Mais, même s’ils ont apprécié cette avancée et l’ont saluée comme une victoire, les dirigeants étudiants ont rappelé qu’il restait encore du chemin à parcourir. Décidés à rester vigilants sur les clauses en petits caractères, ils ont souligné que les changements s’obtenaient dans la rue. Ils ont été entendus : la première manifestation de 2012, mercredi 25 avril, a rassemblé 48 000 étudiants selon la police, 75 000 selon les organisateurs. “Un succès total”, au dire de Camila Vallejo.
La journée d’action a commencé à 11 heures du matin sur la Plaza Italia, centre névralgique de Santiago. Des lycéens, des étudiants et des élèves d’autres écoles [collèges privés, instituts professionnels, etc.] ont entamé leur marche en passant par l’Alameda, principale artère de la capitale, avant d’arriver à l’ancienne gare Mapocho, dans le nord de la ville. Le slogan “A bas l’enseignement de Pinochet” a retenti une nouvelle fois avec force, accompagné de danses et de musique. Certains portaient des déguisements, beaucoup brandissaient des pancartes. Comme d’habitude, les manifestants ont écouté les discours des principaux dirigeants étudiants. “Les familles chiliennes ne veulent pas vivre dans l’endettement, a lancé Boric d’entrée de jeu. [Notre mouvement] est un camouflet pour ce gouvernement, qui ne veut pas comprendre que nous, les étudiants, nous continuerons à nous battre jusqu’à ce que l’enseignement s’améliore […]. Nous ne nous vendrons pas.” De son côté, Camila Vallejo s’est dite étonnée du nombre de manifestants et a déclaré : “Nous devons être fiers d’être là. On nous répétait que les étudiants étaient fatigués, que cela n’en valait plus la peine, que plus personne ne voulait mouiller sa chemise, et voilà le résultat.” La très charismatique dirigeante a ajouté qu’“aujourd’hui nous le voyons dans les rues, avec le nombre de gens qui sont venus réclamer des réformes… le peuple chilien défendra sans relâche le droit à l’éducation”.
Quant au président de l’Université catholique, Noam Titelman, il estime qu’il faut voir dans cette manifestation un appel au gouvernement “pour qu’il [surmonte] la crise de représentativité à laquelle il est confronté et pour qu’il soit plus ouvert au dialogue”. Le ministre Beyer considère que cette manifestation ne se justifie pas, étant donné que le gouvernement, par le projet qu’il a annoncé au début de la semaine, a satisfait les revendications formulées l’année dernière par le mouvement. Pour sa part, le porte-parole de la présidence, Andrés Chadwick, a dressé un bilan positif de la journée d’action et s’est félicité de l’attitude de la police, durement critiquée pour avoir eu la main lourde lors des manifestations précédentes. A quelques pâtés de maisons de là, au milieu du cortège, il y avait Gerson Gutiérrez, le frère de Manolito, ce jeune de 16 ans abattu par un carabinier il y a tout juste huit mois, sur une barricade en cours d’installation dans un quartier de Santiago, un jour de manifestation.