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Sombre tableau
Àl’aide de multiples graphiques et avec un sens
de la pédagogie qui ne nous épargne aucun détail du sombre tableau qu’il dresse, Wolfgang Streeck, professeur de l’université de Cologne, né en 1946, montre comment l’actuel triomphe du marché, fâché avec la croissance dès le milieu des années 1970, se produit alors que ledit marché n’est plus en mesure que d’empiler de la dette. Dans son avatar « néolibéral », le capitalisme se révèle donc incapable d’honorer les promesses de l’Etat social d’après-guerre, et la politique qu’il reconfigure sous nos yeux se met au service d’un autre peuple, celui des « rentiers » du capital, qui ne maintient son emprise sur l’opinion publique qu’en anesthésiant celle-ci par le biais d’une industrie culturelle envahissante – et en lui martelant l’idée qu’il n’y a pas d’alternative.
LE SOCIOLOGUE ALLEMAND WOLFGANG STREECK |
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L’ouvrage décrit l’après-guerre comme une période
de lente dissolution de l’Etat-providence, interventionniste et redistributeur. Depuis plusieurs décennies, mais surtout depuis le krach de 2008, le capitalisme serait entré dans un état de crise permanente dont rien ne permet de penser qu’il va sortir. Il se contente en réalité d’ajourner son implosion et de retarder la colère des laissés-pour-compte de la redistribution, en « achetant du temps », autrement dit en recourant à des déficits impossibles à combler et à des dettes insolvables.
FRIEDRICH HAYEK, 1940. |
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LORD MAYNARD KEYNES ET SA FEMME LYDIA, 1944 |
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COUVERTURE DE « GEKAUFTE ZEIT » |
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Cette critique, qui s’étend ainsi aux institutions de
l’Union européenne, auxquelles l’auteur reproche de s’arc-bouter sur la monnaie unique, est peu courante en Allemagne. Des notions comme le « cosmopolitisme » ou la foi dans le fait que la construction européenne constitue bel et bien un progrès vers la démocratie ont, pour des raisons historiques, dominé la scène intellectuelle d’outre-Rhin sous la houlette, notamment, du philosophe Jürgen Habermas – avec lequel Wolfgang Streeck engage un dialogue critique dans la postface. Par sa radicalité, ce livre rappelle plutôt les propos incandescents de L’Anti-Œdipe (Minuit, 1972), où Gilles Deleuze et Félix Guattari décrivaient la nature destructrice et « schizophrénique » du capitalisme. Si tous ces « avertisseurs d’incendie » se montraient bons prophètes, l’avenir serait décidément bien à craindre.
JÜRGEN HABERMAS, DANS LES ANNÉES 50 |