignants bénéficiant d'un régime comprenant des évaluations de performance, une condition rejetée par le syndicat des enseignants.

La manifestation intervient quelques jours après la formation d'un nouveau cabinet par la présidente Bachelet, qui cherche à désamorcer la crise de confiance provoquée par plusieurs cas de corruption, dont l'un impliquant son propre fils.

«Qu'ils s'en aillent tous!», demandait une immense banderole portée par les manifestants et reflétant l'humeur des Chiliens quatorze mois après l'investiture de la présidente.

CHILI : UNE MANIFESTATION D'ÉTUDIANTS DÉGÉNÈRE, DEUX MORTS À VALPARAISO

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]


« HÉROS ÉTUDIANT »
Cette manifestation s'inscrivait dans un large mouvement de contestation, avec des protestations organisées dans plusieurs localités du pays dont la capitale, Santiago. Au total des milliers d'étudiants et d'enseignants ont battu le pavé. Si ces rassemblements se sont essentiellement déroulés dans une atmosphère détendue, plusieurs d'entre eux ont été émaillés de heurts entre des manifestants encagoulés, armés de bâtons et de pierres, et les forces de l'ordre qui ont utilisé des canons à eau.

La gratuité dans l'enseignement supérieur

DES MILLIERS D'ÉTUDIANTS MANIFESTENT À SANTIAGO, LE 14 MAI 2015.
Les étudiants chiliens réclament une éducation publique de qualité et une réforme en profondeur d'un système éducatif largement privatisé et inégalitaire, hérité de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990). En janvier, la première partie du projet de loi, mettant fin à la sélection des étudiants et aux profits dans les écoles subventionnées par l'Etat, a été approuvée. Mais il est encore difficile de savoir comment la présidente tiendra sa promesse d'établir la gratuité dans l'enseignement supérieur pour 70 % des personnes les plus pauvres dans le pays.

Les enseignants exigent, pour leur part, de meilleurs salaires. La manifestation intervient quelques jours après la formation d'un nouveau cabinet par la présidente Bachelet, qui cherche à désamorcer la crise de confiance provoquée par plusieurs cas de corruption, dont l'un impliquant son propre fils.


mercredi 13 mai 2015

12 MAI 1825, NAISSANCE DU FANTASQUE ORÉLIE-ANTOINE 1ER, ROI DE PATAGONIE

[ Pour écouter, cliquer sur la flèche ]

 
« L'ÉPHÉMÉRIDE » PAR SANDRINE CHESNEL MARDI 12 MAI 2015, NAISSANCE DU FANTASQUE ORÉLIE-ANTOINE 1ER, ROI DE PATAGONIE CHEZ FRANCE-INFO
DURÉE : 00:01:21

Il y a 190 ans naissait en Aquitaine l'improbable futur roi de Patagonie.

il y a 190 ans naissait en Dordogne un drôle de personnage destiné à devenir Roi de Patagonie : Orélie-Antoine de Tounens. Huitième enfant d’une famille de paysans, il fait des études de droit, devient avoué, mais cette vie monotone qui s'annonce ne lui suffit pas. Il faut préciser qu’Orélie-Antoine est un peu mégalomane, il est persuadé d’être appelé à un destin royal. C’est la lecture d’un texte qui évoque les Mapuches, un peuple d'Amérique du sud, qui lui donne l’idée de s’embarquer dans une folle aventure. Car les Mapuches n’ont pas de roi - et Orélie-Antoine en est persuadé: c’est évident, leur roi, c’est lui !
Alors en 1858, il quitte la France et débarque au Chili. Là, Orélie-Antoine va bénéficier d’un concours de circonstances très favorable: car quand il arrive sur leur territoire, les Mapuches ne sont pas loin de se soumettre à l’armée chilienne. Et tout à coup, voilà qu’arrive chez eux cet homme blanc barbu, qui incarne le mythe du sauveur très courant dans toute une partie de l’Amérique du sud de cette époque.  Et c’est comme ça qu’Orélie-Antoine 1er est couronné, roi de Patagonie et d'Araucanie.
Le plus fort c’est que ce roi aventurier a eu des successeurs, jusqu’à aujourd’hui. Mais le dernier Prince de la maison royale d’Araucanie et de Patagonie est décédé l’année dernière, en Dordogne, où tout avait commencé pour son illustre ancêtre.
►►► Un livre à lire : Moi, Antoine de Touens, roi de Patagonie, par Jean Raspail, chez Albin Michel
A noter aussi dans votre éphéméride de ce mardi, la journée internationale des infirmières, Et puis en ce 12 mai n’oubliez pas de fêter les Achille, et les Pancrace! 

samedi 9 mai 2015

PLUS DE VINGT BALEINES TROUVÉES ÉCHOUÉES DANS LE SUD DU CHILI

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]
SERVICE NATIONAL DE LA PÊCHE DU CHILI. 
PHOTO VRENI HÄUSSERMANN 
Le Service national de la pêche avait auparavant fait état de la découverte d'une quinzaine de cétacés de plus de dix mètres de long, échoués dans une zone située au nord du Golfe de Penas, à près de 2000 kilomètres au sud de Santiago.

Les mammifères marins ont été trouvés par un groupe de scientifiques internationaux travaillant dans la région et qui en ont informé les autorités chiliennes.





«Elles étaient éparpillées, aucune ne portait de blessures, donc nous pensons qu'elles ont souffert d'une marée verte (un dépôt de grandes quantités d'algues pouvant être toxique, NDLR) ou d'un virus quelconque», a expliqué à l'AFP Vreni Haissermann, biologiste allemande à la tête du groupe de scientifiques ayant fait la découverte.

L'endroit où ont été trouvées les baleines est un fjord entouré de verdures, loin de toute activité humaine, hormis une base militaire.

Il n'est accessible qu'en bateau, après un voyage de quatre jours depuis Puerto Montt, à 1.300 kilomètres au sud de la capitale.

Vreni Haissermann a précisé que les cadavres des mammifères marins ont été trouvés le 21 avril 2015, mais les scientifiques ne sont revenus à Puerto Montt que mercredi, et c'est là qu'ils ont alerté les autorités.

«Je crois qu'elles ont été emportées par les courants», a-t-elle indiqué.

«Depuis 15 ans (que je travaille) dans la zone, je n'avais jamais vu quelque chose comme ça. Les gens du coin ont dit avoir vu parfois une baleine morte, mais pas autant (d'un coup), c'est un fait sans précédent», a-t-elle affirmé.

Les autorités chiliennes ont annoncé l'ouverture d'une enquête pour déterminer les causes de la mort des cétacés.

Le Service national de la pêche attend une amélioration des conditions climatiques pour tenter à nouveau de survoler la zone samedi, afin d'évaluer le nombre de baleines échouées.

Les autorités maritimes régionales et la police se rendront également sur place.

Les baleines appartiennent à l'espèce protégée «Sei», autrefois très prisée par la pêche et qui peut mesurer jusqu'à 16 mètres de long et peser 30 tonnes.

mercredi 6 mai 2015

LE CHILI CONSOLIDE UN MONOPOLE PRIVÉ DU LITHIUM

[ Pour écouter, cliquer sur la flèche ]

Le gouvernement de Sebastian Piñera a réussi à contourner le code minier, qui interdisait l'octroi de nouveau permis pour exploiter le lithium chilien.
Sous la dictature d'Augusto Pinochet, le lithium était considéré comme une ressource stratégique, c'était l'époque où l'on imaginait pouvoir développer une filière nucléaire à partir du métal gris. L'exploitation du lithium dans le désert d'Atacama avait déjà commencé, elle était aux mains de sociétés privées, dont un géant du secteur aujourd'hui, la Soquimich (SQM), filiale de l'Américain Rockwood, mais il était hors de question de l'étendre et surtout de la laisser aux mains d'autres intérêts privés, a fortiori étrangers. Le nouveau gouvernement de Sebastian Piñera a contourné le code minier en créant un contrat spécial qui propose d'exploiter jusqu'à 100 000 tonnes de lithium pendant 20 ans au plus offrant.
Parmi les acquéreurs potentiels figurait un consortium d'industriels sud-coréens qui aurait bien voulu se constituer un approvisionnement sûr en lithium pour les batteries des téléphones, des tablettes et des ordinateurs fabriquées en Corée ou dans les pays voisins. Mais c'est la Soquimich, propriété du beau-fils d'Augusto Pinochet, qui a obtenu le marché, en mettant sur la table 40 millions de dollars, soit huit fois l'apport minimal demandé par le gouvernement. C'est une façon pour cette société, déjà numéro un mondial du lithium, de continuer à contrôler le marché, tout au moins au Chili, le premier producteur mondial : il serait douteux que la Soquimich se mette à produire du lithium à foison, il faudra déjà explorer les autres salars.
Il ne s'agirait pas de faire s'effondrer les prix, autour de 6 000 dollars la tonne. Pour l'instant la demande est soutenue, mais la révolution de la voiture électrique, qui doperait brutalement la consommation de lithium pour les batteries, n'a pas encore eu lieu. Du côté de l'offre, les gisements se développent plus doucement que prévu, mais régulièrement, surtout en Argentine, étant donné que rien ne s'est encore débloqué en Bolivie pour l'exploitation de lithium, tant au niveau politique qu'au niveau des infrastructures.
C'est en Australie que la production de lithium pourrait connaître un coup d'accélérateur, avec l'acquisition toute récente d'un gisement géant de lithium sous forme rocheuse qui pourrait quasiment doubler la production mondiale (145 000 tonnes l'an dernier). Mais le monopole reste intact, l'acquéreur est Rockwood, maison-mère de la Soquimich chilienne !

dimanche 3 mai 2015

PÉROU. LE PISCO DE LA DISCORDE

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]

PHOTO GUSTAVO RODRIGUEZ
Le pisco est une eau-de-vie de raisin qui, au Pérou, a toujours eu mauvaise réputation. Jusqu’à récemment, les connaisseurs considéraient que cet alcool de basse extraction ne méritait qu’une chose : être dilué dans le jus de citron, puis additionné de blanc d’œuf et, selon les goûts, d’une pincée de cannelle. C’est la recette du pisco sour. Un cocktail à consommer, certes, avec modération mais qui ne prêtait pas à discussion.



D’autant que personne n’avait jamais contesté la “péruanité” de la fameuse liqueur. À Lima, on explique comme une évidence que pisco dérive du mot quechua pishku, “dindon”. Un mot qui d’ailleurs a eu une nombreuse descendance côté péruvien, puisqu’il a servi à forger le nom d’un fleuve, celui d’un port et même celui d’une poterie traditionnelle. Le problème, c’est que les Chiliens ont eux aussi commencé à en revendiquer la paternité. Après tout, on engloutit au Chili 18 fois plus de pisco qu’au Pérou. Et puis, les Chiliens ont aussi leur cocktail : la piscola, un mélange rafraîchissant de pisco et de cola. Enfin, à Santiago, on assure qu’à l’origine le breuvage était une eau-de-vie chilienne – puisqu’elle était fabriquée à Coquimbo. Leurs voisins du Nord ne faisaient que l’importer par mer, via le port de Pisco. D’où son nom.

[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]

« MÊME LE CAPITAINE HADDOCK A AIMÉ ! »
La réplique péruvienne ne s’est pas fait attendre. En 1988, le gouvernement d’Alán García proclame le pisco “patrimoine culturel de la nation” et interdit l’importation de “l’imitation chilienne”. Le Chili réplique en bannissant immédiatement les bouteilles péruviennes. Puis la guéguerre du pisco connaît une trêve de quatre ans. Mais elle reprend de plus belle en 2002. Cette année-là, le gouvernement Fujimori décide de déposer un brevet afin de régler définitivement la question. La fureur chilienne est d’autant plus grande que, pour illustrer les prétentions péruviennes, une revue de Lima, Caretas, fait réaliser une affiche où la forme de l’Amérique latine épouse celle d’une superbe grappe de raisin. A la place du Chili, l’illustrateur péruvien a pris soin de représenter des grains pourris. L’affiche est aussitôt brûlée en public à Santiago, où des manifestations houleuses sont organisées sur la place d’Armes. Le gouvernement va même jusqu’à demander des explications à l’ambassadeur du Pérou. Va suivre une véritable guerre des nerfs et des slogans. La radio la
plus écoutée du Pérou décrète un “jour du pisco sour”. Le Chili réplique évidemment par “un jour de la piscola”, puis crée un site Internet avec forum de discussion. Du coup, de l’autre côté de la frontière, on distribue jusqu’à plus soif des milliers de tee-shirts pour soutenir la cause. Depuis, la guerre du pisco fait rage. Et, comme toujours, les seuls à avoir gagné quelque chose à ces rodomontades sont les commerçants. La chaîne de supermarchés péruviens Wong n’a-t-elle pas avoué que ses ventes de pisco avaient tout simplement doublé depuis 2002?

CHILI. L’ORIGINE DU PISCO ENFIN CONFIRMÉE?


[ Cliquez sur l'image pour l'agrandir ]

ÉTIQUETTE PISCO 1882
Le propriétaire de l’exploitation, poursuit La Tercera, un homme politique et d’affaires, avait été maire de la ville de Coquimbo [capitale de la province d’Elqui] et viticulteur. Il cultivait la vigne et élaborait différents types de vin, notamment dans l’hacienda Latorre. Les chercheurs considèrent que ce testament situe ainsi l’exploitation Latorre comme la première pisquera d’Amérique.

Le Chili possédait déjà l’appellation d’origine du pisco en Amérique du Sud qui datait de 1931. Le conseil municipal de Coquimbo va financer une deuxième investigation pour approfondir cette découverte et mettre au jour de nouvelles preuves. “Nous voulons démontrer aux Chiliens que l’appellation d’origine du pisco a bel et bien commencé ici”, affirme au journal Pablo Lacoste.

FUREUR DANS LA NUIT AUSTRALE


La malchance m’a déjà frappé lors des éruptions du Chaitén en 2010, survenue quand j’étais au Pérou en train de couvrir un sommet international, et du Cordón Caulle l’année suivante, alors que je me trouvais encore une fois au Pérou pour les élections présidentielles. Et d’un point de vue vulcanologique, l’année 2015 a très mal commencé pour moi : en mars, j’ai raté les deux éruptions du Villarrica, situé à 700 kilomètres de Santiago où je suis basé. Je suis arrivé trop tard et je n’ai pu photographier que quelques vagues tas de cendres. Quelle frustration !
 
Le 22 avril, le gouvernement chilien décrète l’alerte rouge et ordonne l’évacuation des environs du volcan Calbuco, à un millier de kilomètres au sud de Santiago, qui est brusquement entré en éruption après cinquante-quatre ans de sommeil. Il est six heures du soir. A huit heures, le journaliste de l’AFP Miguel Sánchez et moi prenons la route. Le voyage doit durer une dizaine d’heures. Nous croisons les doigts pour arriver en vue du volcan avant que tout soit terminé.

L'éruption du Calbuco photographiée depuis Puerto Varas à l'aide d'un téléphone portable le 22 avril (AFP / Giordana Schmidt)
 
Pendant que nous roulons sur la route Panaméricaine, j’appelle des gens que je connais à Puerto Varas, une ville située au pied du Calbuco. Je demande à une amie de m’envoyer les photos du volcan qu’elle a prises dans l’après-midi avec son téléphone portable. Avec mon propre téléphone, je réexpédie ensuite ces images vers notre quartier général pour l’Amérique latine à Montevideo.
Plus tard, je parviens à trouver un photographe professionnel  qui accepte de nous vendre plusieurs images de meilleure qualité. De cette façon, nous sommes couverts : avant même que notre équipe soit sur place, l’AFP peut proposer à ses clients un large choix d’images de l’éruption. Mais bien sûr, cela ne m’ôte nullement l’envie d’arriver à temps pour cadrer le phénomène dans mon propre viseur !


(AFP / David Cortes Serey / Agencia Uno)
 
Peu avant cinq heures du matin, nous décidons de nous arrêter à Frutillar, un village au bord du lac Llanquihue. Le ciel est dégagé, et c’est le premier point de notre itinéraire d’où nous aurons la possibilité d’apercevoir le volcan, situé de l’autre côté du lac à une cinquantaine de kilomètres à l’est. La vue sera moins impressionnante que depuis Puerto Varas, un peu plus au sud. Mais nous ne voulons pas courir le risque de rater le spectacle si le brouillard apparaît, ou si le volcan décide soudain de se rendormir pendant que nous parcourons les tous derniers kilomètres de notre long voyage.

 
Nous faisons bien. Il fait nuit noire et la température frise le zéro. Il n’y a pas un chat dans les rues du village. Le couvre-feu, que les autorités ont décrété pour prévenir les pillages et les autres désordres qui peuvent toujours survenir dans les situations de panique (comme ce fut le cas lors du grand tremblement de terre de 2011), vient de se terminer. Nous sommes absolument seuls face au volcan en pleine fureur, loin de l’autre côté du lac.
On entend de violentes explosions. Le cratère crache des étincelles, et de temps en temps un éclair volcanique illumine la nuit. C’est un phénomène qui se produit quand les roches et les cendres très chaudes que crache le volcan s’entrechoquent dans l’atmosphère et produisent de l’électricité statique.


(AFP / Martin Bernetti)
 
Les photos que je prends cette nuit-là sont le résultat d’une exposition longue, d’une durée d’environ trente secondes. Comme mon appareil capte tous les phénomènes lumineux qui se produisent dans le ciel pendant ce laps de temps, les images sont beaucoup plus impressionnantes que ce que voit vraiment l’œil humain depuis les rives du lac. Après deux échecs cette année, j’obtiens enfin les images d’éruption que je désirais tant !
Une vingtaine de minutes après notre arrivée, l’éruption du volcan Calbuco s’achève. Il s’en est fallu d’un cheveu, mais comme dit le proverbe : la troisième fois est la bonne !
 
Martin Bernetti est un photographe de l’AFP basé à Santiago du Chili. Visitez son site personnel et lisez la version originale espagnole de cet article.