Les concessions de lithium dans le désert de l'Atacama, au nord du Chili, dataient de 1932... Rien n'avait vraiment bougé depuis les années 70, où le lithium avait été classé ressource stratégique par le régime Pinochet pour son potentiel en matière d'énergie nucléaire. Cet usage est devenu une perspective de plus en plus lointaine. La batterie automobile au lithium n'a pas décollé non plus, mais les batteries rechargeables pour téléphone mobile et ordinateur sont, elles, une réalité.
Alors la production se développe ailleurs qu'au Chili et ce pays risque de perdre le contrôle de ce marché très opaque, et donc celui des prix. Le Chili ne produit plus que 43% du lithium mondial, contre 51% il y a neuf ans. La concurrence vient moins de la Bolivie dont les infrastructures sont insuffisantes, que de l'Argentine, de l'Australie et de la Chine. A eux trois, ces pays devraient constituer 90% de la hausse de production mondiale d'ici 2020 (450 000 tonnes devraient alors être produites contre 140 000 tonnes aujourd’hui).
C'est pourquoi le gouvernement libéral de Sebastian Piñera veut donner un nouvel élan à la production chilienne de lithium. Quitte à l'ouvrir largement aux investisseurs privés locaux et étrangers. C’est ce qui fait grincer les dents de nombreux Chiliens. Le nationalisme minier, qui ressurgit partout dans le monde, est très fort depuis des décennies dans ce pays qui a nationalisé ses mines de cuivre en 1971 et qui en a fait la base de son développement. L'opposition craint à présent une privatisation rampante du champion chilien du cuivre, Codelco. Elle demande que l'extraction du lithium soit au moins l'occasion de développer une industrie de transformation dans le pays.