Ce que redoutaient les défenseurs de la neutralité du Net est arrivé : jeudi 14 décembre, la Commission fédérale des communications (FCC) a mis fin aux Etats-Unis à ce grand principe.
Fondateur d’Internet, celui-ci veut que tous les contenus mis en ligne sur le réseau soient traités de la même manière, sans discrimination. Il interdit par exemple à un fournisseur d’accès à Internet (FAI) de transporter les flux vidéo provenant d’un service donné plus rapidement que ceux d’un autre. Il lui interdit aussi de bloquer l’accès à certains sites ou à un certain type de contenus. Concrètement, sous l’empire de la neutralité du Net, un FAI américain n’avait pas le droit de faire payer davantage ses consommateurs pour un accès plus rapide à YouTube ou à Netflix, par exemple.
Accès à Internet différenciés
Les défenseurs de la neutralité du Net craignent que cela ne signifie pour les internautes des accès à Internet différenciés, aussi bien s’agissant de coût et de vitesse que de contenu — avec un risque pour la liberté d’expression. Ils arguent aussi que la neutralité du Net permet à de petits acteurs de grandir, en bénéficiant d’un accès égal à celui des géants sans devoir payer de frais exorbitants pour accéder à des « tuyaux » performants. Certains prétendent même que Google ou Netflix n’auraient pas pu émerger sans ce principe.
Les adversaires de la neutralité du Net, généralement représentés par les opérateurs des télécoms, martèlent de leur côté que l’infrastructure des réseaux a un coût, d’autant plus que celle-ci nécessite d’être modernisée en permanence, à mesure que les usages d’Internet évoluent et que la demande augmente, notamment avec la vidéo. Selon eux, expérimenter de nouvelles offres et faire payer davantage les utilisateurs pour des services de plus grande qualité leur permettra d’assumer ces investissements et d’innover davantage.
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KRISTINA D.C. HOEPPNER / FLICKR (CC) |
LE BRITANNIQUE TIM BERNERS-LEE, LE CRÉATEUR DU WORLD WIDE WEB, EST UN FERVENT DÉFENSEUR DE LA NEUTRALITÉ : « LORSQUE J’AI INVENTÉ LE WEB, JE N’AI PAS EU BESOIN DE DEMANDER LA PERMISSION À QUICONQUE, ET LES ENTREPRENEURS AMÉRICAINS QUI ONT RÉUSSI DANS LE DOMAINE DE L’INTERNET N’EN AVAIENT PAS NON PLUS BESOIN LORSQU’ILS ONT LANCÉ LEUR ENTREPRISE. POUR ATTEINDRE SON PLEIN POTENTIEL, INTERNET DOIT RESTER UN ESPACE LIBRE POUR LA CRÉATIVITÉ, L’INNOVATION ET LA LIBRE EXPRESSION. »
Un opposant notoire à la neutralité du Net
En 2015, sous l’administration Obama, les défenseurs de la neutralité du Net avaient pourtant fêté une victoire historique. A l’issue d’un grand débat sur la question aux États-Unis, la FCC avait décidé que l’Internet américain était un « bien public », au même titre que le réseau téléphonique, et que les fournisseurs d’accès à Internet devaient être soumis aux mêmes règles, incluant la neutralité du réseau.
Mais à son arrivée à la Maison Blanche, Donald Trump a nommé à la tête de la FCC un opposant notoire à la neutralité du Net, Ajit Pai, ancien conseiller de l’opérateur Verizon. Il a rapidement commencé le chantier qui a mené, jeudi 14 décembre, à la fin de ce principe aux États-Unis.
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