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jeudi 24 octobre 2019

CHILI: LA CRISE SOCIALE PERDURE, L'ONU ENVOIE UNE MISSION D'ENQUÊTE


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DES MANIFESTANTS À SANTIAGO, LE 24 OCTOBRE 2019
PHOTO MARTIN BERNETTI
Des dizaines de milliers de personnes ont une nouvelle fois manifesté jeudi contre les inégalités sociales au Chili où l'ONU a décidé d'envoyer une mission pour enquêter sur de présumées violations des droits humains.
Face à la multiplication des allégations sur le sujet, dans un pays dont plusieurs régions et la capitale Santiago restent placées sous état d'urgence, la Haut-Commissaire aux droits de l'homme des Nations unies Michelle Bachelet, qui a été à deux reprises présidente du Chili, a annoncé l'envoi de ces enquêteurs.

"Les parlementaires et le gouvernement (chiliens) ont tous exprimé le désir d'une mission des droits de l'homme de l'ONU", a-t-elle ajouté dans un tweet.

Près d'une semaine après le début de la fronde sociale, quelque 20.000 militaires et policiers restaient déployés. Mercredi, le gouvernement avait annoncé le rappel de réservistes de l'armée, pour assurer un soutien "logistique et administratif".

Pour tenter d'apaiser la situation, le président conservateur Sebastian Piñera a entrouvert jeudi la porte à une levée prochaine des mesures d'exception. "Nous travaillons à un plan de normalisation de la vie de notre pays (...) pour pouvoir cesser le recours au couvre-feu et, nous l'espérons, lever l'état d'urgence", a-t-il déclaré.

Le couvre-feu, reconduit jeudi pour la sixième nuit consécutive, avait d'ores et déjà été réduit la veille à cinq heures, de 22H00 à 04H00 (01H00-07H00 GMT), contre dix heures les nuits précédentes.

- "Tout un pays" -


UN CONTESTATAIRE PENDANT LA MANIFESATTION
 DU 24 OCTOBRE 2019 À SANTIAGO
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PHOTO MARTIN BERNETTI
Déterminés à maintenir la pression sur le gouvernement, des dizaines de milliers de personnes ont répondu pour la deuxième journée consécutive à l'appel à la grève générale lancé par des organisations syndicales et une vingtaine d'autres mouvements.

Mercredi, les Chiliens avaient été plus de 400.000 à manifester, selon les autorités.

Les protestataires réclament au gouvernement de retirer des rues les militaires déployés pour la première fois depuis la fin de la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990), ainsi que des réponses à la pire crise sociale traversée par le Chili en trente ans.

"C'est tout un pays qui se mobilise, nous sommes fatigués !", lançait une manifestante au milieu d'une foule tapant sur des casseroles devant les soldats dans le centre de Santiago.

Depuis le début des troubles, le 18 octobre, dix-huit personnes sont mortes, dont cinq tuées par des tirs des forces de l'ordre, selon des chiffres officiels. En outre, l'Institut national des droits humains (INDH) a recensé 535 personnes blessées, dont 239 par armes à feu, et 2.410 arrestations.

Devant la presse, le ministre de la Défense, Alberto Espina, a déclaré jeudi que l'armée agissait pour protéger les droits humains des Chiliens, non pour les violer.

Outre la mission onusienne annoncée par Mme Bachelet, le président Piñera a invité l'ex-présidente chilienne et José Miguel Vivanco, le directeur de la division Amériques de l'ONG Human Rights Watch, à se rendre au Chili.

Le père de Mme Bachelet, arrêté et torturé après s'être opposé au coup d'Etat de Pinochet, est mort en prison en 1974. Elle-même a également été torturée avant de partir en exil

- Sommet international -


Parallèlement aux mobilisations, de nombreux habitants de Santiago tentaient de reprendre une vie normale.

Environ 6.000 autobus ont été déployés pour faire face à la paralysie du métro, où seules trois lignes fonctionnaient jeudi.

Certains supermarchés ont par ailleurs rouvert et la plupart des écoles publiques accueillaient les élèves.

Cette colère sociale, qui a donné lieu à de violentes manifestations et à des pillages, a été provoquée par l'annonce d'une hausse de 3,75% du prix du ticket de métro dans la capitale, mais n'est en rien retombée après l'annonce de la suspension de cette mesure.

Le mouvement, hétérogène et sans dirigeants identifiables, s'est amplifié, nourri par le ressentiment face à la situation socio-économique et aux inégalités dans ce pays de 18 millions d'habitants.

L'annonce d'une série de mesures sociales mardi par M. Piñera, qui a reconnu n'avoir pas anticipé la crise et demandé "pardon" à ses compatriotes, ne semble pas avoir eu l'effet désiré.

Malgré l'intensité de la crise, le gouvernement a confirmé la tenue du 13 au 17 novembre à Santiago du sommet du forum de Coopération économique Asie-Pacifique (Apec), où sont notamment attendus les présidents américain Donald Trump, russe Vladimir Poutine et chinois Xi Jinping.

Le président de la confédération sud-américaine de football, Alejandro Dominguez, a assuré de son côté que la finale de la Copa Libertadores se jouerait bien le 23 novembre à Santiago.