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vendredi 31 octobre 2014

MORT DE ARTURO JIRÓN VARGAS, MÉDECIN PERSONNEL DE SALVADOR ALLENDE


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LE DOCTEUR ARTURO JIRÓN VARGAS


Il a survécu à l'attaque aérienne des félons de l'Armée qui entouraient l'enceinte, mais il fut arrêté par les militaires et transporté comme prisonnier à l'École Militaire avec quelques dirigeants et cadres du gouvernement de l'Unité Populaire. 

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LE DOCTEUR ARTURO JIRÓN VARGAS
Par la suite, le médecin a été envoyé à l'Île Dawson, en Patagonie chilienne, habilitée comme camp de concentration de prisonniers politiques, où il resta jusqu'en mai 1974,  lorsqu’il subit une perforation d'ulcère duodénal, ce qui donna lieu à un transfert à Santiago, à l'Académie de Guerre de la Force aérienne chilienne (FACH), branche aérienne des forces armées chiliennes.


Plus tard il subit une assignation à résidence puis
il fut expulsé du pays et exilé au Venezuela.

De retour au Chili, en décembre 2008, il fut récompensé à Santiago par la « Décoration d'honneur de l’Ordre Médical Chilienne » par le Collège de médecins du Chili.

Conformément aux informations livrées par ses proches, une veillée funèbre privée aura lieu.  

mercredi 29 octobre 2014

CHILI: LE LIVRE POUR ENFANTS « NICOLAS A DEUX PAPAS » FAIT POLÉMIQUE

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CAPTURE D'ÉCRAN 
L’association est à l’origine de cette publication, et a aussi reçu le soutien de l’Union européenne et de l’ambassade des Pays-Bas, ainsi que celui de l’Office national de l’école maternelle, qui dépend du ministère de l’Éducation. Elle a déjà reçu de nombreuses sollicitations de la part d’institutions pour recevoir le livre. «La demande dépasse nos espérances, assure l’association, qui a fait imprimer trois mille exemplaires. Nous sommes très content.e.s». Movilh souhaite diffuser en priorité le livre dans les jardins d’enfants, dans les établissements d’enseignement pré-élémentaire, dans les bibliothèques, et auprès des enseignants de maternelle qui veulent l’utiliser comme outil de travail en classe.

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CAPTURE D'ÉCRAN 


DES OPPOSITIONS À LA DIFFUSION

Mais plusieurs parlementaires s’opposent à ce que le livre pour enfants soit accessible: «Nous ne sommes pas contre le contenu de l’histoire, a affirmé Andrea Molina, députée de l’Union démocrate indépendante, un parti conservateur. Nous sommes contre le fait que l’État impose de telles histoires quand les parents ont le droit de choisir. Nous croyons en une éducation gratuite, en la diversité des projets éducatifs, et ne pensons donc pas qu’il soit approprié d’imposer cette sorte de contenu, et que les parents ne puissent choisir l’éducation qu’ils veulent pour leurs enfants.» En outre, Nicolas a deux papas fait face à une très vive opposition de la part de groupes traditionalistes qui souhaitent protéger leur vision de la famille: «Il est clair que la publication de ce manuel est une incitation pour les enfants de quatre ans à n’avoir aucune objection face à un comportement homosexuel, a commenté Juan Antonio Montes de l’Action Familiale. Ceci est, selon nous, une déformation morale des enfants dès leur plus jeune âge. Et cette distorsion est garantie par l’État.»

UNE PARODIE HÉTÉRO

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CAPTURE D'ÉCRAN 
En réaction à la polémique, Felipe Velásquez Muñoz, un illustrateur amateur de Santiago, a eu l’idée de faire une parodie de Nicolas a deux papas, qu’il a tout simplement intitulé Nicolas a un papa et une maman. Dans cette histoire, le petit garçon doit faire face aux disputes constantes entre ses parents, aux mensonges, aux abus et au manque d’affection et d’attention: «Je voulais dessiner une réalité qui existe aussi et dont on ne parle pas», a expliqué le dessinateur, qui défend par ailleurs le livre publié par le Movilh: «Je pense que c’est une histoire qui vise à nous rendre plus tolérant. Je ne vois nulle part quelque chose qui dit que les homosexuel.le.s ne peuvent pas adopter un enfant.»

Illustration Movilh

LA PETITE PALESTINE DU CHILI

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PLAN LIEU CLUB PALESTINO À SANTIAGO DU CHILI

« Je suis la troisième génération de Chiliens », expose le patron, Juan Bishara. Son grand-père est arrivé en bateau à Santiago dans les années 1950. Il parle arabe avec ses clients, sauf avec les plus jeunes qui sont hispanophones, même s’ils comprennent parfois la langue de leurs ancêtres. La communauté a deux écoles et un collège. « Notre quartier est connu comme le quartier arabe même si, depuis ces dernières années, de nombreuses boutiques sont désormais tenues par de nouveaux immigrants, coréens et péruviens », observe Juan Bishara.

Le Chili accueille la plus grande colonie palestinienne, en dehors du monde arabe. En l’absence de statistiques officielles, la communauté est évaluée dans une fourchette large, entre 150 000 et 400 000 personnes, nées en Palestine, ou enfants de Palestiniens et petits-enfants nés au Chili. La plupart d’entre eux, 95 %, sont chrétiens, comme leurs aïeux, ce qui a facilité leur intégration. Plus de 80 % sont arrivés entre 1900 et 1930, provenant principalement de quatre villages : Belén, Beit Jala, Beit Sahour et Beit Safafa. Les parents de l’historien Juan Sakalha sont arrivés, eux, du village chrétien de Tayebh, à 12 km de Ramallah en 1915, après un interminable voyage. Il les a menés à Valparaiso (à 120 km de Santiago), en passant par Beyrouth, Marseille, Panama, Sao Paulo, Buenos Aires, sans oublier la traversée de la cordillère des Andes à dos d’âne.
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LEUR PLUS GRANDE FIERTÉ, LE PALESTINO

La plupart étaient des paysans ou des artisans, sachant lire, écrire et compter, installés dans la capitale mais aussi dans des villes de l’intérieur. « Il n’y a pas un seul village chilien qui n’ait son curé, son carabinier et son Palestinien », assure un dicton. A Santiago, ils ont choisi le quartier de Patronato, pour sa proximité avec le marché central et ses loyers économiques. Au coin des rues Filomena et Patronato, le bazar de Jorge Shahuran était, en 1910, le centre de rencontre des premiers émigrants, qui partageaient les souvenirs et les nouvelles du pays et aidaient les nouveaux à s’installer. Dès 1912, la communauté publiait son propre journal, Al Murshid.

Leur plus grande fierté est le Palestino, le club de football professionnel, fondé en 1920, l’unique club au monde qui joue en première division sous les couleurs de la Palestine. Il a défrayé la chronique, sportive et politique, lorsque en janvier les joueurs sont apparus sur les stades avec un maillot où le numéro 1 avait été remplacé par le profil allongé de la carte de la Palestine. Cela leur a porté chance, ils ont gagné trois matchs. La communauté juive, qui regroupe quelque 70 000 personnes, a réagi, protestant contre « une politisation du foot » et accusant la communauté palestinienne « d’importer au Chili un conflit religieux, plus que territorial ».

Maurice Khamis Massu, le président du Palestino, qui possède son propre stade, dans le quartier pauvre de La Cisterna, a été convoqué par l’Association chilienne de football professionnelle (ANFP) qui a interdit le port du polémique maillot et condamné le club à 15 000 dollars d’amende. A la suite de ces sanctions, les joueurs sont sortis sur les stades avec la carte de la Palestine… tatouée sur leur avant-bras. La controverse a envahi les réseaux sociaux, et depuis, les maillots, surtout le numéro 11, se vendent comme des petits pains. « Chaque victoire du Palestino est une joie pour le peuple palestinien qui souffre. Les lamentables événements de Gaza ont renforcé nos liens avec la Palestine et avec nos origines », souligne le président du Palestino.

Il avait 3 ans quand sa famille a émigré au Chili, après la création de l’État d’Israël. Il est membre de la Fondation Belen 2000 qui donne des bourses d’études aux enfants palestiniens ou envoie des médecins en Palestine. Une des grandes satisfactions de Maurice Khamis Massu est la décision de l’Union des fédérations européennes de football de rejeter la candidature d’Israël pour accueillir l’Euro 2020.

La Fédération palestinienne qui, depuis 1985, regroupe plusieurs organisations dont le Palestino, «a vu croître son importance, ces dernières années, au rythme de l’aggravation du conflit de Gaza », renchérit son président, Mauricio Abu-Gosh. « Nos objectifs sont de sensibiliser les Chiliens à la cause palestinienne, dit-il, de faire du Chili un pays ami de la cause palestinienne. Et de faire en sorte que la communauté palestinienne au Chili soit unie. »

« LOBBY TRANSVERSAL »


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DES DÉPUTÉS CHILIENS SOUTIENNENT
 LES PALESTINIENS
Cette communauté est influente. Les parlementaires d’origine palestinienne, appartenant à différents partis politiques, du Parti communiste à la droite la plus conservatrice, représentent 10 % du Sénat et 11 % de la Chambre des députés. Ils détiennent 9 mairies et comptent 26 conseilleurs municipaux. La famille de Mahmud Aleuy, vice-ministre de l’intérieur, est venue de Palestine.

Mauricio Abu-Gosh admet l’existence d’un « lobby transversal » fort de quelques « grands succès ». En 2008, le Chili a accueilli 130 refugiés palestiniens fuyant le conflit en Irak. Ils ont été reçus au palais présidentiel de la Moneda par la présidente socialiste Michelle Bachelet le jour d’Al Nakba (catastrophe, en arabe), qui marque l’anniversaire de la violente expulsion de la population palestinienne des territoires où Israël a implanté son État, en mai 1948. Michelle Bachelet, en revanche, n’a pas assisté à la réception de l’ambassade israélienne pour la célébration de la création d’Israël. En 2011, l’ancien président de droite, Sébastian Piñeira, s’est rendu en Palestine et a reconnu le droit à l’existence d’un État palestinien.

À nouveau au pouvoir depuis le 11 mars, la présidente Bachelet a rappelé l’ambassadeur chilien à Tel Aviv, lors de la recrudescence des opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza, en août. Plusieurs marches réunissant des milliers de personnes ont eu lieu à Santiago au même moment, en solidarité avec la Palestine. L’ambassadeur chilien n’a rejoint son poste qu’après l’annonce du cessez-le-feu. Plusieurs pays de la région ont fait de même, à l’exception de l’Argentine qui compte, avec ses 250 000 personnes, la plus grande communauté juive du monde après Israël et les États-Unis.

Gerardo Gorodischer, le président de la communauté juive au Chili, regrette « un amalgame entre juifs et Israël » et dénonce la montée « d’un antisémitisme jamais vu au Chili ». « Nous vivons un pogrom, n’hésite-t-il pas à dire, sans que le gouvernement chilien réagisse. Les plus riches pensent quitter le Chili pour s’exiler aux États-Unis. » Il affirme que pendant certaines marches pro-Palestine, des drapeaux israéliens ont été brûlés. Pour les responsables palestiniens, il s’agit « de groupes radicalisés qui ne sont pas représentants de notre communauté ».

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DANIEL JADUE, 47 ANS, LE MAIRE DE LA COMMUNE DE RECOLETA.
PHOTO AGENCIA UNO
« Je suis chilien, palestinien et communiste », énonce fièrement Daniel Jadue, 47 ans, le maire de Recoleta, l’une des communes de Santiago où se trouve le quartier de Patronato. Il a été élu en octobre 2012, après avoir essuyé trois défaites électorales en douze ans. Il est fier que Salvador Allende, l’ancien président socialiste renversé par la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990), soit enterré dans sa commune. « Historiquement, les différentes communautés religieuses vivaient en paix jusqu’à la création artificielle de l’État d’Israël par les Européens», soutient-il. Pour lui, « le conflit n’est pas religieux. Les relations sont mauvaises, non pas avec les juifs mais avec les sionistes qui sont les représentants du gouvernement israélien au Chili ».

Au Chili, l’intégration a été difficile. La société, très conservatrice, considérait les Palestiniens comme des immigrants de seconde zone, en comparaison des colonies de Britanniques, d’Allemands ou de Français qui avaient conquis l’aristocratie. Malgré les différences culturelles, les Palestiniens ont réussi à s’assimiler rapidement à la classe moyenne. Certaines familles sont à la tête des plus grandes fortunes du Chili. Pendant les années 1930, elles ont construit de grandes industries textiles, leur propre banque (BCI) et une compagnie d’assurances. Les premières années, face à un climat hostile, les Palestiniens ont opté pour des mariages endogames. Avec une progressive intégration sociale, dès 1970, on estime que 70 % des mariages accueillent des personnes extérieures à la communauté palestinienne.

L’autre endroit de ralliement est le Club palestinien, dans le quartier résidentiel de Las Condes. Fondé en 2007, c’est un véritable mirage de 11 hectares, plantés de palmiers, au pied de la cordillère des Andes enneigée. Piscine olympique, terrains de tennis et de football mais pas d’architecture arabe. Le club house est tout en baies vitrées et en bois. « Tous les présidents chiliens ont fréquenté le Club palestinien, du général Augusto Pinochet jusqu’à la présidente socialiste Michelle Bachelet », rappelle Anuar Majluf, chargé de la communication. La trentaine placide, cet ancien dirigeant de l’Union générale des étudiants palestiniens confie se sentir avant tout chilien. Mais il admet que « le conflit de Gaza a fait renaître la revendication de l’identité palestinienne au Chili ». Il nuance pourtant le propos : « Ce n’est pas qu’on importe le conflit, c’est que le conflit nous importe.» À Santiago, les Palestiniens se défendent de vouloir transposer au Chili le conflit avec Israël.

mardi 28 octobre 2014

BUSINESS DE L’EAU : COMMENT SUEZ A TISSÉ SA TOILE AU CHILI

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Avec 50,1%, Agbar est l’actionnaire majoritaire d’Aguas Andinas, la société qui gère l’approvisionnement et le traitement de l’eau pour environ 6 millions de personnes dans la région de Santiago, capitale du Chili (...). En 2013, Aguas Andinas a engrangé un bénéfice net de plus de 155,7 millions d’euros, ce qui représente 44% des bénéfices cumulés engrangés par toutes les entreprises du secteur au Chili. Aguas Andinas est également propriétaire au Chili des entreprises Aguas Cordillera, Aguas Manquehue et d’Iberaguas, qui contrôle 51% d’Empresa de Servicios Sanitarios de Los Lagos (ESSAL, Région X du Chili). Ces entreprises ont apporté 43,97 millions d’euros de profits supplémentaires à Agbar en 2013.

Et c’est encore loin d’épuiser les bénéfices engrangés par le Groupe Agbar au Chili. Depuis 1999, suite à l’acquisition de 50,1% de l’entreprise publique EMOS, Santiago est devenu une mine d’or pour le groupe franco-espagnol. Les réformes législatives dans le domaine sanitaire lui ont ouvert des possibilités illimitées de développement. Au début des années 2000, tout était à faire, principalement dans le domaine du traitement des eaux usées. Un contexte qui permis à Aguas Andinas et à sa société mère Agbar de tisser un réseau complexe de sociétés liées entre elles [voir la cartographie ci-dessous réalisée par le CIPER], auxquelles elle facture tous les ans des millions d’euros pour divers biens et services. 
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En 2013, les transactions déclarées par Aguas Andinas avec des sociétés liées à sa propre société mère Agbar s’élevaient à 47,2 millions d’euros. La Direction des services sanitaires (SISS) reconnaît que les profits de ces entreprises sous-traitantes et tout ce qui se passe dans ce secteur d’activité est en dehors de son champ de compétence. « La loi ne traite pas de cette question, les filiales font partie du secteur non réglementé », a déclaré à CIPER la superintendante des services sanitaires Magaly Espinosa.
Lire l’intégralité de l’enquête (en espagnol) sur le site du CIPER.

lundi 27 octobre 2014

ALEJANDRO JODOROWSKY, 69 ANS, PAPE DE LA BD, CINÉASTE CONVULSIF ET PITRE MYSTIQUE, EXPLORE LA PATERNITÉ VIRTUELLE DANS UN NOUVEL ALBUM. POLYFACÉTIEUX.

PORTRAIT À 16 ans, Alejandro Jodorowsky pesait 120 kilos.  Efficace pour être vu quand on n'a pas été désiré. On l'envoie à la gym, sans résultat. Guidé par un désir artistique tripal, il écrit des poèmes et maigrit. Ce petit miracle trace sa ligne de vie: il sera artiste. Il va en faire des tonnes pour être reconnu: un vrai cirque. Fatal, sa grand-mère était dompteuse de puces. 

Non content d'être l'un des scénaristes les plus prolifiques de la BD et le père de l'Incal ­ un énorme succès ­, il est aussi acteur, mime, réalisateur et psychomagicien. 

Glissant, en funambule interstellaire, du cinéma à la bande dessinée, de l'obscène au sacré. Après une vie de saltimbanque, suivi de sa smala, ce Chilien d'origine russe a planté son chapiteau dans le XXe. Dans un café arabe et un club d'arts martiaux, chaque mercredi Jodorowsky devient «Jodo», pour une lecture du tarot «gratis», suivie d'une conférence thérapeutique. Pape de la BD, cinéaste convulsif ou charlatan transcendantal? Son parcours de touche-à-tout inclassable tient du bric-à-brac icôno-ésotérique. A se prendre les niveaux de lecture dans l'oeil. Une curiosité mêlée de crainte scelle la rencontre dans son appartement du VIIIe arrondissement. Une bibliothèque d'érudit cerne les quatre murs. Son bureau tient de la chaire d'église. La pendule d'usine scande les journées de lecture et d'écriture, qui s'achèvent souvent à l'aube. Alejandro Jodorowsky se cale dans un canapé, un des sept chats l'y rejoint illico. Un ventre de Bouddha sous le gilet trois-pièces, un sourire très doux que dément le regard noir perçant. «Je suis polyfacétique», s'excuse-t-il, rigolard. Il tutoie et vous balade, avec son accent chatoyant, de colères en joyeux coq-à-l'âne: passant de l'amour paternel au foot, des Japonais qui déboisent la forêt chilienne pour leurs baguettes aux philosophes qui font du mauvais cinéma" «Ça me dérange d'être devenu un personnage: Jodo, le clown mystique, ce n'est pas moi. L'important, c'est l'oeuvre. Mais, si j'aborde l'oeuvre, j'écris ma nécro, je suis mort! Et je veux vivre jusqu'à 120 ans. J'ai dix ouvrages en cours: des poèmes, un traité sur les couples du tarot, quatre albums" Je n'ai pas fini!» L'espoir n'est pas fou: quasi centenaire, son père vit toujours. Jeune acteur de théâtre, Jodorowsky doute de sa réussite. Pour vérifier si le succès perdure sans le texte, il passe au mime. Ecrit des sketches pour Marceau: le Mangeur de coeurs, la Cage, où tout stagiaire en expression corporelle aura testé son concept du prisonnier: paumes écartées en appui sur une paroi virtuelle. L'artiste tente une image forte par décennie. En 1962, il convulse en string de cuir pour le théâtre Panique, fondé avec Arrabal et Topor, une provoc contre l'embourgeoisement des surréalistes. Puis réalise un western métaphysique, El Topo. Il y incarne un cow-boy macho, plus habile à déboucler le ceinturon qu'à dégainer le revolver. Suivront six films entre contes de fées et enfers grand-guignolesques, avec force rituels et monstres tronqués. Après un an d'adaptation, la réalisation de Dune lui échappe, elle est confiée à David Lynch. Jodorowsky pénètre alors un univers à la hauteur de sa fantasmagorie: la BD. Il y fait une entrée triomphale avec Moebius au dessin de l'Incal, vendu à un million d'exemplaires. Le thème, leitmotiv de sa création, traite de la Métamorphose ­ un détective minable vogue, en six tomes, vers la supraconscience. Moebius s'anime encore de ce duo lumineux. «Alejandro me racontait l'histoire en la mimant. Je prenais sous la dictée: découpage, intrigue et dialogues. Six heures pour boucler 60 pages. Jamais en panne de délires et d'imagination, son cerveau contiendrait 3 000 ordinateurs en folie.» Rien d'étonnant que Jodorowsky plonge aujourd'hui dans la réalité virtuelle. Sa nouvelle série, les Technopères, remet un peu de «père et de néomorale» dans un univers dominé par les ordinateurs. En doublé sort une autre BD, Juan Solo, dédiée à son fils Téo, mort il y a trois ans. «J'ai cinq enfants, quatre vivants.»

Comme dans la tradition du cirque, Jodorowsky, c'est une famille. Son aîné, Brontis, évoque l'enfance avec ses trois frères, entre New York, Paris et Mexico, une ambiance très virile mais sans interdits. «Il n'a pas trop suivi la scolarité et la légende veut qu'on ait appris à compter avec le tarot. Il voulait faire de nous des surhommes, qu'on se développe au maximum: musique, acrobatie" Très tôt, il nous posait des questions: Qu'est-ce que Dieu? L'amour? Comment va ta vie émotionnelle? Et, souvent: Suis-je un bon père?» Ses fils ont tous joué dans ses films, tous sont acteurs. Sa fille, Eugénie, qu'il n'a pas élevée, a fait sécession. Dernier échange: «Eugénie, grandis donc un peu.» La fille à son père: «Et toi, diminue donc un peu.»

Le mercredi, Jodo est roi en sa cour de paumés venus chercher, dans la lecture du tarot, une clé pour avancer ou un assentiment paternel. Le Cabaret mystique ne figure pas dans l'Officiel des spectacles; pourtant, fidèles et profanes s'y pressent depuis dix-neuf ans. «Je ne peux pas empêcher le fait d'avoir des adeptes. Je ne le fais pas pour l'argent ou pour une secte mais pour exalter les consciences. Je ne suis ni voyant ni gourou. Pas même un maître. Je dis quelques vérités, et alors? La montre cassée ne donne-t-elle pas l'heure juste deux fois par jour?» Il y a vingt ans, l'artiste a fait une mégacrise: et l'utilité de l'art dans tout ça? D'où sa modeste proposition d'un «art guérisseur» alliant tarot et arbre généalogique. Le théâtre thérapeutique s'ouvre sur un mantra: quand les Tibétains unissent leurs voix sur le «ôm» sanscrit, ici la salle murmure «femme». «Moïse ôte ses chaussures pour grimper le mont Sinaï non par rituel sacré mais juste parce qu'il a mal aux pieds.» A le voir relire les Evangiles ou les blagues Carambar, le public est hilare. Lui a trouvé un auditoire digne de son pitre. L'homme a beaucoup cherché: Bouddha, le zen Takata, la sorcière Paquita" Un savoir hétéroclite et millénaire qu'il panache pour exclure tout intégrisme. Sa grand-mère ne renia-t-elle pas la religion juive pour devenir goy?

Alejandro Jodorowsky n'a rien d'un moine non plus. «En mâle sud-américain barbare, je ne comprenais rien à la psyché féminine. Quand j'ai commencé à lire le tarot, il y a trente ans, je rentrais dans la séduction, ça finissait toujours au lit. Peu à peu, j'ai imité la sainteté, dit-il, riant sous cape. J'ai toujours vécu avec une femme, le couple est une grande joie dans ma vie. Je le défends comme une activité sacrée de préservation de l'humanité. Si le pape sortait sur son balcon de Saint-Pierre de Rome avec, à son bras, une dame de qualité comme la Papesse, il changerait forcément l'image du couple sur la planète.»

Sa compagne rentre d'un cours qu'il voudrait absolument de karaté. En fait, c'est une leçon d'espagnol. «Mais qu'est-ce qu'on va dîner ce soir?» Puis, tout bas, presque inaudible, avec une ruse de macho pleine de délicatesse: «On irait à l'Italien?» La jeune femme n'hésite pas une seconde: «Alors, je te fais des pâtes à la mozzarella!».

[photo LAURENT MONLAÜ]

Alejandro Jodorowsky en 7 dates : 17 février 1929: Naissance à Tocapilla (Chili).

1962: Il fonde le Mouvement Panique avec Arrabal et Topor.

1974: Il réalise la Montagne sacrée.

1981: Tome 1 de la série des Incal, avec Moebius.

1989: Il réalise Santa Sangre.

1994: Sortie du Théâtre de la guérison, son traité de psychomagie.

Mai 1998: Parution des Technopères, avec Janjetov. La Chair et la gale avec Georges Bess (Juan Solo 3). Sortie en poche du roman l'Arbre du dieu pendu.

CLEMENT Claudine  

samedi 25 octobre 2014

ARISTOPHANE : LE RIRE A-T-IL CHANGÉ ?

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« ARISTOPHANE : LE RIRE A-T-IL CHANGÉ ? » PAR JEAN-NOËL JEANNENEY
CHEZ FRANCE CULTURE, DANS  L'ÉMISSION « CONCORDANCE DES TEMPS »
  DU SAMENDI 25 OCTOBRE 2014
DURÉE: 00:58:00
[ Pour écouter, double-cliquer sur la flèche ]
Les mots pour le rire
Clemenceau adorait la Grèce antique et ses écrivains. Sauf un seul,
ARISTOPHANE 
Aristophane, dont il disait un jour à un confident : « Celui là, non ! Il dépare la collection. Il n’a rien compris à rien, il a pris le grand pour le petit, le petit pour le grand, il a jeté son fiel et jeté sa bave au hasard. Tout cassé, tout sali. Ce sont ces gens-là qui pourrissent un pays. » Voilà une bien rude philippique, et qui donne le goût d’aller y regarder de plus près. Quitte à démentir la sévérité du Tigre. Et en s’interrogeant sur les formes du rire que pratique, que provoque le théâtre d’Aristophane et qu’il laisse courir derrière lui. Telle sera notre contribution au week-end que France Culture consacre au beau sujet du rire, du rire à travers les âges. Dans notre temps on constate aisément la grande variété des ressorts de l’humour et de l’ironie d’un pays à l’autre, d’une civilisation à l’autre. Alors que doit-ce être dans la longue durée de l’Histoire ? Le rire d’Aristophane a paru si efficace à ses contemporains qu’on a conservé un bon nombre de ses pièces, alors que celles de ses rivaux ont disparu. Voilà qui donne le goût d’aller y regarder de plus près. Et pour tâcher de déceler par rapport à aujourd’hui ruptures et continuités.
C’est Silvia Milanezi, professeur d’histoire grecque à l’Université de Paris Est, qui connaît son Aristophane sur le bout du doigt, que j’ai priée de nous le faire mieux connaître et comprendre. Jean-Noël Jeanneney. 
Programmation sonore : - Extrait d’une conférence de Marcel ARLAND, dans Heure de culture française, le 17 février 1949.

- « Chanson du général », interprétée en 1962 par Marc et André, musique de Georges AURIC, chanson composée pour la mise en scène des Oiseaux d’ARISTOPHANE par Charles DULLIN en 1928 au Théâtre de l’Atelier.

- Extrait de La Paix d’ARISTOPHANE, avec Jean VILAR et Michel BOUQUET au TNP, diffusée dans les Actualités françaises le19 décembre 1961.

- Extrait de Lysistrata d’ARISTOPHANE, avec Lise DELAMARE (de la Comédie française), diffusé sur la RTF, le 22 avril 1954.

- Extrait de L’Assemblée des femmes, réalisé par Bronislaw HOROWICZ et diffusé sur la RTF le 20 octobre 1954.

Bibliographie :
- Aristophane, Nuées, texte établi par Victor COULON et traduit par Hilaire VAN DAELE, introduction et notes de Silvia MILANEZI, Les Belles Lettres, coll. Classiques en Poche, 2009.
- Aristophane, Ploutos, texte établi par Victor COULON et traduit par Hilaire VAN DAELE, introduction et notes de Silvia MILANEZI, Les Belles Lettres, coll. Classiques en Poche, 2008.
- Aristophane, Lysistrata, texte établi par Victor COULON et traduit par Hilaire VAN DAELE, introduction et notes de Silvia MILANEZI, Les Belles Lettres, coll. Classiques en Poche, 1996.
- Christophe HUGONIOT, Frédéric HURLET et Silvia MILANEZI (éd.), Le Statut de l’acteur dans l’Antiquité grecque et romaine, Presses Universitaires François Rabelais, 2004.
- Silvia MILANEZI et Brigitte LEGUEN, L'appareil scénique dans les spectacles de l'Antiquité, Presses universitaires de Vincennes, 2013.
- Marie-Laurence DESCLOS, Le rire des Grecs. Anthropologie du rire en Grèce ancienne, éditions Jérôme Million, 2000.
- Dominique ARNOULD, Le rire et les larmes dans la littérature grecque d’Homère à Platon, Les Belles Lettres, 2009.
- Pascal THIERCY, Aristophane et l’ancienne comédie, PUF QSJ, 1999.
Invité(s) :
Silvia Milanezi, professeur d’histoire grecque à l’Université de Nantes.

mercredi 22 octobre 2014

UNE ÉQUIPE INTERNATIONALE ÉTUDIE L'ALÉA SISMIQUE DE SANTIAGO DU CHILI

Les plus grands tremblements de terre se
produisent à la limite entre deux plaques tectoniques, le plus souvent dans les zones de subduction. Ces séismes, dont la magnitude peut atteindre et même dépasser Mw 9, génèrent souvent d'importants tsunamis et peuvent être très destructeurs. Le désastre japonais de mars 2011 en est un triste exemple. La subduction de la plaque Nazca sous l'Amérique du Sud au Chili est connue pour avoir elle aussi généré de très grands séismes (Mw 9.5 en 1960, Mw8.8 en 2010, par exemple). Mais ce ne sont pas les seules structures tectoniques dangereuses. Certaines failles associées à la déformation interne des plaques peuvent aussi provoquer de grands séismes très destructeurs, notamment quand ces failles sont proches de grandes villes. C'est en particulier le cas des failles chevauchantes au front des chaînes de montagnes. Evaluer le risque sismique associé à ces failles est donc crucial, mais plusieurs exemples tragiques, comme la catastrophe de Bam en 2003 au sud-est de l'Iran ou celle du Sichuan en Chine en 2008, montrent que cet aléa est la plupart du temps bien identifié seulement après la catastrophe.

RELEVÉ DÉTAILLÉ DU MUR DE LA TRANCHÉE PALÉOSISMOLOGIQUE À TRAVERS L'ESCARPEMENT DE FAILLE. LES DIFFÉRENTES UNITÉS SÉDIMENTAIRES SONT IDENTIFIÉES PAR DES CHIFFRES ROMAINS. LES ÉCHANTILLONS DATÉS (OSL, C14) SONT LOCALISÉS. © VARGAS ET AL. 2014

L'identification du chevauchement ouest andin comme la structure majeure responsable de la surrection de la chaîne Andine a conduit cette équipe internationale à en étudier le potentiel sismique.

LA TRANCHÉE VUE DEPUIS LE HAUT DE L'ESCARPEMENT. LE CENTRE DE SANTIAGO EST VISIBLE EN ARRIÈRE PLAN. © R. LACASSIN IPGP
À la latitude de Santiago du Chili 33°5 S, la chaîne des Andes est étroite (< 100 km) et représente la structure Andine à un stade primaire de son évolution. Elle est caractérisée, sur son bord ouest, par un système composé de plis de propagation et de failles chevauchantes, dont la faille active de San Ramón qui émerge en surface, à la base des reliefs andins juste au-dessus de la ville de Santiago. 

LA TRANCHÉE VUE VERS L'AMONT. EN ARRIÈRE, LES RELIEFS DU CERRO SAN RAMÓN. © R. LACASSIN IPGP



Ce système sʼenracine par le biais d'une grande faille peu inclinée, le chevauchement ouest andin (WAT) avec une structure dite de type rampe et décollement, à la base d'une  série sédimentaire épaisse de 12 km. Plus à l'Est, ce chevauchement ouest andin plonge sous un vaste anticlinal de socle à l'échelle de toute la croûte. Le raccourcissement absorbé par le chevauchement de San Ramón et les plis associés serait de l'ordre de 10 km, depuis 25 millions d'années, ce qui implique une vitesse de glissement moyenne d'environ 0,4 mm par an. Cette vitesse, très lente par rapport à celle, pluri-centimétrique, de la subduction Nazca-Amérique du sud, suggère à priori que les séismes destructeurs s'y produisent après de longs intervalles de quiescence. La récurrence - c'est-à-dire le temps moyen entre deux séismes équivalents -  serait de plusieurs milliers d'années au moins. 

GROS PLAN SUR LE MUR DE LA TRANCHÉE ET SUR LA ZONE DE FAILLE. L'UNITÉ NOTÉE VII A ÉTÉ DÉCALÉE PAR LES DEUX SÉISMES POUR UN TOTAL DE PRESQUE 10M. © R. LACASSIN IPGP

L'étude publiée en 2010, concluait que la faille de San Ramón était susceptible de produire des séismes de magnitude importante (Mw 6.9 à Mw 7.4) avec un foyer à faible profondeur (moins de 15km). Elle avait identifié sur le terrain la trace probable de tels séismes passés sous la forme d'un escarpement de quelques mètres de haut. La nouvelle étude qui vient d'être publiée s'est focalisée sur cet escarpement.

Les études de la paléosismicité

Les chercheurs ont ainsi réalisé des tranchées à travers l'escarpement et sont parvenus à mettre à jour et à documenter avec précision deux ruptures sismiques ayant rompu la surface, qui affectent des sédiments déposés au pied du Cerro San Ramón, dans les hauts de la ville de Santiago. En reconstituant la géométrie des unités sédimentaires décalées, ils ont estimé le déplacement co-sismique (glissement quasi-instantané lors du séisme) à environ 5m pour chacune de ces ruptures. Ce qui leur permet d'évaluer à Mw7.5 environ la magnitude pour chacun des  deux séismes. 

De nombreux échantillons ont été prélevés pour caractériser et dater précisément les unités sédimentaires décalées. Les chercheurs ont utilisé les techniques de datation au Carbone 14 et par luminescence stimulée optiquement (optically stimulated luminescence - OSL). Ces datations révèlent que les deux tremblements de terre de magnitude 7.5 se sont produits au cours des derniers 17000 à 19000 ans, donc avec une récurrence de l'ordre de 9000 ans. L'étude fine du développement des structures sédimentaires, en particulier celle du sol après le dernier séisme, montre que celui-ci date probablement de 8000 ans environ. La faille de San Ramón n'aurait donc pas rompu depuis cet évènement préhistorique et serait prête à casser à nouveau, soumettant ainsi la ville de Santiago à un aléa important. La proximité de la faille implique que cet aléa, évalué en modélisant l'accélération du sol, est en fait potentiellement plus important que celui lié aux séismes de subduction.


Les conclusions sur l'aléa relié au chevauchement ouest andin, et sur la magnitude des tremblements de terre que cette structure tectonique est susceptible de produire, peuvent être raisonnablement étendues à l’ensemble du front ouest des Andes, depuis le centre-sud Chili, jusqu'au nord Pérou au moins. Plus généralement, ces nouveaux résultats soulignent les dangers potentiels dus aux failles bordant tous les reliefs actifs de par le globe, même si les vitesses tectoniques lentes peuvent y donner une fausse impression de sécurité.

Pour en savoir plus: 
Tectonique : un nouveau modèle orogénique pour les Andes

Source(s): 
Probing large intra-plate earthquakes at the west flank of the Andes, G. Vargas 1, Y. Klinger 2, T.K. Rockwell 3, S.L. Forman 4, S. Rebolledo 1, S. Baize 5, R. Lacassin 2, and R. Armijo 2 .  Geology, publié en ligne le 17 octobre, 2014.doi: 10.1130/G35741.1
1- Departamento de Geología, Universidad de Chile, Santiago, Chile.
2- Institut de Physique du Globe de Paris, Sorbonne Paris Cité, Université Paris Diderot, CNRS
3- Department of Geological Sciences, San Diego State University, USA 
4- Department of Geology, Baylor University, Waco, Texas, USA.
5- Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRSN), France

Lire aussi :  
The West Andean Thrust, the San Ramón Fault and the seismic hazard for Santiago, Chile. Armijo, R., Rauld, R., Thiele, R., Vargas, G., Campos, J., Lacassin, R., and Kausel, E., 2010,  Tectonics, v. 29, p. TC2007, doi:10.1029/2008TC002427.


Ce travail a été soutenu par l'Agence Nationale de la Recherche (projet MegaChile) le LABEX UnivEathS, et au Chili par le Ministerio de Vivienda y Urbanismo, Gobierno de Chile. Les recherches franco-chiliennes sont coordonnées par le LIA Montessus de Ballore (CNRS-INSU, Université du Chili).

Contact(s):
Robin Lacassin, IPGP (CNRS-INSU, Paris Diderot)
lacassin@ipgp.jussieu.fr, 01 83 95 76 24
Yann Klinger, IPGP (CNRS-INSU, Paris Diderot)
klinger@ipgp.fr, 01 83 95 76 23

LE CHILI ACCUEILLE LA COUPE DU MONDE DES SANS-ABRI

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54: 54 équipes, dont 12 équipes féminines, participent à cette compétition de football de rue. 

2.600: Le défenseur de Brondby Daniel Agger a payé un peu plus de 2.600 euros afin de permettre à l'équipe danoise des sans-abri de financer son voyage pour le Chili. 

100.000: la douzième édition de la compétition se déroule sur la Plaza de Constitucion à Santiago, au Chili, où 100.000 spectateurs sont attendus pour l'occasion entre le 19 et le 26 octobre 2014.   

mardi 21 octobre 2014

MORT DU PHOTOGRAPHE RENÉ BURRI, PORTRAITISTE DU CHE ET DE PICASSO

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Mort du photographe René Burri

Le photographe suisse René Burri est mort, lundi 20 octobre 2014, à l'âge de 81 ans, a annoncé l'agence Magnum.
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PLANCHE-CONTACT D'ERNESTO «CHE» GUEVARA
Né à Zurich en 1933, il était connu pour ses reportages d'actualité, couvrant notamment les guerres de Six Jours, du Kippour, du Vietnam ou encore la crise de Cuba, ainsi que pour ses portraits, dont les plus connus sont ceux de « Che » Guevara et de Pablo Picasso.

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SERGIO LARRAIN PAR RENÉ BURRI  
René Burri a étudié à l'école des arts appliqués de Zurich avant de collaborer avec la fameuse agence Magnum en 1955, qu'il intégrera définitivement en 1959. C'est en 1963, lors d'un séjour à Cuba, qu'il réalisa le cliché mondialement célèbre d'Ernesto Guevara. Mais sa première grande publication, qui l'a rendu célèbre, est sa série sur la rétrospective de Picasso, au Palazzo Reale de Milan. Parmi ses oeuvres figurent également une centaine de portraits de Le Corbusier, Giacometti, Tinguely, Klein et Picasso.

Une rétrospective de son œuvre s'est tenue en 2004-2005 à la Maison européenne de la photographie à Paris. L'année dernière, il avait légué toutes ses archives au Musée de l'Elysée à Lausanne, soit environ 30 000 photos. 


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AUTOPORTRAIT DE RENÉ BURRI, 1973.  PHOTO RENE BURRI/MAGNUM PHOTOS

Autoportrait de René Burri, 1973. 

lundi 20 octobre 2014

CHILI : UN ANCIEN MAIRE DE SANTIAGO ARRÊTÉ POUR CRIMES DURANT LA DICTATURE

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Les crimes ont été commis après le coup d'Etat du 11 septembre 1973 dans une caserne de San Antonio, à quelque 120 km à l'ouest de Santiago, selon l'enquête judiciaire. Trois des victimes sont encore portées disparues, et selon des témoignage, toutes ont été torturées et exécutées, certaines mortes par balle, d'autres noyées dans une rivière.

3 200 MORTS ET 38 000 DÉTENUS TORTURÉS

La caserne Tejas Verdes de San Antonio était un centre de détention et de torture redouté, où étaient formés les agents de la Dina, la police secrète de la dictature, et où selon les témoignages recueillis par une commission officielle, les détenus étaient frappés, torturés à l'électricité, brûlés ou soumis à des simulacres d'exécution.

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CRISTIAN LABBÉ GALILEA
Après avoir pris sa retraite de colonel et été ministre sous la dictature, Cristian Labbé, membre de l'aile droite de l'Union démocratique indépendante (UDI), a été maire pendant seize ans du quartier de Providencia dans la capitale, jusqu'en 2012. Il est connu comme un ardent partisan du dictateur Augusto Pinochet (1973-1990) dont il a été un temps garde du corps.

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CRISTIAN LABBÉ GALILEA BARBOUZE
AU SERVICE DE PINOCHET
La répression exercée par la dictature de Pinochet a fait plus de 3 200 morts et plus de 38 000 détenus ont été torturés, selon des chiffres officiels. Le général Pinochet est décédé en 2006, sans jamais avoir été jugé. Début septembre, au moins 3 000 personnes avaient manifesté pour demander au gouvernement la fin de l'impunité pour les responsables de la répression durant la dictature militaire.

jeudi 16 octobre 2014

CHILI: UN PRÊTRE COUPABLE D'ABUS SEXUELS

Les faits se sont produits au sein de l'établissement scolaire Colegio Cumbres, fréquenté par les enfants de l'élite chilienne.

Le prêtre irlandais, arrivé dans le pays en 1984, a été le représentant de la puissante Congrégation des Légionnaires du Christ, fondée en 1941 au Mexique par le père Marcial Maciel, qui l'a dirigée avec poigne jusqu'à sa mort et qui a été accusé de nombreux abus et maltraitance de mineurs durant des décennies. Le prêtre 0'Reilly avait été également accusé d'avoir molesté la sœur aînée de la victime mais, dans cette affaire, le tribunal l'avait acquitté, considérant qu'il n'existait aucune preuve.

Le verdict sera annoncé par une Cour pénale de Santiago le 11 novembre prochain. Le procureur a demandé une peine de 10 ans de prison pour le prêtre pédophile. Pendant les deux mois qu'a duré le procès, le prêtre a refusé de faire toute déclaration. Mercredi il s'est limité à dire à la presse: « Dieu dira ».

mardi 14 octobre 2014

ANDRÉS AVELINO CÁCERES : LE « SORCIER DES ANDES»

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ANDRÉS AVELINO CÁCERES DORREGARAY
Andrés Avelino Cáceres est né à Ayacucho le 4 février 1833. Fils de Domingo Cáceres Oré et de Justa Dorregaray Cueva, il a écrit, l’air de rien, l’une des plus belles pages de l’histoire péruvienne. 

C’est à 21 ans, en 1854, qu’il est touché pour la première fois par une balle pendant la bataille de La Palma [lors d’une révolte, dont il fait partie, contre le gouvernement, entre autres pour obtenir l’abolition de l’esclavage] : alors qu’il se bat aux côtés du général Ramón Castilla, le jeune sous-lieutenant est blessé au pied. 

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CROQUIS DE LA BATAILLE DE TARAPACÁ

C’est le baptême du feu pour ce soldat qui, au cours des trente années suivantes, va devenir l’un des grands combattants républicains du Pérou. Il s’est engagé dans l’armée à une époque où le pouvoir se défend ou se conquiert sur le champ de bataille. Il participe ainsi, dans le camp des forces désormais gouvernementales de Ramón Castilla, à la guerre civile [1857-1859] déclenchée par Manuel Ignacio de Vivanco. Il est alors de nouveau blessé, cette fois au visage. En 1859, quand l’Equateur tente de s’approprier des terres qui ont toujours appartenu au Pérou, il est dépêché à la frontière. Le 2 mai 1866, il fait partie des courageux défenseurs du port de Callao pendant le conflit contre l’Espagne. Et, en 1874, il risque sa vie pour écraser un soulèvement de sous-officiers. 
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BATAILLE DE TARAPACÁ

Cinq ans plus tard, il est envoyé à Cuzco pour être préfet et chef militaire de cette région. C’est dans ce contexte qu’éclate la guerre du Pacifique [1879-1883, opposant le Chili au Pérou et à la Bolivie]. Andrés Avelino Cáceres est déployé dans le Sud, à la tête du bataillon Zepita. Il se bat à Pisagua, San Francisco et Tarapacá, où il lance l’attaque contre les forces chiliennes. Grâce à son offensive et à celle d’autres courageux militaires péruviens, il remporte cette bataille, qui sera la seule victoire du pays au cours du conflit. 

Toutefois, face à la puissance de l’envahisseur, les troupes péruviennes sont contraintes d’abandonner la province historique de Tarapacá, la mort dans l’âme. Elles traversent le sable brûlant du désert pour se retirer et reprendre des forces en vue de contenir les avancées de l’ennemi. Andrés Avelino Cáceres s’illustre une fois de plus lors de la bataille de l’Alto de la Alianza, au cours de laquelle il assiste, impuissant, à la mort de 2 000 soldats péruviens et boliviens face à la violence des assauts chiliens [en 1880. 
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À l’issue de cette défaite, la Bolivie interrompt ses opérations militaires]. La guerre devait pourtant continuer. Il fallait arrêter l’ennemi coûte que coûte. Pour défendre Lima, il se bat courageusement à San Juan de Miraflores. Il est encore blessé, cette fois à la jambe, mais rien ne l’arrête. [Les Chiliens occupant la capitale péruvienne], il s’enfuit en pleine nuit pour aller se faire soigner dans un hôpital de la ville. Il n’a qu’une obsession : retourner sur le champ de bataille. 

Avec l’aide de quelques compatriotes, il se cache dans un couvent de jésuites, puis dans une demeure du centre historique et enfin dans sa maison de la rue San Ildefonso, où l’ennemi vient plusieurs fois le chercher. Quelques jours plus tard, il reprend les armes. Quittant Lima, il monte dans un train à La Oroya, dont il descend à Chilca pour ne pas être capturé. De là, il part à cheval pour Jauja, où se trouve le président péruvien Nicolás de Piérola, lequel le nomme chef politique et militaire de la région centrale du pays. 

C’est alors que commence une nouvelle aventure, la plus fascinante et la plus héroïque de l’histoire du Pérou. Avec quelques officiers et gendarmes, il entreprend, depuis l’hôpital de Jauja, la planification de la campagne de La Breña, dite des Andes – celle qu’il appellera dans ses Mémoires la “bataille de la résistance”. Pendant près de trois ans, il fait preuve d’une belle endurance dans les Andes péruviennes, inflige de graves revers aux troupes des envahisseurs et sauve l’honneur de sa patrie. 


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A près de 50 ans, toujours en excellente santé, il surmonte tous les obstacles d’une lutte difficile et inégale. Il parcourt des chemins accidentés, traverse des déserts et des ravins, se lance dans des marches durant plusieurs jours, à la tête d’un grand groupe de gradés et de soldats, parmi lesquels le général Pedro Silva, les colonels Tafur (père et fils) et Leoncio Prado Gutiérrez. 

Tous incapables de se résigner à la défaite, armés de fusils, de mitrailleuses et même d’un canon, ils livrent aux Chiliens une guerre terrible et semée d’embûches. “Il n’a manqué qu’une chose à Andrés Avelino Cáceres – selon l’historien Jorge Basadre – pour que sa consécration soit triomphale : mourir à Huamachuco [la dernière bataille, et défaite péruvienne, de la guerre, le 10 juillet 1883]. La vie sauve, le guerrier s’est transformé en dirigeant. Il n’a pas choisi sa reconversion politique, c’est elle qui est venue le chercher sous sa tente.” 

Il est ensuite élu deux fois président de la République. Après un premier mandat modéré de 1886 à 1890, il tient absolument à revenir au pouvoir en 1894, mais montre alors qu’il a malheureusement perdu le sens des réalités. [Il démissionne en 1895, chassé par une révolte populaire, et s’éteint en 1923, à 90 ans.] 

—Domingo Tamariz Lucar 
Publié le 31 août 2014 dans El Peruano Lima

CONFLIT
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LIMA,OCCUPÉE PAR LES TROUPES CHILIENNES,1881

— Un continent en guerre

L’Amérique du Sud a été le théâtre de conflits territoriaux sanglants. Après les guerres d’indépendance contre l’Espagne de 1810 à 1825, les pays nés de l’empire espagnol s’entre-déchirent. Une première guerre oppose le Pérou à la Grande Colombie (qui regroupait le Panamá, la Colombie, l’Equateur et le Venezuela) dès 1828. En 1841, un conflit éclate entre le Pérou et la Bolivie, puis, de 1858 à 1861, entre le Pérou et l’Equateur. Lors de la guerre de la Triple Alliance (1864-1870), le Paraguay résiste au Brésil, à l’Argentine et à l’Uruguay. Et de 1879 à 1883, le Pérou et la Bolivie se heurtent au Chili dans le cadre de la guerre du Pacifique. Au XXe siècle aussi, les pays d’Amérique du Sud continuent de régler leurs différends par la violence, comme la Bolivie et le Paraguay pendant la guerre du Chaco (1932-1935), ou le Pérou et l’Equateur, en 1941, 1981 et 1995.

EL PERUANO | DOMINGO TAMARIZ