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RUBÉN DARÍO
ILUSTRACION ESPAÑOLA Y AMERICANA, 1892
ANNIVERSAIRE DE LA MORT DE RUBÉN DARÍO1916 -6 FÉVRIER- 2020
On identifie trop souvent le poète nicaraguayen Rubén Darío avec le mouvement, surgi dans la littérature hispano-américaine à la fin du XIXe siècle, qui reçut le nom de modernisme. L'année 1888, date de la publication de son premier grand recueil, Azul (Bleu), est même considérée, par certains, comme celle de l'origine officielle du mouvement.
SYLVIA MOLLOY |
En réalité, il s'agit d'un phénomène collectif : plusieurs écrivains, dont Martí, del Casal, Gutiérrez Nájera, Díaz Mirón et Silva, prennent conscience d'une réalité littéraire nouvelle. Depuis la rupture politique avec l'Espagne, l'histoire littéraire de l'Amérique hispanique s'était réduite à une série de tâtonnements, dominée çà et là par de grandes figures isolées - Sarmiento et Montalvo, entre autres - dont l'œuvre dépassait les limites strictement littéraires.
1. Le « complexe de Paris »
ÉDITION PRINCEPS, D'«AZUL» |
2. « Ma littérature est à moi, en moi »
FÉLIX RUBÉN GARCÍA SARMIENTO |
Il est pourtant faux de diviser l'œuvre de Darío en deux parties : l'une délibérément européenne, donc artificielle, l'autre hispano-américaine, donc plus authentique. Évasion et retour, surface et profondeur sont des attitudes complémentaires chez lui, et il est aussi grand poète en chantant l'une que l'autre.
3. Un poète fondateur
RUBÉN DARÍO 1892 |
Dans un domaine plus spécifiquement hispano-américain, Rubén Darío a su revendiquer pour tous les écrivains de son continent le droit d'aborder librement tous les thèmes, même ceux qui paraissaient traditionnellement réservés à l'Europe, en une langue qui ignore délibérément les interdits académiques. Ce faisant, il prépare la voie à une littérature qui fuira des contraintes où elle ne se reconnaît pas, la seule littérature qui puisse, en Amérique hispanique comme partout ailleurs, constituer une parole neuve.
Le premier exemple en est ainsi le modernisme où les écrivains - qui n'ont plus à jouer un rôle politique - prennent conscience des possibilités d'un langage nouveau. On a souvent reproché à Rubén Darío et à ses amis l'imitation des modèles européens, surtout français ; on n'a pas assez compris que cette imitation signifiait non pas le snobisme de l'étranger, mais la reconnaissance d'un monde moderne qui refusait de trouver sa forme dans la rhétorique officielle proposée par l'Espagne et ses anciennes colonies au XIXe siècle : « On a dit que le modernisme fut une évasion de la réalité américaine. Il serait plus exact de dire que ce fut une façon de fuir l'actualité locale - qui était, aux yeux des modernistes, un anachronisme - à la recherche d'une actualité universelle, la seule et véritable actualité » (O. Paz).
Sylvia MOLLOY
Professeur à la State University of New York Buffalo
Œuvres de Rubén Darío
Obras completas, Madrid, 1917-1919, rééd. 1950-1955 ; en français, Pages choisies, Paris, 1918.
Études
H. GRATTAN DOYLE, A Bibliography of Rubén Darío (1867-1916), Cambridge (Mass.), 1935
J. SAAVEDRA MOLINA, Bibliografía de Rubén Darío, Santiago du Chili, 1946. R. L. F. DURAND, Rubén Darío, Paris, 1966
M. J. FAURIÉ, Le Modernisme hispano-américain et ses sources françaises, Paris, 1966
E. K. MAPES, L'Influence française dans l'œuvre de Rubén Darío, Paris, 1925, repr. fac-sim. Slatkine, 1977
A. MARASSO, Rubén Darío y su creación poética, Buenos Aires, 1954
E. MARINI PALMIERI, « K.-J. Huysmans y « La Tortuga de oro », in Cahiers de l'U.E.R. d'études ibériques de Paris-III, no 2, 1979
O. PAZ, « El Caracol y la sirena », in Cuadrivio, Mexico, 1966
J. E. RODO, Hombres de América, 2e éd., Barcelone, 1924
A. RAMA, Rubén Darío y el modernismo, Caracas, 1985
P. SALINAS, La Poesía de Rubén Darío, Buenos Aires, 1948.
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