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vendredi 16 mars 2018

CHILI : DE RETOUR AU POUVOIR, PIÑERA DÉVOILE SES PRIORITÉS


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LE PRÉSIDENT CHILIEN SEBASTIÁN PIÑERA À SON ARRIVÉE
AU PALAIS DE LA MONEDA, DIMANCHE, À SANTIAGO DU CHILI
PHOTO CHRISTIAN MIRANDA 
Le milliardaire de droite, qui succède pour la deuxième fois à la socialiste Michelle Bachelet, va devoir gérer plusieurs dossiers sensibles.
Aude Villiers-Moriamé
Sécurité, immigration, aide sociale à l'enfance. Ce sont quelques-uns des thèmes que Sebastián Piñera a définis cette semaine comme les priorités de son second mandat. Le nouveau président de droite a vite repris ses marques au palais présidentiel de la Moneda, à Santiago du Chili, annonçant coup sur coup une réforme des services de renseignements et une future loi migratoire pour faire face à la vague d'arrivées sans précédent de Vénézuéliens et d'Haïtiens dans le pays.

Le milliardaire de 68 ans a pris ses fonctions dimanche dernier, après avoir reçu l'écharpe tricolore de Michelle Bachelet, la présidente sortante. Une scène  qui s'était déjà produite en 2010 , lorsque Sebastián Piñera avait succédé à la socialiste après le premier mandat de cette dernière (2006-2010).

Capacité de renouvellement de la classe politique

Faut-il pour autant douter de la capacité de renouvellement de la classe politique chilienne ? Pour Mireya Dávila, politologue de l'Université du Chili, la réalité est plus complexe : « Piñera et Bachelet viennent de la même génération politique, qui a émergé après la dictature [1973-1990 NDLR]. Mais de nouveaux mouvements et personnalités politiques sont en train d'apparaître. » 

Surprise de ces dernières élections, le Frente Amplio, jeune coalition de gauche, a fait élire 20 de ses représentants à la Chambre des députés - sur 155 sièges - et sera une nouvelle force politique avec laquelle Sebastián Piñera devra composer. Le président, élu en décembre avec 54,5 % des voix face à son rival de centre-gauche Alejandro Guillier, ne bénéficie pas d'une majorité au Parlement, contrairement à sa prédécesseure, dont la marge de manoeuvre était déjà limitée.

Dossiers sensibles

Cette nouvelle génération politique n'épargnera pas Sebastián Piñera, très attendu sur plusieurs enjeux sociaux de taille. 

À commencer par la réforme des retraites, un sujet qui a  massivement mobilisé les Chiliens en 2016 et 2017 lors d'importantes manifestations. Sebastián Piñera, qui bénéficie d'un climat économique favorable, souhaite créer un administrateur public de fonds de pension pour venir en complément des administrateurs privés qui gèrent actuellement l'intégralité des retraites et génèrent d'énormes bénéfices. Devant la Moneda dimanche, José, 66 ans, qui a voté deux fois déjà pour Sebastián Piñera, l'attend au tournant sur cette question: « Avec tout ce que j'ai cotisé en tant que chauffeur de taxi, je devrais seulement toucher 240.000 pesos [323 euros NDLR] par mois. C'est invivable !»

Le milliardaire devra également s'atteler au chantier de l'éducation. Candidat, Sebastián Piñera s'était engagé à étendre la gratuité de l'université pour les familles les plus modestes,  mesure emblématique du gouvernement Bachelet qui permet actuellement à quelque 260.000 jeunes d'étudier gratuitement. « La bataille pour la qualité de notre éducation sera la mère de toutes les batailles [...] Nous nous efforcerons de tout faire pour que tous nos enfants et nos jeunes y aient accès », a promis le président.

Il lui faudra enfin piloter la reprise du dialogue avec les communautés Mapuche qui revendiquent leurs terres dans le sud du Chili et l'ouverture des débats pour la légalisation du mariage homosexuel - que Michelle Bachelet appuyait. Des questions sur lesquelles, selon Mireya Dávila, « Piñera devra jouer à l'équilibriste entre les différents camps au sein de son gouvernement, les libéraux et les ultra-conservateurs. »

Aude Villiers-Moriamé


Envoyée spéciale à Santiago du Chili