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1830, RAMÓN LUIS ÁLVAREZ COMMENCE À ÉLABORER L'EAU-DE-VIE DE RAISIN DONT LES BOUTEILLES AFFICHENT DANS L'ÉTIQUETTE LA MARQUE « PISCO ÁLVAREZ ». |
« La preuve contenue dans ce document établit que le pisco est une eau-de-vie qui a commencé à être fabriquée au Chili au 18e siècle», a assuré l'expert Pablo Lacoste lors d'une conférence de presse organisée mardi par l'Association de producteurs de pisco chilien.
Les chercheurs avancent une autre preuve : une étiquette commerciale portant le nom de pisco, utilisée au Chili en 1882 donc bien avant son voisin où une étiquette similaire a été repérée pour la première fois en 1922.
La découverte a immédiatement fait réagir le Pérou, où l'eau-de-vie est source de fierté nationale et la boisson incontournable pour accompagner le moindre toast.
L'histoire du pisco remonte à la colonisation espagnole au 16e siècle, lorsque la vigne a été introduite dans les Andes.
Frisant les 40 degrés, il peut se boire pur, mais il est plutôt servi sous forme de « pisco sour », un cocktail confectionné en y ajoutant du jus de citron, du blanc d’œuf, du sirop et de la cannelle.
Et les historiens péruviens sont formels : c'est bien leur pays qui l'a inventé. Ils citent pour cela des documents évoquant l'élaboration de pisco au Pérou dès 1613.
- Sujet sensible -
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TESTAMENT DE PEDRO MANUEL «LE GREC» |
CE DOCUMENT EST UN TESTAMENT OFFICIEL DE 1613 ET MENTIONNE QUE PEDRO MANUEL DIT «LE GREC», LAISSE EN HÉRITAGE À SON ESCLAVE UNE GRANDE QUANTITÉ D’EAU-DE-VIE. «LE GREC» LUI LÈGUE, DONC, DES TONNEAUX ENTIERS ET DES DIZAINES DE BOUTEILLES PLEINES. MAIS IL LUI LAISSA AUSSI UN ALAMBIC. *
« Ici, ce qui prime, c'est la localisation géographique et le port de Pisco (qui donne son nom à la liqueur, ndlr) est au Pérou », renchérit l'expert péruvien José Moquillaza.
Consulté par l'AFP, Pablo Lacoste balaie ces arguments : « Une chose est l'eau-de-vie, l'autre est le pisco. Au Pérou il y avait de l'eau-de-vie, qui est le résultat de la distillation. Mais dans ce pays il n'y a aucun document antérieur à 1825 qui utilise le concept de pisco pour nommer cette eau-de-vie ».
La paternité du pisco est une vieille dispute entre Santiago et Lima, qui a obtenu plusieurs victoires à ce sujet, devant l'Union européenne ou encore l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).
De chaque côté de la frontière, on plaisante fréquemment sur le sujet, on revendique la meilleure préparation du « pisco sour » et on célèbre dignement le «Jour national du pisco ».
L'eau-de-vie s'ajoute à une longue liste de produits dont les deux pays affirment avec force être le berceau, comme les pommes de terre ou un dessert à base de dulce de leche (confiture de lait) appelé «soupir de Lima ».
Mais la querelle autour du pisco est un sujet sensible. Il y a une semaine au Chili, un présentateur du journal de la télévision nationale a été renvoyé. Sa faute? Avoir utilisé l'expression « pisco péruvien » lors d'un entretien avec un producteur de ce pays.
Les relations diplomatiques des deux voisins, qui s'étaient affrontés lors d'une guerre à la fin du 19e siècle, ne sont pas non plus de tout repos.
En janvier 2014, l'un de leurs derniers litiges, initié par une plainte du Pérou contre le Chili, a donné lieu à l'établissement par la Cour internationale de justice de La Haye d'une nouvelle frontière maritime.
Au-delà de ces différends, restent les habitudes de consommation : le Chili est aujourd'hui, avec les États-Unis, l'un des premiers pays où s'exporte le pisco produit par le Pérou.