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vendredi 5 juin 2009

«Le Chili m'a donné le plus beau et le plus horrible de ma vie» veuve de Víctor Jara

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Joan Turner et Michelle Bachelet au centre, entourées des filles des Joan, Amanda et Manuela. Photo Alex Ibañez.

Joan Turner, née en 1922 en Grande-Bretagne, a acquis la citoyenneté chilienne 35 ans après la mort de Víctor Jara, torturé et assassiné par 44 coups de feu le 15 septembre 1973, quatre jours après le coup d'État d'Augusto Pinochet.

De plus, la reconnaissance institutionnelle de la trajectoire de cette femme, qui pendant 55 ans a fait du Chili son foyer, coïncide avec les progrès dans les investigations sur ceux qui se trouvèrent derrière les fusils qui turent la voix de Victor Jara.

L'ex-recrue José Adolfo Paredes Márquez, de 54 ans, reste emprisonné depuis le 22 mai dernier, accusé d'être l'auteur matériel du meurtre de l'auteur interprète dans le « Stade Chile », utilisé comme centre de torture, et maintenant rebaptisé Stade « Víctor Jara ».

Depuis cet évènement qui a mutilé sa vie, Joan Turner s'est occupée non seulement de promouvoir la danse, mais aussi de préserver et de répandre le legs de Víctor Jara à travers la fondation qui porte le nom de l'artiste qu’elle a créé en 1993.

Dans une interview accordée à Efe l'année dernière, Joan Turner a reconnu s’être trouvée «négligente» d'avoir pris cette direction, parallèlement à la lutte des familles des 1.185 détenus disparus durant la dictature (1973-1990), selon les chiffres officiels.

Devant eux, représentants des familles de détenus disparus et de personnalités politiques exécutées présents dans cet acte, Joan Turner a fait l'éloge de leur combat et elle a rappelé qu’ « il n'y a pas pire torture pour une famille que de ne pas savoir l'endroit où se trouve un être aimé».

«Enveloppe-toi dans ma tendresse, laisser la vie voler, ainsi me chantait Víctor quand nos vies se sont croisées. C'était le commencement de l'époque la plus heureuse de ma vie », a raconté Turner, qui a reçu une ovation des assistants après s'être adressé à eux comme «compatriotes».

Joan Turner a remercié cet « honneur » à la Présidente Bachelet, elle aussi victime durant la dictature, qui a défini cette concession de la citoyenneté chilienne comme un « acte de justice », que constitue « l'un des gestes qui font tellement de bien à l'âme du Chili ».

«Les lectures complaisantes de notre histoire nous font du mal en tant que pays, car elles suggèrent, directement ou pas, que les victimes n'étaient pas complètement innocentes et que, par conséquent, les victimaires n'étaient pas complètement coupables» a conclu la Chef d’Etat.