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mercredi 12 mars 2008

L'étoile de la présidente du Chili pâlit

Élue à la tête du Chili le 11 mars 2006, Michelle Bachelet est la première femme présidente élue en Amérique du Sud. Photo Reuters

Le problème n'est pas économique. Le Chili continue d'être dynamique, les caisses de l'État n'ont jamais été aussi pleines grâce au prix élevé du cuivre. C'est sur le plan politique que la présidente peine.

Quelques mois après son arrivée au pouvoir, la première femme présidente élue en Amérique du Sud affronte la plus importante manifestation jamais vue depuis la fin de la dictature d'Augusto Pinochet (1973-1990), avec un million de collégiens et lycéens réclamant une éducation de qualité.

Trois ministres sautent, une commission chargée de réformer l'éducation naît. La réforme est en ce moment même en discussion. Elle devrait redonner à l'État un rôle de superviseur qui lui manquait.

L'année suivante, la bête noire de Michelle Bachelet se nomme le Transantiago. Le nouveau système de transports en commun, lancé le 10 février 2007 dans la capitale, est une belle idée... sur papier.

Il s'agissait de remplacer un système anarchique de bus polluants qui congestionnaient le centre, par un système coordonné de bus-métro-bus, maintenant les nouveaux véhicules hors du centre, pour réduire bruit et pollution. Seulement, le plan de transports, hérité du président antérieur, est mal conçu, il manque de moyens.

Au retour des grandes vacances, quatre millions d'usagers doivent attendre pendant des heures des bus bondés. Les arrêts sont mal identifiés. Le métro est incapable d'absorber les usagers qui prennent ses wagons d'assaut.

La présidente lance contre toute évidence: «Tout sera réglé en 48 heures.» Elle finit par demander pardon, avoue avoir lancé le système de transports trop tôt. Elle explique: «Mon intuition me disait de le retarder.» Ce sont ses conseillers qui l'auraient induite en erreur... Ces cafouillages lui font perdre une crédibilité politique fragile et le soutien des habitants de Santiago. Elle chute dans les sondages jusqu'à passer sous la barre des 40%.

Le coût politique est si fort que ses traces sont encore visibles aujourd'hui. L'amélioration du Transantiago exige une injection de fonds importante.

La faute au machisme?

Quelques députés et sénateurs ont refusé il y a quelques mois de les accorder au gouvernement. Ils ont quitté la Concertacion, la coalition de la présidente. Michelle Bachelet perd la majorité au Sénat et au Parlement. De plus en plus de partisans de la présidente la critiquent, estimant qu'elle manque de sens politique et de poigne.

Quant à elle, elle s'estime victime du machisme et de la persécution des médias, la plupart aux mains de la droite. Il est vrai qu'on entend peu parler des jardins d'enfants que la présidente fait construire pour permettre aux jeunes mamans de travailler. Pas beaucoup plus de la réforme des retraites qui entrera en application en juillet, et crée une retraite minimum universelle.

Si le Transantiago s'est amélioré, Michelle Bachelet n'aura pas pour autant une «seconde phase» tranquille. Les deux années qu'il lui reste sont des années électorales. D'abord les municipales, puis la présidentielle. L'appel à la collaboration qu'elle a lancé à la droite ne risque pas de se concrétiser. Vendredi, cette dernière a déposé une accusation constitutionnelle contre la ministre de l'Éducation, Yasna Provoste, pour des irrégularités commises dans son ministère. Si l'accusation est votée au Congrès, la ministre est destituée. Un précédent depuis la fin de la dictature qui laisserait la présidente et son gouvernement très affaiblis. Claire Martin