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vendredi 6 septembre 2019

BRÉSIL .BOLSONARO GLORIFIE PINOCHET ET BLESSE MICHELLE BACHELET


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« BACHELET BASHING » 
Enervé par les critiques de Michelle Bachelet, Haut-Commissaire aux droits de l’homme à l’ONU, Jair Bolsonaro a ironisé sur le passé douloureux de la famille de l’ancienne présidente du Chili sous la dictature.
BOLSONARO TERMINATOR
PAR ALEX FALCÓ CHANG
Jair Bolsonaro a la répartie cinglante, il l’a encore  montré ces derniers jours en répondant plus que vertement aux critiques exprimées par Michelle Bachelet, Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU et ancienne présidente du Chili (jusqu’en 2018). Le président brésilien a évoqué la dictature chilienne (1973-1990) comme un sauvetage, relate Folha de São Paulo :
 «  [Mme Bachelet] oublie que son pays n’est pas Cuba grâce à ceux qui ont eu le courage de battre la gauche en 1973, et notamment, parmi ces communistes, son père (…). »
Michelle Bachelet avait déclaré à Genève, au siège de l’ONU en Europe, qu’“au Brésil, l’espace démocratique se réduit, la violence policière augmente, et les justifications [exprimées] de la dictature renforcent le sentiment d’impunité (…)” rapporte La Tercera citant la Haut-commissaire.

Une admiration compulsive pour la dictature


La famille Bachelet a été durement frappée par la dictature, rappelle La Tercera. Alberto Bachelet, général des Forces aériennes, avait été arrêté et torturé en 1973 par les putschistes de Pinochet. Il est décédé d’un infarctus en prison en 1974, à l’âge de cinquante ans. Son épouse et leur fille Michelle ont  aussi été emprisonnées et torturées en 1975 par la dictature, avant de prendre l’exil vers l’Allemagne. 

Dans une interview au magazine brésilien Época, l’écrivain et essayiste chilien et argentin Ariel Dorfman, qui a publié de nombreux écrits sur la dictature, souligne que ces attaques ciblées de Bolsonaro n’ont rien d’étonnant :
«  Bolsonaro, tout comme son héros Trump, pense qu’il faut revenir à la torture. Michelle est quelqu’un qui défend la démocratie, et Bolsonaro piétine honteusement la démocratie dès qu’il le peut. »
Pour l’éditorialiste d’O Globo Miriam Leitão“L’admiration compulsive et illimitée de Bolsonaro pour les dictatures et les régimes tyranniques, comme celui de Pinochet, est pathologique. […]. Son plaisir à blesser les personnes atteintes par les crimes des dictatures latino-américaines est malsain.

Polémique sur la réaction chilienne


Au Chili, la réaction plutôt mesurée du président Sebastián Piñera fait polémique. Dans une déclaration publique, il a déclaré qu’il ne partageait “pas du tout l’allusion faite par le président Bolsonaro au sujet de l’ancienne présidente du Chili et surtout sur un sujet aussi douloureux que la mort de son père“,  rapporte El Dinámo.

La presse chilienne souligne l’enjeu diplomatique de cette réponse : le ministre chilien des Affaires étrangères était précisément en déplacement au Brésil quand la polémique a éclaté. “Bolsonaro bouscule l’agenda de Santiago”, titre La Tercera.
« L’attaque contre Michelle Bachelet complique la tâche du gouvernement au moment du voyage du ministre au Brésil. »

Une balle dans le pied ?

De fait, l’opposition n’a pas regardé les anges passer, qualifiant la déclaration du président chilien de “tiède” et exigeant une lettre officielle de protestation du gouvernement chilien. Fille de l’ancien président Salvador Allende, la sénatrice Isabel Allende, citée par El País, a estimé que
« le Brésil ne mérite pas ce président », ajoutant que « sa perverse allusion au général Bachelet le révèle complètement. »

Malgré sa superbe, estime la page brésilienne d’El País, les propos de Jair Bolsonaro pourraient aussi coûter cher au Brésil sur le plan diplomatique, alors que le pays brigue une place au Conseil des droits de l’homme des Nations unies : “La plus grande opposition à sa campagne [à ce poste] s’appelle aujourd’hui Bolsonaro“, tant le président montre “qu’il n’est pas disposé à reconnaître que des crimes contre l’humanité ont existé dans certaines régions du monde“ et qu’il passe le message selon lequel “la violence d’État est permise“. 

Sabine Grandadam et Morgann Jezequel