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dimanche 18 mars 2018

«BLASPHÈME» EN BOLIVIE: UNE SCANDALEUSE VIERGE EN STRING


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UNE JEUNE ARTISTE BOLIVIENNE, RILDA PACO,
A CRÉÉ LA POLÉMIQUE SUR LES RÉSEAUX
SOCIAUX EN PUBLIANT CETTE IMAGE
D'UNE VIERGE EN STRING.
Il y a quelques semaines, une jeune artiste bolivienne, Rilda Paco, partage l’une de ses œuvres sur sa page Facebook. Il s'agit d'une représentation de la Sainte Vierge... en petite tenue. L’image circule sur les réseaux sociaux, fait scandale et continue aujourd’hui encore d’être au cœur de la polémique. L'artiste aurait-elle « blasphémé » ?
STATUE GÉANTE DE LA VIERGE MARIE
DE SOCAVON, DANS LES ENVIRONS
D'ORURO, EN BOLIVIE 
« Sacrilège », « offensant », « insultant»... Ce sont quelques-uns des commentaires qu’a suscités le dessin de Rilda Paco, une jeune artiste bolivienne, qui a osé représenter un véritable symbole bolivien, la Vierge de la Mine. Avec une couronne sur la tête et un enfant dans ses bras, il s'agit d'une vierge Marie assez commune en somme. Mais voilà, sous la ceinture, elle ne porte rien, à part un simple string et des bas jusqu’à mi-cuisse. Et cette petite tenue a créé un véritable débat national.

Tout commence le 11 février pendant le carnaval d’Oruro, une ville située au sud de la capitale La Paz. La veille, une explosion a fait plusieurs morts, mais la fête continue, malgré tout. Rilda Paco, choquée, décide donc d’exprimer ce qu’elle ressent autour de cet événement qui attire chaque année des centaines de milliers de personnes. Elle dessine cette fameuse vierge Marie en sous-vêtements, avec, face à elle, des personnages typiques du Carnaval, tous visiblement saouls.

Son dessin, partagé sur sa page Facebook, devient viral et l’opinion se déchaîne très rapidement. Pour les croyants, nombreux en Bolivie, c’est inacceptable, et cette provocation doit être punie. Rilda Paco a effet « touché » à la patronne du folklore national, vénérée dans tout le pays.

Menaces de mort

Si le blasphème n’existe pas dans le droit bolivien et si le pays andin est laïc, ce point juridique n’arrête pas les autorités d’Oruro, qui annoncent vouloir poursuivre l’artiste via l’article 223 du code pénal concernant la destruction ou la détérioration du patrimoine national. Une communauté catholique choquée au point d’organiser un « acte de réparation » à la Vierge pour « s’excuser de cette offense », le 1er mars.

Des centaines de fidèles étaient rassemblés pour chanter, prier ensemble et ainsi montrer leur dévotion à Marie. Selon le gouverneur du département d’Oruro, en tête de cortège, « l’artiste n’a pas seulement offensé notre Vierge Marie mais également toutes les femmes boliviennes ». Les rangs comptaient également le commandant départemental de la police, en uniforme.

Mais pour certains, un procès et un acte de réparation n’étaient pas suffisants, il fallait donner une leçon à l’artiste. Depuis la diffusion de son dessin, Rilda Paco reçoit quotidiennement des menaces via les réseaux sociaux. « Tu as osé offenser Marie, tu mérites de mourir », « Je te préviens, je vais te violer pour te punir »… L’artiste a les larmes aux yeux quand elle en parle. « Aujourd’hui, je ne marche plus seule dans la rue, j’ai vraiment peur. Je n’ai jamais cherché à provoquer, mais à faire passer un message ».

« Hypocrisie »

Pour la jeune femme, son œuvre n’est pas un blasphème, plutôt une critique : « Je souhaitais évoquer les faux dévots, tous ces gens qui viennent au carnaval pour faire une procession au nom de Marie, mais qui se saoulent et qui agressent les femmes ». Censé être un événement religieux, le fameux carnaval d’Oruro, dont l’artiste est originaire, est en effet devenu une gigantesque fête où tous les excès semblent permis : alcool, violence, agressions sexuelles...

Les soutiens de Rilda Paco ont décidé de contre-attaquer sur les réseaux sociaux. Artistes, hommes politiques ou simples citoyens, ils font circuler, ces dernières semaines, des publications pour dénoncer « l’hypocrisie de ces protecteurs de la foi ». Des images mettent ainsi en parallèle des danseuses du carnaval, dont les jupes, très courtes, laissent apercevoir des dessous sexy avec le dessin de Rilda Paco et ce message : « Les tangas des danseuses ne font réagir personne, mais celui de la Vierge si ! »

Ou encore des photos de danseurs, saouls, vomissant dans le sanctuaire de la Vierge avec l’inscription : « Et ça, par contre, ça ne dérange personne ». La présidente de l’Assemblée elle-même a exprimé son soutien à l’artiste, via Twitter. « Ces menaces sont injustifiables », a-t-elle écrit.

Malgré la violence des réactions et la peur qui la tenaille, Rilda Paco assume son dessin et le dit : « Il faut que la société bolivienne mûrisse un peu en ce qui concerne l’art et la tolérance ». Elle est déjà rassurée : il n’y aura pas de procès contre son œuvre.