Quatre mois après le puissant séisme qui a dévasté le pays andin, l'épreuve africaine apporte un peu de joie et de réconfort à tous les Chiliens.
58 points d’audimat à 7h30, des rues désertées, des écoles vides, de grandes entreprises qui n’ouvrent pas leurs portes : de 7 à 77 ans, tout le pays a vécu intensément cette rencontre qui lui aura permis de retrouver le goût de la victoire après près de 50 longues années de frustrations.
Le dernier succès chilien sur la plus prestigieuse des scènes remontait à l’édition 1962, à l’occasion d’une petite finale disputée à Santiago face à la Yougoslavie et conquise grâce à un but solitaire d’Eladio Rojas. Un but légendaire, à l'ombre duquel ont grandi plusieurs générations de joueurs et de supporters chiliens, et qu'ils ont parfois porté comme un fardeau...
Zamorano s'emballe
Après le match contre le Honduras, le légendaire buteur chilien Iván Zamorano, qui officie aujourd’hui en tant que commentateur télé, a signalé : "Le Chili a joué un très bon match. C’est sans doute l’équipe qui a proposé le meilleur football depuis le début de la Coupe du Monde. On a vu très peu de jeu offensif et c’est un plaisir de voir une équipe qui va de l’avant, qui cherche à provoquer et qui sait à quoi elle joue".
Au terme de la rencontre, les fans de tout le pays ont été emportés par une vague d’enthousiasme, sur laquelle a également surfé le Président Sebastián Piñera. Depuis Dichato, l’une des villes les plus marquées par le séisme, sous la pluie et flanqué de son épouse, le chef d’État a tenu à dire un mot à ses compatriotes : "Je félicite toute l’équipe parce que nous avons fait un grand pas. C’est toujours difficile d’entamer une compétition comme celle-ci, parce que les joueurs sont tendus et les attentes sont élevées. Mais je suis sûr que la Roja va démontrer l’étendue de son potentiel lors des matches à venir".
"J’espère que nous l’emporterons aussi contre la Suisse. Les joueurs savent qu’ils peuvent compter avec le soutien et la joie d’un peuple qui a beaucoup souffert et qui mérite à nouveau de sourire", a conclu M. Piñera.
Une génération dorée
Nelson Acosta, sélectionneur de la Roja lors de sa dernière Coupe du Monde de la FIFA, à France 1998, a suivi la rencontre depuis la ville de Duao, également aux côtés de victimes de la tragédie. Son avis allait dans le sens général : "C’est toujours bien de pouvoir commencer par une victoire. L’équipe a réussi un match digne de cette superbe génération de joueurs. Au terme du premier tour, ce sont le Chili et l’Allemagne qui ont proposé le football le plus intéressant".
Plus au nord, Santiago a vécu une journée marquée par les confettis, les coups de klaxon, les drapeaux, les caravanes et le bonheur d’être ensemble. Le centre-ville, notamment le Paseo Ahumada, la Plaza de la Constitución devant le siège du gouvernement, et la Plaza Baquedano ont accueilli des milliers de Chiliens qui avaient décidé de prendre leur journée pour faire la fête.
"Une victoire qui fait rêver", a titré le quotidien La Tercera dans sa version électronique, tandis que El Mercurio a estimé que ce "Succès historique alimente le rêve de la Roja en Afrique du Sud". Le journal du soir La Segunda, de son côté, se projetait déjà vers la suite : "Bielsa en veut plus : il faut se qualifier pour le second tour". Après 50 ans d’abstinence, le Chili a déjà retrouvé l’appétit.