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DES DAIMS ROUGES DANS LA RÉSERVE BIOLOGIQUE DE HUILO HUILO AU SUD DU CHILI LE 5 JANVIER 2014.PHOTO HO/AFP |
Intentionnellement ou accidentellement - par le transport, le commerce ou le tourisme - l'action humaine a introduit des espèces dans des habitats qui ne sont pas les leurs, les transformant en envahisseurs. Ces espèces invasives menacent désormais de détruire la faune et la flore autochtones.
«Quand la biodiversité se perd, on perd un patrimoine génétique», nécessaire pour nous alimenter ou développer des médicaments, par exemple, explique à l'AFP Fernando Baeriswyl, coordinateur d'un projet sur le sujet au sein du Fonds pour l'environnement mondial (FEM).
Les castors vivent en équilibre avec leur milieu dans leur habitat naturel, en Europe et en Amérique du Nord, mais en Patagonie, ils se nourrissent de bois incapables de se régénérer au rythme auquel ils sont consommés et ne craignent aucun prédateur.
Avec le bois qu'ils coupent, ils érigent des digues de jusqu'à trois mètres, inondant, asséchant ou détournant des cours d'eau. En quelques années, ils ont colonisé des îles et sont parvenus à atteindre le continent.
Leur développement est tellement rapide qu'aujourd'hui ils constituent un fléau difficile à éradiquer. Les autorités chiliennes et argentines ont autorisé leur chasse, mais ces efforts ne se sont pas révélés suffisants.
Désormais, «le Chili et l'Argentine se sont fixés comme objectif qu'il ne reste plus aucun castor», raconte à l'AFP Adrian Schiavini, spécialiste de cet animal au Centre austral de recherches scientifiques.
Dans la réserve naturelle de Huilo Huilo, dans le sud du Chili, des dizaines d'experts se sont réunis les 22 et 23 octobre pour la première Rencontre nationale sur les espèces invasives dans les aires protégées, pour tenter de remédier au manque de connaissance et de règles pour affronter ce phénomène.
Ces espèces voyagent dans les cales des navires, dans les vêtements, les chaussures ou même les estomacs de personnes se déplaçant puis prolifèrent en profitant de l'absence de prédateurs naturels.
Elles croissent, répandent de nouvelles maladies puis se convertissent en aliment pour d'autres animaux, qui voient leur régime alimentaire se modifier. Peu à peu, elles altèrent l'équilibre des écosystèmes et dans les pires des cas, éliminent d'autres espèces.
Selon les spécialistes, avec la pollution et le changement climatique, il s'agit de l'un des phénomènes les plus nuisibles à la planète.
«Le changement climatique provoque une plus grande vulnérabilité de certaines espèces aux effets des espèces invasives», ajoute Victor Carrion, administrateur du Parc national des Galapagos, en Equateur.
Selon une étude de l'Université du Chili, il existe dans ce pays 119 espèces invasives exotiques, dont 27 représentent une menace pour la biodiversité, parmi lesquelles des guêpes, le vison, le castor, le sanglier ou le cerf rouge, notamment.
Scénario identique avec la flore : dénicher une plante qui nous plaît et la rapporter à la maison pour la mettre dans le jardin peut être le début d'une catastrophe écologique.
C'est le cas des ronces, qui produisent des mûres. «Quand elles arrivent, c'est un arrêt de mort», affirme Fernando Baeriswyl. Elles envahissent les sous-bois et empêchent par leur ombre la photosynthèse des autres plantes, en plus de pomper leur eau.
Même cas de figure avec les lapins, les chèvres ou les chiens : ces animaux n'auraient jamais atteint certains lieux sans action humaine.
Quand les Européens ont commencé à naviguer à travers les mers sud-américaines, ils ont décidé de laisser des chèvres sur les îles visitées, pour s'assurer de quoi s'alimenter lors de leurs prochains voyages. Mais celles-ci ont tout dévoré sur leur passage, érodant les sols et affectant les écosystèmes.
Des siècles plus tard, plus de 270.000 chèvres ont été éliminées sur 10 îles de l'archipel des Galapagos, en plus de chats, de pigeons, d'ânes et de rongeurs, indique à l'AFP Victor Carrion.
Le frein à l’élimination provient de groupes de défenseurs des animaux, qui critiquent ces méthodes radicales.
«Quand on élimine une plante, ça n'est pas grave, parce qu'une plante ne pleure pas», explique Fabian Jaksic, zoologiste à l'Université catholique du Chili.