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« PROLÉTARIAT NUMÉRIQUE » |
La fée penchée sur l’aube de l’année 2018 a-t-elle fumé sa baguette magique ? Le 13 janvier, The Economist, l’organe officiel du libre-échange, s’inquiétait du sort du « prolétariat numérique » ; deux semaines plus tard, Le Point consacrait un dossier à l’urgence de « reprendre le contrôle » sur nos données personnelles, ces informations que tout internaute abandonne aux géants de la Silicon Valley, qui, eux, les monnaient à prix d’or. « Et si Facebook et Google nous rémunéraient pour les data que nous leur livrons ? », interrogeait ce magazine d’ordinaire plus mobilisé contre l’augmentation du salaire minimum (25 janvier).
ÉTATS GÉNÉRAUX DE LA RÉVOLUTION NUMÉRIQUE |
COUVERTURE DE « WHO OWNS THE FUTURE ? » |
Cette approche permettrait sans doute de rééquilibrer une concurrence malmenée par les oligopoles californiens. Mais elle perpétuerait une division fondamentale : les grandes entreprises possèdent les moyens de production, et les travailleurs leur vendent leur travail. La logique appelle un tout autre modèle. Les données personnelles n’ont en effet guère d’utilité prises individuellement. C’est leur agrégation et leur traitement statistique qui les rendent précieuses. Leur valorisation repose sur leur caractère collectif. Plutôt que d’instituer la propriété individuelle des données, il serait plus rationnel de socialiser cette ressource. Mise au service de la collectivité, elle contribuerait à améliorer la santé, les transports, l’éducation, la distribution, à réduire les dépenses d’énergie (3).
Derrière les frasques de la fée du Nouvel An, c’est ce projet que Gaspard Kœnig, Mme Parisot et leurs amis s’emploient à torpiller.
Pierre Rimbert
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(1) Jaron Lanier, Who Owns the Future ?, Allen Lane, Londres, 2013.
(2) Imanol Arrieta Ibarra, Leonard Goff, Diego Jiménez Hernández, Jaron Lanier et E. Glen Weyl, « Should we treat data as labor ? Moving beyond “free” », American Economic Association Papers & Proceedings, vol. 1, no 1, Pittsburgh, à paraître en mai 2018.
(3) Lire « Données personnelles, une affaire politique », Le Monde diplomatique, septembre 2016.