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jeudi 21 octobre 2010

Un cinéaste au fond des yeux : Patricio Guzmán

Un gros plan qui vous bouleverse ? Une scène que vous avez ratée ? C’est un questionnaire intime, disons prousto-godardien, le plus illustré possible (photos, extraits, sons…), que l’on soumet aux cinéastes, célèbres ou pas, qui comptent pour nous. Ainsi se dégage le parfum de leur univers, de leur histoire avec le cinéma, de leurs rêves. Dans le fauteuil du réalisateur aujourd’hui, le Chilien Patricio Guzmán (“La Bataille du Chili”, “Salvator Allende”), dont “Nostalgie de la lumière” est projeté demain, vendredi, en séance spéciale à Cannes.

Patricio Guzmán est un cinéaste chilien né le 11 août 1941 à Santiago. Il a signé de nombreux documentaires sur l'histoire de son pays, notamment La Bataille du Chili, coréalisé avec Chris Marker, mais aussi Salvador Allende (2004). Son dernier film, Nostalgie de la lumière, une méditation sur les traces laissées par la dictature au Chili, est présentée en séance spéciale à Cannes vendredi 14 mai.

Dans quel état vous met Cannes ?

Euphorie. Champagne. Réalisme. Dépression.

Quel est le premier film que vous avez vu et où l'avez-vous vu ?

Fantasia,
de Walt Disney, à Valparaíso (Chili), à l’âge de 7 ans.

D'où vient votre envie de faire des films ?
Des ombres reflétées sur un mur qu’il y avait en face de ma maison d’enfance

Un film un peu au-dessus de tous les autres ?

Otto e mezzo
[Huit et demi, NDRL], de Federico Fellini.


Huit et demi (1963) de Federico Fellini

Un livre que vous avez rêvé d'adapter ?
Aucun.

Vous tournez une suite. Laquelle ?

Le Chili étant un grand pays de 4 000 km de long, je n'ai qu'à me baisser pour trouver un sujet...

A quoi êtes-vous sensible pendant la projection de votre film lors d'un festival ?

A la qualité du son.

Revoyez-vous vos films ? Pourquoi ?

Oui, pour m’assurer qu’ils sont bons.

Une scène que vous avez ratée ?

C’est un film entier que j’ai raté : La Rosa de los vientos (La Rose des vents)

Une scène inoubliable ?

La disparition de Jorge Müller (mon chef opérateur, tué par la dictature de Pinochet).

Jorge Müller et Patricio Guzmán (1973)


Un film qui vous donne envie de vous engager ?

Le film Ariane Mnouchkine-L'aventure du Théâtre du Soleil, de Catherine Vilpoux.

Vos films ont-ils une nationalité ?

Le Chili.

Un gros plan qui vous bouleverse ?

La fileuse dans Ether, de Viswanadhan.

Un travelling qui vous transporte ?

La fugue de Jean-Pierre Léaud dans Les 400 Coups.

Le dernier film qui vous a fait pleurer ?

Bienvenu chez les Ch'tis
.


Bienvenue chez les Ch'tis (2008) de Dany Boon

Un film qui vous donne envie de danser ?
Boxing Gym,
de Frederick Wiseman.

Boxing Gym (2010) de Frederick Wiseman

Quel acteur regrettez-vous de n'avoir jamais filmé ?
Les oiseaux du Peuple migrateur.

Une ville dans un film ?

La ville de Blade Runner, de Ridley Scott.


Blade Runner (1982) de Ridley Scott

A quelle(s) critique(s) vous fiez-vous ?
Louis Marcorelles [grand critique, fondateur de la Semaine Internationale de la critique à Cannes, il travailla entre autres pour Le Monde et Les Cahiers du cinéma, NDRL].

Pour lequel de vos films avez-vous un faible ?

Nostalgie de la lumière
.

A quel stade de votre vie pourriez-vous envisager de ne plus faire de films?

A 115 ans.

Une chanson que vous n'avez jamais autant aimé que dans un film ?

Amarcord,
de Nino Rota.

Par quoi vos films sont-ils obsédés ?

Je ne le sais pas.

Si vous étiez un peintre ? (Ou un musicien ?)

Stravinsky.

Igor Stravinsky
En 2040, le cinéma sera...

Mieux que jamais.

Pourquoi filmez-vous ?
A cause de mon instinct et de mes désirs.

Le verre est-il à moitié vide ou à moitié plein ?

Je ne sais même pas ce qu'est un verre !

Propos recueillis par Mathilde Blottière